Avec l'imprescriptibilité ne se joue pas uniquement la gravité des faits, mais également l'articulation des normes de droit les unes avec les autres.
À cet égard, un meurtre est un acte d'une violence inouïe, pour lequel il n'existe pourtant pas d'imprescriptibilité. Ouvrir la boîte de Pandore conduirait, me semble-t-il, à une forme de remise en cause des normes du droit français et du principe du droit à l'oubli. Certains peuvent le considérer comme contestable, mais il est établi que, lorsqu'on commet un crime, nous n'avons pas à en rendre compte à la société sa vie durant. En posant le principe de l'imprescriptibilité des viols, nous remettrions en cause toute la logique du droit français.
C'est pourquoi il me semble que prolonger de dix ans le délai de prescription pour les viols traduit déjà notre considération pour tout ce qui, sur le plan de la mémoire, en fait une agression spécifique, et il me paraîtrait raisonnable d'en rester là. Sans doute certaines victimes auraient-elles envie que nous allions plus loin – ce que j'entends –, mais il faut bien mesurer ce que cela représenterait pour notre droit.