Intervention de Adrien Quatennens

Réunion du mercredi 23 mai 2018 à 16h15
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAdrien Quatennens :

Madame la ministre, l'été dernier, vous défendiez avec conviction votre projet de déconstruction méthodique du code du travail. Selon vous, l'Accord national interprofessionnel de 2013, les lois Rebsamen et Macron de 2015, la loi El Khomri de 2016 n'étaient pas allées assez loin : il fallait déréguler davantage encore le marché du travail. Il vous paraissait urgent de pousser le curseur encore plus loin, fragilisant toujours plus les salariés, affaiblissant les syndicats et défaisant les lois sociales de notre pays. Vous avez mené votre réforme tambour battant, par ordonnances. Privant le Parlement de ses prérogatives, vous avez fait de notre assemblée une simple chambre d'enregistrement en vous reposant sur une majorité qui fait bloc contre l'opposition, même quand elle peut lui concéder raison. Votre méthode de concertation avec les partenaires sociaux s'apparente à un bel exercice de communication. Les mesures que vous avez prises ont rendu plus précaire le CDI, ont conduit à la suppression des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), ont réduit les moyens de l'inspection du travail, renforcé le monologue patronal, malgré vos promesses de dialogue social, et raréfié les négociations portant sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. À cette heure, de nombreux salariés du privé subissent directement les conséquences de votre politique.

Je dois cependant vous reconnaître une constance idéologique. Favorable à ce que vous appelez la « flexisécurité », vous avez justifié vos ordonnances de dérégulation en tentant de faire croire qu'elles permettraient la relance de l'emploi dans notre pays – « libérer les énergies », disiez-vous. Pourtant, votre politique de flexibilisation est manifestement un échec puisque, un an après l'élection de la majorité, et malgré des statistiques qui ne comptabilisent pas les demandeurs d'emploi en formation, le chômage repart à la hausse et atteint désormais 9,2 %, voire 19,6 % si l'on tient compte du « mal-emploi ».

Nous pensions que vous aviez achevé ce mouvement de flexibilisation du marché du travail, mais vous nous réserviez encore de bien mauvaises surprises. Désormais, vous voulez renforcer le contrôle des chômeurs et les obliger à remplir un journal de bord. Les offres considérées comme raisonnables et ne pouvant être refusées seraient désormais définies de manière variable d'un demandeur d'emploi à l'autre et aux dépens de toute considération d'égalité de traitement. Vous trahissez une promesse de campagne du candidat Macron en refusant d'indemniser les indépendants. Quant à l'indemnisation des démissionnaires, elle est si restrictive que 40 000 personnes seulement seront concernées, au lieu de plusieurs centaines de milliers, comme vous l'aviez promis. Vous laissez aux branches professionnelles le soin de définir les formations dispensées dans le cadre de l'apprentissage et, ce faisant, vous les soumettez – c'est un risque – aux besoins immédiats, sans préparer les réponses aux défis futurs.

La question que je vous pose au nom du groupe France Insoumise est simple, madame la ministre : où sont les mesures de sécurisation du parcours des actifs ? Où sont les résultats des promesses que vous avez formulées devant les Français et devant la représentation nationale ?

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