Le projet de loi que nous nous apprêtons à débattre arrive au terme d'un cycle médiatique et sociétal majeur pour les femmes. Dans le sillage des nombreuses révélations qui ont jalonné l'affaire Harvey Weinstein, les femmes ont pris la parole et ont, peut-être pour la première fois, bénéficié d'une véritable écoute. Ce projet donne vie à certains des nombreux espoirs portés à la suite de ce mouvement en les inscrivant dans la loi. Il incarne à cet égard une politique volontariste plus globale du Gouvernement en matière de promotion d'une égalité réelle entre les femmes et les hommes et de lutte contre la violence faite aux femmes, politique à laquelle le groupe du Mouvement démocrate et apparentés est particulièrement attaché.
Complétant un arsenal législatif et juridique important mais encore trop lacunaire, ce texte a le mérite de cibler un type particulier de violences dont les femmes sont les premières victimes et qui les entravent dans tous les aspects de leur vie : les violences sexuelles. Là encore, de manière inédite, le projet de loi aborde l'ensemble des manifestations de ces violences, qu'elles prennent l'enfance pour cible, qu'elles se nichent au sein de l'espace public, dans les transports, sur internet avec les « raids numériques », qu'elles se traduisent par des atteintes directes ou par un harcèlement insupportable car toujours répété.
Pour enrichir cette approche, le groupe du Mouvement démocrate et apparentés se propose de compléter les dispositions relatives à la protection de l'enfance, objet des articles 1er et 2 du texte, en présentant quatre amendements qui visent à permettre la tenue d'un véritable débat sur la prescription pour certains crimes de nature sexuelle ou violente commis sur les mineurs. Si notre groupe se félicite en effet de l'allongement du délai de prescription pour les crimes sexuels commis sur les mineurs de vingt à trente ans, nous souhaiterions engager un débat de fond sur la question de la prescription pour ce type de crimes, notamment en raison de la problématique de l'amnésie traumatique, qui retarde considérablement la prise de parole des victimes. Les avancées scientifiques récentes en la matière pourraient apporter un nouvel éclairage à ce débat.
Nous souhaitons également consacrer le principe de présomption simple de contrainte morale pour un accusé auteur de violences sexuelles commises sur un mineur de quinze ans. Il s'agit ici d'inverser la charge de la preuve et de soulager le mineur en déplaçant cette charge vers le défendeur. Cette proposition garantit un équilibre entre les droits de la défense et la difficulté, que nous connaissons tous ici, à prendre la parole et à prouver de tels préjudices pour les victimes.
Il conviendrait également de renforcer les sanctions pour les atteintes sexuelles qui ont lieu dans les transports collectifs de voyageurs en en faisant une circonstance aggravante et, enfin, d'exiger des établissements abritant des activités sportives qu'ils procèdent à la déclaration de l'ensemble des éducateurs sportifs professionnels et bénévoles qui les accompagnent.
Ces propositions sont le fruit d'une réflexion menée à l'aune de l'actualité récente, qui nous a tous et toutes ici saisis d'effroi, bouleversés, mais qui doit nous interpeller quant aux failles de notre système. Je veux redire ici, au nom de l'ensemble de notre groupe, tout notre attachement à la protection de l'enfance et à la promotion des droits des femmes. Ce texte ouvre la voie d'une sanctuarisation de l'enfance, et par ailleurs vient sanctionner des pratiques, le harcèlement de rue et le cyber-harcèlement, qui sont autant d'obstacles à l'émancipation des femmes dans l'espace public.