Intervention de Odile Renaud-Basso

Réunion du mercredi 26 juillet 2017 à 11h10
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Odile Renaud-Basso, directrice générale du Trésor :

Merci pour vos questions ; je vais essayer d'y répondre dans l'ordre, et je vous donnerai les raisons pour lesquelles je ne peux pas répondre à certaines d'entre elles.

S'agissant du différentiel de croissance entre la France et d'autres pays européens, nous sommes en effet dans une phase d'accélération de la croissance, et de rattrapage des autres pays européens. Nos prévisions pour 2017 et 2018 nous rapprochent de la moyenne, et le décalage se réduit. Les situations en Europe sont diverses : notre dynamique est plus vive que celle de l'Italie, tandis que l'Espagne, qui a connu une crise plus profonde, rebondit plus fortement.

Le commerce extérieur contribue négativement à la croissance en 2016. L'une des caractéristiques de notre commerce extérieur est que nous avons une grande force sur certains produits d'exportation, très gros et très ciblés. Quelques Airbus de moins, ou livrés avec retard, ont un effet majeur sur les résultats de notre commerce extérieur. Nos exportations sont concentrées dans certains secteurs comme l'aéronautique, la défense, ou le secteur naval. Par ailleurs, en 2016, des éléments conjoncturels dans le secteur de l'agriculture ont eu des effets négatifs sur notre commerce extérieur, et les recettes du tourisme ont pâti du risque terroriste.

Notre grande dépendance aux grands exportateurs est une force en ce qu'elle montre l'importance de notre qualité industrielle, mais c'est également une faiblesse : notre grande différence par rapport à l'Allemagne est l'absence d'un tissu de petites et moyennes entreprises (PME) ou d'entreprises moyennes qui exportent et contribuent à consolider nos volumes d'exportation. C'est un des enjeux stratégiques en matière de commerce extérieur : augmenter le volume d'exportation des entreprises moyennes.

Je ne sais pas si nous pouvons prendre des engagements quant à la résorption du déficit commercial, car nous avons essayé plusieurs fois sans succès, mais nous devons arriver à augmenter le nombre d'entreprises exportatrices, ainsi que le volume exporté par chacune d'entre elles.

Les politiques pour atteindre cet objectif peuvent être structurelles : les éléments de compétitivité coût et hors coût, le soutien à l'innovation, la capacité à innover et développer de nouveaux processus dans l'ensemble des secteurs sont très importants. D'autres éléments d'accompagnement ont pour objet de faciliter l'accès aux marchés, ou d'aider à résoudre les problèmes administratifs et réglementaires dans un certain nombre de pays émergents, où ils sont parfois compliqués. Les politiques structurelles et les mesures d'appui aux entreprises se complètent.

Les prévisions de croissance avaient en effet été jugées un peu optimistes par le Haut Conseil des finances publiques, et à plusieurs reprises, nous nous sommes demandé si nous avions un biais optimiste. Je pense que nous ne l'avons plus, et que l'intervention du Haut Conseil a beaucoup aidé en ce sens. Depuis qu'il existe un débat public sur la prévision de croissance du Gouvernement et qu'un point de vue extérieur est donné sur sa plausibilité, le Gouvernement a été amené à retenir des prévisions de croissance très proches du consensus des économistes. Ainsi, en 2016, notre prévision de croissance était très proche de celle qui a été retenue.

Par ailleurs, comparer les prévisions du Haut Conseil aux évolutions au cours de l'année nous rend très modestes, et nous devons tous avoir conscience des aléas qui pèsent sur les prévisions de croissance. Au milieu de l'année, les erreurs de prévision sur la croissance peuvent atteindre 0,4 %, dans un sens ou un autre. Et nous ne sommes pas moins bons que d'autres, la même chose vaut pour tous les prévisionnistes. Il y a un degré d'incertitude irréductible, restons modestes. Mais le mécanisme institutionnel mis en place avec le Haut Conseil a conduit à ce que les prévisions de croissance soient très proches des prévisions techniques.

S'agissant de la coordination des politiques économiques et des solutions pour améliorer la gouvernance de la zone euro, nous sommes convaincus qu'à ce stade, il vaut mieux parler des politiques menées que des schémas institutionnels. En France, la tendance est toujours de se projeter dans de tels schémas, de s'interroger sur le besoin d'un président, d'un ministre des finances ou d'un parlement de la zone euro. À ce stade, nous pensons que l'important est d'abord de se pencher sur les politiques à mettre en oeuvre.

De ce point de vue, la priorité est de parachever l'union bancaire. Nous avons mis en place une supervision unique des grosses banques de la zone euro, et installé des mécanismes pour disposer de capacités d'intervention communes si des banques sont en difficulté. Cela s'accompagne de la possibilité de fermer des banques lorsqu'elles sont dans une situation financière non solvable. Il y a encore beaucoup de réglementation financière à discuter dans ce domaine, c'est la priorité à nos yeux.

Ensuite, à terme, nous sommes convaincus de la nécessité d'un budget de la zone euro, pour faciliter la convergence des économies et jouer un rôle de stabilisation économique permettant de répondre aux chocs. Nous avons vu qu'il existe des chocs asymétriques, auxquels tous les pays ne réagissent pas de la même façon.

C'est un chantier très lourd, très difficile, mais sur lequel s'ouvre une fenêtre d'opportunité. Des travaux de la Commission européenne ont été mis sur la table, et beaucoup de pays de la zone euro ont compris qu'il était nécessaire d'avancer sur ces sujets.

Je crois que vous auditionnerez le directeur général de l'Agence France Trésor, qui vous expliquera de façon plus détaillée que moi le mécanisme des primes d'émission. Ce mécanisme est lié au fait que, pour assurer la liquidité de la dette, l'Agence France Trésor a besoin d'émettre sur des souches préexistantes, donc de réabonder des émissions qui existent déjà pour que la dette soit suffisamment liquide sur le marché. Cela signifie que nous allons émettre sur des obligations dont le taux d'intérêt est plus élevé que celui du marché aujourd'hui. Nous allons certes le payer à terme, mais ce surcoût est compensé par une prime que verse le souscripteur. Comptablement, cela réduit notre dette à court terme, mais c'est complètement neutre sur le plan budgétaire et financier...

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