Intervention de Jean-Michel Blanquer

Séance en hémicycle du jeudi 17 mai 2018 à 9h30
Engagement associatif — Présentation

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, je me félicite du débat dans l'hémicycle que cette proposition de loi nous offre aujourd'hui. Son inscription à l'ordre du jour, à l'occasion d'une niche parlementaire, est un nouveau signe de l'attachement des députés au développement de la vie associative. Nous avons déjà eu l'occasion d'avoir des échanges sur les moyens de renforcer la vie associative en France, objectif que nous partageons.

L'examen de cette proposition de loi fait suite à l'adoption à l'unanimité, le 30 novembre dernier, de la proposition de résolution relative à l'engagement associatif et à sa reconnaissance, également déposée par le groupe MODEM. Cette proposition de loi a un double objectif : encourager la prise de responsabilité associative en tenant compte des contraintes, notamment financières, qui pèsent sur les dirigeants associatifs bénévoles – c'est l'objet de l'article 1er ; inciter les jeunes à s'engager dans le monde associatif – c'est l'objet de l'article 2.

S'agissant, d'abord, de la nécessité d'encourager l'engagement associatif et notamment les parcours bénévoles, je tiens à rappeler que les associations occupent une place essentielle dans la vie collective de notre pays et le fonctionnement de notre modèle de société. Ces propos peuvent être illustrés par des chiffres bien connus : la France compte 1,3 million d'associations ; le monde associatif compte 21 millions d'adhérents ; à travers ses 12,9 % d'associations employeuses, le monde associatif représente 1,83 million d'emplois, soit 9,8 % des emplois dans le secteur privé.

Le monde associatif est donc un acteur social et économique de premier plan.

Parmi les personnes qui font vivre au quotidien le monde associatif, aux côtés des adhérents et des dirigeants associatifs, je tiens tout particulièrement à saluer l'engagement des bénévoles. Les bénévoles participent au fonctionnement et à l'animation des associations, sans aucune contrepartie financière. Ils sont 13 millions en France à consacrer leur temps, leur énergie à renforcer le lien social entre les Français, tisser des solidarités entre les territoires et faire vivre les idées, le sport, la culture ou tout simplement leur village, ce à quoi ils sont attachés.

La fonction de dirigeant bénévole exige un engagement personnel et une disponibilité importante, mais aussi des compétences dans les domaines du droit et de la comptabilité. Être dirigeant bénévole, c'est également engager sa responsabilité personnelle.

En effet, en l'état actuel du droit, la responsabilité financière du dirigeant bénévole d'une association est susceptible d'être engagée s'il a commis des fautes de gestion. Il peut être amené à supporter personnellement des dettes, y compris en cas de simple négligence, alors même que son patrimoine est bien distinct de celui de l'association, qu'il exerce cette fonction sans aucune contrepartie financière et que l'association est d'intérêt général.

Sur l'ensemble de ces questions, les jurisprudences sont contradictoires. Cette insécurité juridique est une source de préoccupation dans le milieu associatif, car elle freine le renouvellement des instances dirigeantes des associations, alors même que le nombre de bénévoles en France est en hausse constante.

C'est pourquoi le Gouvernement accueille favorablement la modification législative proposée à l'article 1er de cette proposition de loi. Cet article atténue la responsabilité financière du dirigeant associatif bénévole en cas de faute de gestion, en étendant – ce qui semble logique – l'exception de négligence prévue à l'article L. 651-2 du code de commerce aux dirigeants d'associations et en atténuant les condamnations des dirigeants bénévoles au titre de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actifs.

En un mot, cet article 1er vise à améliorer la prise en compte du statut du bénévole associatif dans les procédures de liquidation judiciaire. C'est un article que je qualifierai de pragmatique.

En second lieu, et c'est encore plus important, il faut encourager les jeunes à s'engager dans le monde associatif. Le second article de cette proposition de loi propose d'inscrire la sensibilisation à la vie associative dans le cadre de l'enseignement moral et civique. Il complète ainsi utilement les dispositions de l'article L. 312-15 du code de l'éducation qui prévoit, dans son dernier alinéa, que les collégiens et les lycéens sont incités à participer à un projet citoyen au sein d'une association d'intérêt général.

Cet article 2 rejoint les préconisations émises par le Haut Conseil à la vie associative dans son rapport, Favoriser l'engagement des jeunes à l'école, de novembre 2017, qui rappelait la nécessité de valoriser l'engagement associatif dès le plus jeune âge. Les comparaisons internationales que j'ai pu faire révèlent, en effet, que l'engagement précoce dans la vie scolaire de l'enfant s'avère être un vecteur de citoyenneté et d'épanouissement.

Le Gouvernement, que je représente aujourd'hui, accueille très favorablement cette proposition, qui s'inscrit dans la volonté du Président de la République et du Premier ministre de rapprocher en un seul ministère les politiques d'éducation formelle et informelle. Je me fais un devoir de créer cette synergie entre les enjeux du monde associatif, les enjeux de la jeunesse et ceux de l'éducation, ce qui signifie concrètement que nous devrions prolonger cette idée par des projets de nature à développer l'engagement associatif ou proto-associatif au collège et au lycée.

Ce rapprochement illustre la cohérence d'un portefeuille ministériel construit autour de deux idées : la confiance et l'émancipation. Le but de toute éducation réussie est l'émancipation de l'individu, la conquête de la liberté par l'instruction, ce qui suppose une confiance en soi et en la société. Tout commence à l'école mais se construit aussi dans le prolongement de l'école, notamment au travers de la vie associative, de la vie périscolaire.

Le temps de l'enfant ne se découpe pas en compartiments étanches. Il doit être apprécié dans sa globalité et l'engagement de l'adolescent, du jeune, est complémentaire de sa vie scolaire. Les associations sont au coeur d'une société de la confiance, de l'engagement et de l'entraide qui constitue le fondement du projet présidentiel. La France n'est pas un pays d'indifférents, un pays d'assis. C'est un pays politique qui porte des combats. C'est un pays où les altruistes et les généreux font vivre le lien social. Votre proposition de loi permet d'encourager cet altruisme.

La disposition de nos concitoyens à s'engager, notamment au sein des associations, est un trésor : elle illustre, en acte, cette confiance dans la capacité des collectifs, des individus rassemblés à surmonter les difficultés, à mener à bien leurs projets, à transformer la société dans un sens constructif. Les associations sont plus que des instruments puissants au service de projets collectifs, ce sont aussi des écoles de démocratie et de citoyenneté.

L'association est au coeur de la République, de la démocratie, de l'éducation. Les associations sont donc essentielles pour nous tous. Je remercie sincèrement le groupe MODEM et l'ensemble des députés, pour l'inscription de cette proposition de loi à l'ordre du jour et je vous invite à l'adopter largement.

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