Intervention de Mathilde Panot

Réunion du jeudi 12 avril 2018 à 14h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

J'ai trois questions à vous poser. Je suis favorable à une sortie du nucléaire, ce qui n'empêche pas de se préoccuper des questions de sûreté et de sécurité. Mais l'énergie nucléaire est en soi, du fait de la matière utilisée, une énergie dangereuse et le risque zéro n'existe pas.

En réponse à la rapporteure sur l'EPR, vous avez dit votre confiance en l'ASN, que je ne remets pas en question, mais en comparaison des centrales ou des réacteurs qui ont été arrêtés, les enjeux financiers pour l'EPR sont bien plus élevés, notamment à l'international. Cela ajoute une pression supplémentaire sur cette question ; sans être un expert ou remettre en cause la parole de l'ASN, on a du mal à comprendre, au vu de la mauvaise qualité de l'acier, que le couvercle devra être changé dans six années, mais pas la cuve…

La question qui se pose est celle des falsifications commises à Creusot-Forge. Qu'est-ce qui a changé dans le système depuis ces falsifications ? Il est tout de même inquiétant que de telles falsifications aient pu durer tant d'années. Certains parmi nous ont souri lorsque la rapporteure remarquait que les experts venaient des mêmes écoles – pas vous, monsieur le ministre – mais c'est une question légitime pour évaluer ce qui a changé afin que de telles choses n'arrivent plus. D'autant plus que toutes les pièces n'ont pas pu être vérifiées, ce qui est normal compte tenu de leur très grand nombre : et donc, personne ne peut dire, sur le parc des installations nucléaires, où sont les pièces défectueuses et les falsifications.

Vous avez dit que l'incursion de Greenpeace ne valait pas démonstration, et vous avez parlé du tir à vue si ce n'étaient pas des militants Greenpeace. J'entends votre remarque, mais Greenpeace ne met pas seulement en cause la sécurité nucléaire par de telles incursions. Les stations de pompage ne sont pas toujours dans l'enceinte des centrales nucléaires et peuvent constituer des cibles stratégiques ; le transport de plutonium s'effectue avec une régularité telle que des militants, dont le but n'était que l'observation, sont parvenus à doubler plusieurs fois les camions et à se positionner sur le trajet des convois… Lorsque nous avons posé des questions sur ces points, il nous a été répondu que l'on pensait que le nécessaire était fait et que les moyens étaient assurés. Cette réponse n'est pas satisfaisante.

Troisième question : en cas d'accident nucléaire grave, EDF devrait aujourd'hui verser 700 millions d'euros. Or l'IRSN estime qu'un accident grave représente un coût de 430 milliards d'euros et l'ancien Premier ministre japonais disait qu'ils en étaient déjà à 230 milliards sur l'accident de Fukushima. La part de l'exploitant en cas d'accident est donc une question intéressante, pour savoir aussi ce qu'il en est au juste de sa responsabilité.

Je terminerai en vous lisant un extrait de ce poème de Prévert :

« Tout s'en allait

« La ville s'écroulait grouillait s'émiettait en tournant sur elle-même

« sans même avoir l'air de bouger

 « Dans les coulisses du progrès

« des hommes intègres poursuivaient intégralement la désintégration progressive de la matière vivante désemparée. »

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