Intervention de Nicolas Hulot

Réunion du jeudi 12 avril 2018 à 14h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

Sur la répartition des compétences entre les différentes autorités, le Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère et l'ASN, je vous livre mes convictions – pas forcément des certitudes, je suis ouvert à des contre-arguments. Cette répartition me semble assez équilibrée en ce qu'elle permet un dialogue fructueux entre les deux institutions, chacune fortes de leur technicité et aux compétences très complémentaires. Dans le même temps, elle évite que les désaccords inévitables du fait des contraintes différentes pesant sur la sécurité et la sûreté soient occultés du débat, ce qui serait le cas si les deux responsabilités étaient confondues dans une même autorité. Dans ce domaine comme dans d'autres, il me semble que la biodiversité des acteurs est importante et même enrichissante.

Par ailleurs, cette répartition de compétences permet à l'autorité de sûreté de développer une culture de transparence totale, ce qui contribue à fortement asseoir la confiance du public dans notre dispositif de sûreté. Dès lors qu'elle aurait à s'occuper des questions de sécurité, une partie de son action par voie de conséquence devrait être classifiée et donc soustraite au champ de cette transparence, ce qui brouillerait son image.

Les comparaisons internationales ne font pas apparaître de corrélation entre le niveau de sûreté des installations et la séparation des fonctions de contrôle de la sécurité et de la sûreté. Ainsi, dans le rapport que nous a remis le 23 mars dernier la mission IPPAS (International Physical Protection Advisory Service) envoyée par l'AIEA à la demande du Gouvernement français, aucune recommandation n'a été formulée suite à l'examen assez attentif de la gouvernance de notre système de sécurité nucléaire.

Dans le domaine de la sécurité passive, les systèmes passifs sont tout à fait efficaces en matière de sûreté. Leur rôle est de prévenir ou de réduire les conséquences d'accidents dont l'origine se trouve dans un événement aléatoire, mais qui exclut l'action d'un agent intelligent.

En matière de sécurité, nous sommes au contraire confrontés à des attaques qui sont le fait d'agents intelligents, qui connaissent en partie les obstacles qui leur sont opposés, qui ont eu accès à un certain nombre d'informations et qui sont donc suffisamment malins pour tenter de les contourner. Dans ces conditions, les protections passives sont beaucoup moins efficaces. Elles sont longues à mettre en place ou à modifier, il est difficile de les adapter à l'évolution de la menace et on finit toujours par les contourner ; c'est ce que disent les « spécialistes » de la sécurité ; je n'en suis pas un. Quelle que soit la hauteur du mur que vous pouvez ériger, ils considèrent qu'y aura toujours quelqu'un pour inventer une échelle physique ou aérienne pour le franchir. C'est pourquoi, du point de vue des spécialistes, la sécurité de nos installations nucléaires repose sur une conception qui privilégie le rôle des protections actives, les protections passives n'étant là que pour venir en appoint, elles ne sont pas les plus performantes. Confier à une autorité de contrôle la protection passive alors qu'une autre aurait dans son domaine de compétence les questions de protection active semble contre-productif.

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