Intervention de Caroline Janvier

Séance en hémicycle du jeudi 17 mai 2018 à 15h00
Prestation de compensation du handicap — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Janvier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui la proposition de loi de notre collègue Philippe Berta visant à améliorer la prestation de compensation du handicap, en supprimant la limite d'âge pour son accès et en menant une expérimentation afin de réduire le reste à charge des bénéficiaires de la PCH.

Ce texte apporte une avancée certaine, qui représente, pour son article 1er, un investissement de 69 millions d'euros par an pour 8 700 bénéficiaires potentiels et met fin à une situation qui causait une véritable rupture d'égalité entre les individus. Les seuils, véritables barrières d'âge, sont en effet particulièrement injustes et inadaptés à la société d'aujourd'hui.

Ils sont injustes, en effet, car, au-delà de soixante ans, il n'est plus possible de demander à bénéficier de la PCH, exception faite d'un certain nombre de critères à la fois complexes et trop nombreux. Ce système a été dénoncé par de nombreuses associations représentatives des personnes handicapées, pas seulement pour la PCH mais aussi pour les personnes sollicitant l'allocation personnalisée d'autonomie, qui souffrent de la même rupture d'égalité du fait de ces seuils d'âge.

Ceux-ci sont inadaptés à la société d'aujourd'hui, car des travaux mettent en évidence que l'augmentation tendancielle de l'espérance de vie moyenne des personnes handicapées est plus importante que celle de la population française dans son ensemble.

Le vieillissement des personnes handicapées, à l'instar de celui du reste de la population, est un phénomène durable. Les chiffres clés de l'aide à l'autonomie publiés en 2016 par la CNSA montrent en effet un gain de plus de deux ans pour les femmes et les hommes bénéficiant de l'aide à l'autonomie entre 2000 et 2013.

Le secteur médico-social a, depuis des années, pris conscience du phénomène : l'enquête Établissements sociaux de 2010 de la DREES montre ainsi que la part des personnes âgées de cinquante ans et plus accueillies dans les établissements médico-sociaux s'est accrue entre 2006 et 2010.

Il faut, mes chers collègues, que nous comprenions véritablement le caractère universel du handicap. Je ne parle pas ici, même s'il faudrait que la question soit abordée, de l'accessibilité universelle des bâtiments et de l'espace urbain, des services administratifs ou du numérique. Non, je parle de la nature intrinsèque du handicap. Ce phénomène peut nous toucher, vous, moi et chacun de nos concitoyens, de manière plus ou moins durable.

La France enregistre chaque année la naissance de 15 000 enfants handicapés, soit environ 2 % des naissances. Le vieillissement de la population et l'apparition de nouvelles maladies imposent à la société de trouver de nouvelles réponses pour inclure toute personne, quel que soit son âge ou son handicap, et la soutenir lorsqu'elle n'a plus d'autre choix que de solliciter une aide de notre collectivité.

Il est ainsi de notre responsabilité collective de penser cette société inclusive, dont le concept est aujourd'hui largement démocratisé mais qui recouvre néanmoins des réalités concrètes. Que ce soit à la suite d'un accident de la vie, en raison des effets du vieillissement – comme la baisse de capacités fonctionnelles pouvant déjà être altérées du fait d'un handicap – , ou encore une conséquence de l'apparition d'une maladie liée à l'âge – maladie neurodégénérative, métabolique, pouvant aggraver des altérations déjà prégnantes ou en occasionner de nouvelles – , les besoins des personnes handicapées évoluent et s'intensifient. Souvent, si un handicap n'est pas synonyme de perte totale d'autonomie pour une personne, c'est grâce à un proche aidant – le conjoint ou un membre de la famille.

Le rapport de l'IGAS – inspection générale des affaires sociales – de novembre 2016 sur l'évolution de la prestation de compensation du handicap démontre que cette barrière pénalise ceux qui n'avaient pas jugé utile de demander la PCH avant leurs soixante-quinze ans mais qui se retrouvent, au-delà, en difficulté en raison d'un changement survenu dans leur environnement, comme le vieillissement ou le décès du conjoint grâce auquel ils bénéficiaient d'une aide humaine indispensable.

Cette avancée consentie par le Gouvernement et notre majorité est un pas supplémentaire, que nous voterons sans hésiter, car c'est aussi une avancée vers l'appréhension du parcours de la personne handicapée tout au long de sa vie. Mais nous devons, mes chers collègues, prendre date pour honorer l'engagement du Président de la République concernant la construction d'un plan transversal et structurel de prise en charge de la dépendance.

Reconnaissance de l'aidant, amélioration des solutions de maintien à domicile, fin des seuils pour l'ensemble des aides et notamment celles qui pallient le vieillissement de la population et des personnes handicapées : les chantiers sont nombreux. Les objectifs étant partagés sur l'ensemble des bancs de cette assemblée, nous y parviendrons, je n'en doute pas.

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