Intervention de Antoine Herth

Séance en hémicycle du vendredi 25 mai 2018 à 15h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Après l'article 10 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAntoine Herth :

Je voudrais revenir sur les propos de M. le ministre et de M. le rapporteur pour que l'on comprenne bien les enjeux. Monsieur le ministre, j'ai bien noté votre réponse au président Riester : les contrôles ex ante sur les coopérations entre centrales d'achat sont exclus, car ils ne seraient pas conformes au droit européen. Cependant, votre raisonnement présente un point faible, comme vous en conviendrez certainement. En effet, vous avez affirmé que ce type d'accord constituait une mise en commun, une coopération bénéficiant à la fonction d'achat. Or, dans la distribution, cette fonction représente la moitié de l'activité : le coeur de métier d'un distributeur est d'acheter et de revendre. Ces accords s'apparentent donc à une fusion. Quand vous construisez des avions, il peut arriver que vous fusionniez avec un ancien concurrent pour construire de nouveaux modèles, optimiser, mettre en réseau vos usines. On comprend très bien, dans l'industrie, quels contrôles sont nécessaires pour éviter des positions dominantes. Mais le cadre général de la loi est en décalage avec les réalités de la distribution, dont le coeur de métier consiste à acheter et à vendre.

S'agissant du droit international, j'ai écouté attentivement le rapporteur et j'ai la faiblesse de croire que, en effet, le droit que nous écrivons s'appliquera, dans certaines conditions, aux centrales situées à l'étranger. Mais, dans le cadre de leurs négociations, si les deux parties conviennent, l'une ayant peut-être le bras tordu, de se soumettre au droit belge, ou au droit d'un autre pays, européen ou non – les achats se font aussi en ligne, et il semblerait qu'Amazon veuille entrer sur le marché – , quel cadre législatif s'appliquera in fine ?

Monsieur le ministre, ne faut-il pas que nous allions un peu plus loin, à l'extrême limite de ce qu'il est possible de faire aujourd'hui dans le cadre du droit national, et que nous agissions au plus vite, au niveau européen, en concertation avec les vingt-sept États membres de l'Union, pour nous protéger d'une dérive susceptible de nous soumettre, demain, à un droit extra-européen, tel le droit américain ? Nous avons déjà connu cela par le passé sur d'autres sujets. Deux questions essentielles se posent donc : le droit est-il adapté et applicable à une fonction de distribution qui est en réalité essentiellement de l'achat, et sommes-nous bien sûrs que le cadre législatif que nous écrivons sera efficace ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.