Je commence par revenir sur une question portant sur la fraude fiscale, à laquelle je n'ai pas répondu tout à l'heure. Par définition, ce phénomène est très difficile à évaluer, mais de grands progrès ont déjà été accomplis et d'autres sont en cours, dont nous devrions prochainement mesurer les effets en termes de coopération internationale visant à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. Un grand plan de lutte contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices – Base Erosion and Profit Shifting (BEPS) en anglais –, piloté par l'OCDE et prévoyant des conventions qui permettent l'échange automatique d'informations, est actuellement mis en place et devrait avoir rapidement des effets positifs.
Nous avons beaucoup travaillé sur la question du Brexit, à la fois en ce qui concerne les termes du départ des Britanniques et la définition des modalités de la relation future entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. Les équipes de la Commission européenne pilotent l'ensemble des travaux : les services chargés de la régulation financière se penchant sur les aspects relatifs à la régulation et à la stabilité financière, tandis que le service chargé de la politique commerciale apporte son expertise en matière d'accords commerciaux – puisque le scénario le plus probable est celui d'un accord de libre-échange. Nous pensons que l'essentiel des relations va se définir dans un nouveau cadre entre l'Union européenne et le Royaume-Uni, qu'il s'agisse des relations commerciales ou des projets de coopération, par exemple dans le secteur du nucléaire. Pour ce qui est des accords bilatéraux, ils devraient plutôt porter sur des coopérations relatives à la sécurité ou aux échanges d'informations, notamment en matière de lutte contre le financement du terrorisme.
L'aide au développement, évoquée par Mme Dupont, subira effectivement des annulations de crédits, portant beaucoup plus sur les dépenses qui relèvent du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, les dons en particulier, que sur celles qui relèvent du Trésor. Cela dit, la gestion 2017 ne devrait pas en être affectée et nous ne devrions pas avoir à réduire la voilure trop fortement. Pour la suite, une trajectoire a été annoncée, avec l'objectif d'arriver à 0,55 % du PIB consacré à l'aide au développement en 2022.
Le CETA est un bon accord – nous avons assez bien négocié les points de fragilité qui avaient été identifiés –, qui devrait avoir un effet plutôt positif sur l'économie française.
L'intégration des facteurs de risque dans les prévisions se fait toujours en prévoyant un scénario « central », assorti d'une appréciation qualitative des facteurs de risque : c'est à partir du scénario central, le plus probable, que l'on évalue ensuite les aléas, à la hausse ou à la baisse.
Mme Louwagie m'a interrogée sur la mission du Haut Conseil des finances publiques. Il me semble que, davantage que cette instance, c'est le Parlement – votre commission en particulier – qui a un rôle particulier à jouer en matière de prévisions de finances publiques, car elles sont liées à l'examen de la loi de finances elle-même, de la façon dont elle traduit les engagements pris par le Gouvernement.
Pour ce qui est de l'assurance-crédit et de la reprise par Bpifrance, il est un peu tôt pour disposer d'un bilan. Notre première évaluation est extrêmement positive, notamment en ce qui concerne la diffusion de l'assurance-crédit à destination des PME. Bpifrance présente le gros avantage de disposer d'un réseau présent sur l'ensemble du territoire et d'être en contact avec un très grand nombre de PME : ainsi, dès que les services de Bpifrance voient passer un projet susceptible de faire l'objet d'une exportation, ils sont à même de conseiller à la PME concernée des produits d'assurance-crédit adaptés. En cela, ils sont beaucoup plus dynamiques et proactifs que ne l'était la COFACE, et l'on ne peut donc que se féliciter de la reprise de l'activité d'assurance-crédit par Bpifrance.
L'investissement constitue l'une des priorités de la politique économique du Gouvernement. Toute la difficulté consiste à cibler les investissements permettant un vrai retour en termes de croissance potentielle en même temps qu'une bonne rentabilité socio-économique. Le Gouvernement s'est fixé pour objectif la mise au point d'un grand plan d'investissement ciblé sur certains secteurs. Les investissements dans le domaine de la formation et de l'éducation nous paraissent particulièrement importants car, même si nous avons un certain retard d'investissement par rapport à d'autres pays, nous disposons d'un équipement en infrastructures relativement solide.
Les domaines de l'intelligence artificielle et du big data constituent effectivement, madame Magne, d'importants gisements de croissance. Des politiques de filières, destinées à faciliter et développer l'innovation, sont mises en oeuvre par le ministère de l'industrie. Pour ce qui est des politiques assez élaborées de financement des start-up qui ont été mises en place, nous avons identifié un problème : quand les entreprises se développent, les acquéreurs français potentiels peinent à atteindre la taille critique en matière de fonds disponibles pour acheter ces entreprises au prix qui en est demandé. Ainsi, il est très fréquent que des entreprises françaises qui sont de vraies pépites nous échappent parce qu'elles sont achetées par des fonds étrangers, notamment américains. Trouver des solutions de nature à remédier à ce problème constitue actuellement un véritable enjeu.
En réponse à M. Jean-Pierre Vigier, je dirai simplement que pour réduire la dette, il faut réduire le déficit : c'est une logique mathématique à laquelle on ne peut échapper.
Des progrès importants restent à accomplir pour atteindre l'objectif consistant à mettre sur pied une véritable armée européenne. Cela devra se faire progressivement, et je crois que la proposition de la Commission européenne de créer un fonds européen de défense afin de permettre aux États européens de définir en commun des programmes de recherche, de développement de prototypes, ou éventuellement des acquisitions, constitue une étape extrêmement importante. Nous devons également faire en sorte que la Banque européenne d'investissement (BEI) améliore sa capacité à financer des activités touchant directement ou non au secteur de la défense.
Pour ce qui est de la question de M. Bourlanges relative à la règle de stabilité visant à limiter le déficit à 3 % du PIB, je précise que les Allemands ont fini par admettre, et ont même inscrit dans leur Loi fondamentale, qu'il fallait se référer au solde structurel ajusté en fonction du cycle économique – c'est la prise en compte de l'aspect conjoncturel que vous évoquez. Des progrès ont donc été accomplis en la matière, mais des divergences d'appréciation subsistent avec nos voisins d'outre-Rhin. Premièrement, nous plaidons en faveur d'une approche coordonnée des politiques économiques, laissant plus de place au jugement par rapport à l'application mécanique des règles prônée par notre partenaire. Deuxièmement, si nous sommes d'accord pour considérer que les pays ayant des problèmes de compétitivité doivent faire des efforts pour y remédier, notamment en s'efforçant de maîtriser leurs coûts salariaux, nous nous demandons si le surplus de la balance des paiements allemande peut finir par constituer un problème pour la zone euro. Nous avons tendance à considérer que l'Allemagne, qui bénéficie d'un euro relativement faible par rapport à la compétitivité, devrait davantage stimuler son économie par des investissements et une politique salariale plus dynamique. Des progrès ont été faits, mais nous considérons que des efforts restent à accomplir des deux côtés pour parvenir à une situation plus équilibrée.