Lorsque nous avons transmis l'information initiale, nous avons terminé notre travail. La chaîne de commandement est totalement militaire et, vu la brièveté des délais d'action, il n'y a pas de concertation. Cette chaîne remonte au Premier ministre. Je n'en ai pas la pratique pour vous en dire plus. En outre, ce n'est pas forcément l'information que nous transmettons qui va déclencher l'action de l'armée de l'air, qui a son propre système de surveillance. En particulier pour un aéronef si peu coopératif qu'il n'a pas de transpondeur, seuls leurs radars primaires sont efficaces.
S'agissant des procédures d'alerte, il y a deux niveaux, ALERFA et DETRESFA, en fonction de la gravité. Nous pourrons vous donner une note si c'est souhaitable, mais le domaine est très technique.
L'incident le plus fréquent est la perte de la liaison radio, parce que le pilote a mal réglé la radio ou a mal entendu ce qui lui disait le contrôleur lorsqu'il lui a communiqué, à la sortie de sa zone, la fréquence suivante, sur laquelle il était censé se régler. S'il ne trouve pas l'interlocuteur, il rappelle la fréquence précédente, car il est encore à sa portée, ou lui-même est appelé sur la fréquence de détresse. Ces échanges peuvent prendre un certain temps. Le contrôle de l'aviation civile prévient la défense aérienne qui, dans les cas que je connais, envoie un avion reprendre contact avec le pilote et les choses se rétablissent. Si l'on se trouvait dans le cas d'une personne qui abandonne volontairement le contact radio pour mener une attaque, la défense aérienne lancerait son opération. Ceci pour dire que le lien entre le contrôle aérien et la défense aérienne est bien rôdé. Je ne peux pas vous donner de chiffres, mais nous pouvons chercher et les fournir à votre commission. Il est en effet intéressant de disposer du nombre annuel de pertes de communication, les comloss comme nous les appelons, et de sorties de la défense aérienne qui en découlent. Autre chose est la perte de communication avec un avion qui reste sur la bonne trajectoire, ce qui relève – rarement - de la panne ou – souvent – d'une maladresse.
S'agissant du personnel navigant qui, au passage des passeports, se trouverait être lié à un fichier, il serait traité comme un passager dans ce cas – ou pire – mais je ne suis pas certain que la police avertirait la DGAC. Assez rapidement, les systèmes de suivi seraient alertés. Quant au personnel aéroportuaire non navigant qui a un badge pour accéder aux installations, il l'obtient après une double enquête de la police et de la justice. Le système informatique Stitch de gestion des badges permet aux services de police d'accéder et au fichier des badges et au fichier S ou au fichier des terroristes et d'agir. La réglementation européenne impose de refaire l'enquête sur ceux qui détiennent un badge tous les cinq ans ; la France le fait tous les trois ans. Mais une radicalisation se produit beaucoup plus rapidement. La seule solution, c'est de permettre à la police d'interroger les bases de badge. Il y a donc bien une surveillance.
Nous avons toujours refusé, ce qu'on fait aux États-Unis et dans d'autres pays : exempter le personnel navigant de ces contrôles. Bien entendu, ils sont adaptés : ces personnels disposent d'une hache dans le cockpit, à quoi bon leur confisquer un canif ? Nous sommes surtout attentifs aux explosifs. Nous avons grande confiance dans les personnels, mais n'importe qui peut être victime d'un chantage, sur sa famille par exemple. Nous tenons donc à ce genre de contrôles dans l'espace européen.