Intervention de Laurence Deflesselle

Réunion du mardi 17 avril 2018 à 14h00
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Laurence Deflesselle, directrice départementale adjointe, coordonnatrice du pôle protection des populations de la DDCSPP de Mayenne :

En ce qui concerne les moyens, l'équité entre départements doit prévaloir, et il n'y a pas que Lactalis ou la filière laitière qui soient susceptibles de poser problème. Il appartient aux responsables de programmes d'établir les abaques d'affectation des moyens dans les différentes directions départementales. Je vous ai fourni les données factuelles concernant nos moyens ; au-delà, c'est toute la problématique d'Action publique 2022 que de déterminer quelle est la place que l'on souhaite conserver aux services de l'État sur le terrain.

Si l'on peut parler de rééquilibrage, c'est qu'il me semble qu'une part trop importante est accordée au nombre d'habitants dans le calcul des moyens attribués. Certains départements sont en effet qualifiés de petits, eu égard à leur nombre d'habitants, alors que, pour bien quantifier les moyens, il est nécessaire d'inclure dans les critères de répartition l'ensemble des activités économiques qui peuvent nécessiter la présence des agents de l'État. Cela vaut d'ailleurs tout autant pour les politiques de cohésion sociale, pour lesquelles les moyens sont calculés en fonction du nombre d'habitants, alors que, précisément, les territoires peu denses sont souvent moins bien structurés que les autres, disposent de moins de lieux d'accueil du public et auraient besoin d'une présence plus soutenue des services de l'État pour répondre à la demande.

En ce qui concerne l'attitude de Lactalis, l'entreprise est en effet réputée pour sa discrétion, mais je tiens à lever toute ambiguïté sur le fait que, en vertu du règlement européen qui s'applique à tous les industriels, un exploitant qui trouve un agent pathogène dans son environnement n'a pas à en alerter les autorités sanitaires. Il appartiendra ensuite à la justice de déterminer si une accumulation de signaux faibles n'aurait pas justifié, de la part de Lactalis, des investigations complémentaires qui auraient pu déboucher sur la nécessité d'informer les autorités nationales, mais le simple fait de ne pas avoir transmis à l'administration les résultats des autocontrôles « environnement » du mois d'août et du mois de novembre n'est pas en soi constitutif d'une infraction, dans la mesure où ces résultats ne concernaient pas les produits déjà mis sur le marché. Cela étant, l'entreprise aura à démontrer qu'elle a diligenté à partir de ces résultats les analyses complémentaires nécessaires, sachant qu'elle ne disposait pas à l'époque d'informations concernant des bébés contaminés, et qu'il faut donc se garder de considérer la manière dont elle a agi à la lumière des faits ultérieurs.

En ce qui concerne les réponses fournies par l'usine, la réactivité des responsables a été bonne. C'est un point qui doit être souligné dans la mesure où, ainsi que le montrent les archives, cela n'avait pas été le cas lors de la crise de 2005, au cours de laquelle le préfet de l'époque avait dû intervenir parce que l'entreprise faisait obstruction à certaines réclamations des enquêteurs.

Vous m'avez également interrogée sur la répartition des rôles entre l'usine et la direction du groupe. Sur ce point particulier, nous avons constaté que les cahiers des charges signés avec les laboratoires prestataires étaient gérés au niveau du groupe de manière transversale. Or, il se trouve que le délai de conservation des souches pathogènes figurant dans ces cahiers des charges s'est révélé trop court pour nous permettre de procéder à certaines investigations, puisque le laboratoire prestataire ne disposait plus des souches identifiées en août et en novembre. À titre de comparaison, le laboratoire départemental conserve les souches sur lesquelles ont été isolés des éléments pathogènes pendant un an, ce qui est précieux lorsqu'on a besoin de consolider des informations. Nous avons donc fait une note à Lactalis en ce sens mais, sur cette question des délais de conservation, l'usine de Craon n'avait, elle, aucun pouvoir.

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