Il est un peu tôt pour dresser le bilan des hôpitaux de proximité. Nous avions plaidé pour que le statut d'hôpital de proximité soit mieux reconnu. Aujourd'hui, il est adossé aux missions de service public telles qu'elles figurent dans la loi Touraine et un financement mixte a été calé – pour partie financement à l'activité, pour partie dotation socle. C'est dans ces établissements que l'on peut sans doute inventer des coopérations nouvelles entre médecine de ville et médecine hospitalière, et en tout cas les tester. Nécessité faisant loi, de nombreuses collectivités territoriales n'ont fort heureusement pas attendu l'adoption des grandes lois pour retrousser leurs manches. Alors que la France n'a jamais compté autant de médecins, jamais le problème de l'accès aux soins, qui entraîne celui de la qualité des soins auxquels accèdent les patients, n'a été aussi criant. Ce paradoxe français, difficile à faire comprendre, résulte de certains blocages dont j'imagine que vous les signalerez.
Depuis quelques années déjà, nous avons fait de conditions d'installation coercitives une proposition parmi d'autres. Nous avons proposé de conserver la liberté d'installation mais de ne plus autoriser l'installation en secteur 2 dans les zones surdotées, en refusant cette possibilité au énième spécialiste venant s'installer dans une ville déjà largement fournie. Nous estimons qu'il ne revient pas à la solidarité nationale de financer des médecins qui choisissent de s'installer là où le besoin ne s'en fait pas sentir en termes de santé ou de santé publique. Le Gouvernement esquisse de nouvelles propositions pour tenter de trouver une voie de passage entre la liberté d'installation et la coercition. Pour être franc, de nombreuses solutions ont été testées depuis des années, et je pense que ce plan sera la dernière chance d'éviter la coercition. S'il ne fonctionne pas, je ne vois pas comment on pourra faire l'économie d'un débat transparent à ce sujet. Les Français pourraient demander à juste titre de manière un peu plus vigoureuse pourquoi, alors qu'il n'y a jamais eu autant de médecins dans notre pays, on a autant de mal à accéder à un cabinet médical. Il y a là une question politique majeure.
La FHF plaide depuis toujours en faveur de la coopération entre médecine de ville et hôpital. Dans un premier temps, les GHT regroupent des hôpitaux publics ; dans un second temps, quand cette synergie aura eu lieu, quand chaque établissement membre d'un GHT ne pensera plus son avenir entre ses quatre murs mais en coopération dans son territoire, il serait logique et souhaitable que les GHT s'ouvrent au secteur privé dans toutes ses composantes : cliniques et tous établissements, et aussi médecine de ville. Ainsi construira-t-on le projet médical de territoire avec toutes les forces de santé qui y sont présentes.
Actuellement, 90 % des urgences sont assurées par les établissements publics. Y a-t-il trop de services d'urgence en certains lieux ? Peut-être, et il faut s'interroger sur la carte de ces services. Au nombre de nos propositions figure celle de permettre aux hôpitaux d'accueillir dans les locaux hospitaliers, à proximité des urgences, un exercice libéral. Ainsi des médecins de ville pourraient-ils, tous en gardant leur mode de rémunération habituel, venir exercer en lien avec les urgences. Je connais au moins un exemple de ce type, à Fontainebleau, où une maison de santé universitaire travaille en liaison avec les urgences ; il y en a d'autres.
Le plan santé suscite de grands espoirs, car le précédent quinquennat a fait beaucoup perdre à notre système de santé en éludant les réformes nécessaires, qu'il s'agisse de celle du financement, de la lutte contre les actes inutiles ou encore de la permanence des soins. Qui doit participer à celle-ci ? Doit-elle reposer uniquement sur l'offre publique ? Il faut rendre grâce au gouvernement actuel d'aborder les questions de fond qui ne l'ont pas été, et nous attendons maintenant des annonces plus précises. La situation se tend dans les hôpitaux. Le Président de la République a dit qu'il n'y aurait pas d'économies sur l'hôpital pendant son quinquennat ; dont acte. Néanmoins, en 2018, les établissements de santé devront faire un milliard d'euros d'économies. J'aurais tendance à penser que cela commence mal, mais qui sait : peut-être aurons-nous un milliard d'euros supplémentaires dans les quatre années qui restent ? En tout cas, l'équation économique reste pour l'instant très difficile. Or, derrière les chiffres, il y a la réalité des pressions dans l'activité quotidienne et dans le fonctionnement des établissements. Cela doit être pris en compte, mais il s'agit d'autre chose que des déserts médicaux et de l'accès aux soins.