Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, une proposition de loi visant à soutenir l'engagement associatif est toujours la bienvenue. Celle-ci vient en discussion après un premier échange que nous avons eu dans l'hémicycle sur une proposition de résolution du groupe MODEM traitant du même sujet, le 30 novembre dernier. Le groupe Nouvelle Gauche regrette néanmoins l'ambition limitée du texte qui nous est présenté, le contenu n'étant pas clairement à la hauteur des ambitions affichées dans le titre et, surtout, des attentes du monde associatif.
La rapporteure l'a elle-même très honnêtement reconnu en soulignant la portée modeste de cette proposition de loi, qui traite de deux sujets précis : la responsabilité financière susceptible d'être engagée pour un dirigeant bénévole, et la sensibilisation à l'engagement et à la vie associative dans le cadre de l'enseignement moral et civique, au collège et au lycée.
Le texte a été enrichi par l'adoption en commission d'un amendement que j'ai défendu au nom du groupe Nouvelle Gauche. Il prévoit que le Gouvernement remette, le 1er janvier 2019, un rapport sur l'opportunité d'affecter les dépôts et avoirs des comptes inactifs des associations au bénéfice du FDVA, sur le modèle de la loi Eckert du 13 juin 2014 relative aux comptes bancaires inactifs et aux contrats d'assurance-vie en déshérence.
Le Haut Conseil à la vie associative estime que 100 millions d'euros seraient potentiellement mobilisables via ce fonds pour financer les associations. Nous avions déjà voté cette disposition dans le cadre de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté en 2017. Toutefois, le Conseil constitutionnel a censuré cet article pour des raisons de forme, au motif qu'il s'agissait d'un cavalier législatif.
Malgré cette avancée qui, je l'espère, sera suivie d'effet – je parle non du rapport, que le Gouvernement nous remettra, évidemment, puisque ce sera une obligation pour lui, mais des suites législatives concrètes qui pourraient en être tirées – , le texte manque d'ambition.
Alors qu'est parue dans Le Monde, le 4 mai dernier, une tribune signée par de nombreux présidents d'associations de solidarité et de handicap, dont Louis Gallois, en vue de nous alerter sur le malaise profond et grandissant du monde associatif, qui estime ne pas être reconnu comme un interlocuteur majeur, et après l'excellent rapport de nos collègues de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, Marie-George Buffet et Pierre-Alain Raphan, sur les contrats aidés dans le secteur sportif et culturel, qui montre l'inadéquation des parcours emploi compétences, en particulier pour les associations moyennes, on aurait pu imaginer un droit de suite parlementaire à travers un certain nombre de pistes de correction permettant de bâtir des dispositifs financiers pérennes et spécifiques de soutien à l'emploi associatif.
Avec les parcours emploi compétences, les associations moyennes sont frappées d'une triple peine : elles subissent de plein fouet la réduction drastique et brutale du nombre de contrats aidés, passés de 460 000 en 2016 à 200 000 en 2018, réduction qui se poursuivra d'après les prévisions du Gouvernement ; elles sont moins bien financées – si elles utilisent les contrats parcours emploi compétences, les subventions de l'État passeront de 75 %, voire 90 %, à 50 % en moyenne ; elles sont soumises à des obligations de formation, de suivi et de tutorat pour les bénéficiaires beaucoup plus contraignantes, qui ont pour la plupart d'entre elles un effet dissuasif.
Je souhaite rappeler à nos collègues que le bilan qui a été dressé des parcours emploi compétences en février dernier s'élève à 932 parcours signés au plan national, contre plus de 18 000 à la même période en 2017. Dans le département de la Loire, un peu plus de 200 contrats ont été signés au mois de mai, sur 2 200 possibles et budgétisés pour l'ensemble de l'année 2018. Ainsi, moins de 10 % de l'enveloppe ont été consommés. Pour rappel, la Loire disposait de 5 000 contrats aidés en 2016.
Chacun peut constater dans son territoire que la formule parcours emploi compétences ne fonctionne pas sur le terrain ; il faudra donc très vite en corriger les effets néfastes. Pour de nombreux clubs sportifs, ces restrictions financières sur les contrats aidés s'ajoutent à la baisse de 30 % des crédits de la part territoriale du Centre national de développement du sport – CNDS – pour le financement de leur fonctionnement, de leurs équipements ou de la formation des bénévoles.
Aujourd'hui, force est de constater que la confiance est abîmée, en particulier avec ces associations moyennes, dont l'activité repose certes sur un fort noyau de bénévoles, mais aussi, bien souvent, sur des contrats aidés et des aides financières spécifiques. Monsieur le ministre, le chantier du soutien à la vie associative est un angle mort de la politique gouvernementale. Les groupes de travail succèdent aux rapports, mais les décisions indispensables ne sont pas au rendez-vous. Pire, les annonces depuis le début du quinquennat sont, la plupart du temps, défavorables aux associations.
S'agissant de l'article 1er, madame la rapporteure, nous aurions souhaité avoir une étude d'impact sur la nécessité de légiférer. Il aurait été intéressant de disposer du nombre des condamnations effectives de dirigeants bénévoles associatifs au titre de l'engagement de la responsabilité financière.
Si l'engagement de la responsabilité financière est sans doute un frein pour les bénévoles responsables, présidents ou trésoriers, ce frein est-il majeur ? Il vaudrait mieux aujourd'hui conforter, après évaluation, les dispositifs d'incitation et de reconnaissance du bénévolat existants. Je pense aux différents dispositifs de valorisation de l'engagement que nous avons votés dans la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté ou dans d'autres lois, comme la valorisation des acquis de l'expérience, en particulier dans l'enseignement supérieur. Or il semble que les universités tardent à se doter des procédures de validation interne pour les étudiants. Il conviendrait donc d'accélérer le mouvement.
Je tiens également à évoquer le congé d'engagement associatif, qui entre en vigueur progressivement au cours de l'année 2018, et qui permet, désormais, à tous les salariés de bénéficier de six jours de congé par an, éventuellement rémunérés si un accord d'entreprise a été signé en ce sens. Où en est-on ? Comment pourrait-on améliorer l'information sur ce dispositif mal connu des bénévoles concernés ?
De même, le compte d'engagement citoyen, en vigueur depuis le 1er janvier 2017, permet à tous les bénévoles justifiant de 200 heures d'engagement dans leur association de bénéficier de vingt heures de formation.
S'agissant du financement de la formation des bénévoles par le Fonds pour le développement de la vie associative, je regrette que, contrairement à vos engagements initiaux, monsieur le ministre, les parlementaires ne siègent pas dans les commissions territoriales chargées de la répartition d'une partie de l'ex-réserve parlementaire. Cette carence, que nous pouvons déplorer collectivement, fera peut-être l'objet d'autres interventions ce matin.