S'agissant du relèvement à 10 % du seuil de revente à perte, je rappelle que nous ne parlons pas de prix, mais de marges. Vous savez comment cela se passe : sur les produits d'appel, les marges sont écrasées ; parallèlement, des taux de marge beaucoup plus importants sont appliqués sur des produits agricoles achetés à très bas prix. Il revient donc aux distributeurs de rééquilibrer leurs marges. Ceux qui refuseront de le faire seront désignés comme n'ayant d'yeux que pour leurs profits, concourant ainsi à la destruction de la valeur au détriment des consommateurs. Nous en appelons à leur responsabilité. M. Jean-Baptiste Moreau a évoqué le name and shame, un dispositif sur lequel nous pourrons nous appuyer pour mettre en avant les centrales de distribution vertueuses, qui travaillent au service de l'agriculture, des consommateurs et du pouvoir d'achat de l'ensemble des Français.
Monsieur Charles de Courson, je suis prêt à explorer les pistes pour lutter contre la concentration des plateformes et à faire des propositions. Mais c'est une démarche que nous ne pouvons entreprendre qu'au niveau européen. La France a besoin d'alliés, car certaines centrales de distribution sont logées dans des pays voisins.
Vous avez parlé du surcoût qu'entraînerait une part de 50 % de produits bio dans la restauration collective, mais il faut savoir que la lutte contre le gaspillage alimentaire pourrait engendrer une économie de 27 centimes par repas. Le choix d'une alimentation sûre, saine et durable est un choix politique clair.
Mme Laure de La Raudière m'a interrogé sur la réduction des produits phytosanitaires. J'ai expliqué comment les quatre ministères se sont engagés sur cette question, parallèlement aux réflexions menées au Parlement. Avec les certificats d'économie des produits phytopharmaceutiques – CEPP –, nous avons les moyens de diffuser des bonnes pratiques pour la transition écologique. Le Gouvernement souhaite pérenniser le dispositif et l'ouvrir aux territoires d'outre-mer, ce qui nous semble indispensable.
M. Richard Ramos a demandé que des parlementaires puissent siéger au CNA. C'est une question d'ordre réglementaire, mais dont nous pouvons discuter avec le président du conseil, Guillaume Garot. Nous confierons prochainement au CNA un travail de réflexion sur l'étiquetage. Il faudrait travailler sur la représentation du CNA sur le territoire national et voir comment le conseil peut évoluer en un véritable « parlement » de l'alimentation.
Monsieur Jacques Cattin, les ententes sont interdites entre deux producteurs, deux transformateurs ou deux distributeurs. La contractualisation, elle, se fait entre un producteur, un transformateur et un distributeur : les trois ont intérêt à se parler pour nouer des relations commerciales. Avec ce projet de loi, nous souhaitons provoquer un effet cascade. Les informations tirées de la première base de négociation doivent servir à la deuxième base, afin que les prix ne dérapent pas et que leur niveau soit suffisant pour permettre à chacun d'en tirer un revenu satisfaisant.
Monsieur Rémi Delatte, je regrette que vous ne trouviez rien qui vous satisfasse dans ce projet de loi. Je vous invite à relire le texte ; vous verrez que certains dispositifs correspondent aux attentes des agriculteurs. Pour construire ce texte, nous nous sommes inspirés des éléments qui ont fait consensus lors des États généraux de l'alimentation, des conclusions des ateliers auxquels ont participé des agriculteurs, des parlementaires, des représentants de la société économique ou encore des ONG. C'est un projet de loi qui donne plutôt satisfaction. Certes, il peut y avoir des regrets çà et là, la volonté de muscler le texte sur telle ou telle partie. Pour autant, l'architecture globale convient aux agriculteurs. Il nous reste à leur faire la démonstration que le dispositif que nous envisageons fonctionne. Cela, nous ne pourrons le faire qu'une fois le texte voté – je compte sur vous sur ce point.
La discussion est ouverte. Vous avez évoqué la proposition de loi de M. Arnaud Viala, sur laquelle je me suis exprimé ; vous regrettez que le champ de la loi ne soit pas suffisamment étendu, j'ai expliqué tout à l'heure quelle était la temporalité que nous avions choisie. Vous aurez l'occasion, lors de cette législature, de parler des autres sujets qui vous intéressent. La vie du ministère de l'agriculture ne s'arrêtera pas avec la promulgation de la loi. Il nous reste encore à oeuvrer en faveur des agriculteurs.
M. Fabien Di Filippo m'a interrogé sur les chambres d'agriculture. Les élections se tiendront en janvier 2019 ; il me semble logique de ne pas changer les règles sept mois avant. Cela ne nous empêche pas de mener une réflexion, notamment avec les organisations agricoles.
Monsieur Serge Letchimy, je connais l'existence de ces clauses de sauvegarde. Vous avez rappelé l'action que nous avons menée sur la banane et le rhum. Nous avons monté, avec l'Espagne et le Portugal, un comité mixte « banane », le secteur étant stratégique pour les régions ultra-périphériques – RUP. Nous avons fait également la promotion de la banane équitable et durable française. Ce sont les petits producteurs qui peuvent participer à la structuration d'une offre alimentaire complémentaire sur les territoires d'outre-mer.
Je ne souhaite escamoter aucun débat. Il faut aborder chaque question avec la force qui est la nôtre, notre envie de contribuer à faire progresser l'agriculture et les modèles agricoles français. Je souhaite que nous évitions les postures et le dogmatisme car, nous en sommes tous conscients, l'agriculture appelle des solutions pragmatiques. Je vous remercie de votre attention et reste à votre disposition pour vous apporter les meilleures réponses possibles.