Intervention de Michel-Edouard Leclerc

Réunion du mercredi 16 mai 2018 à 17h30
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Michel-Edouard Leclerc, président-directeur général du groupe E. Leclerc SC GALEC :

Vous comprenez que quand on a été défaillant, on ne peut pas donner des leçons aux autres. Je préfère donc, même face à une question fermée, faire des réponses ouvertes et constructives.

S'agissant de l'administration, elle est centralisée quand elle contrôle, mais régionale quand elle conseille ou suit les dossiers, comme nous-mêmes d'ailleurs. S'il y a quelque chose à construire aujourd'hui, c'est au niveau national, avec les grandes enseignes, quitte à préciser les domaines de responsabilité des mandants – je préférerais que ce soient les entreprises ou les réseaux d'entreprises. Il faut qu'il y ait au niveau national des comités de crise associant l'administration et les enseignes, le plus tôt possible. Cela pose peut-être des problèmes de déontologie, que l'on peut résoudre, mais l'affaire aurait mérité un pilotage commun au niveau national, en croisant les données plutôt qu'en laissant chacun les faire remonter. Il en va de même pour la gestion de crise terroriste. Il manque un lieu où les principaux opérateurs pourraient se retrouver, partager leur expérience, et, pour l'administration, lancer des alertes, tester l'organisation. Les produits qu'on a rappelés auraient pu aussi contenir du poison. À l'égard de l'administration, je préconise donc un travail coordonné au niveau national, assumant mieux la gestion de crise que ce n'a été le cas.

S'agissant des fournisseurs, nous avons aussi nos propres marques de distributeurs, et nous avons aussi connu des crises, comme la contrefaçon de l'insecticide Fipronil, la crise de la viande de cheval – là, nous n'étions pas concernés, mais cela nous a donné à penser. Nous avons donc décidé d'augmenter les budgets pour l'autocontrôle. Passer de deux pour mille à quatre pour mille ne va pas sécuriser toute la chaîne, mais si chaque transformateur, chaque distributeur, chaque restaurateur contribue à une banque de données, on obtient des indicateurs d'alerte intéressants. Multipliant les autocontrôles, nous allons aussi l'exiger de nos fournisseurs. Il faut voir le cadre juridique, mais pour un fournisseur à marque de distributeur, c'est assez facile puisque nous le ferons figurer dans le cahier des charges. En revanche, dans les négociations commerciales, qu'il s'agisse de Lactalis ou de n'importe quelle marque industrielle, il faudrait instaurer un cahier des charges sur la sécurité, les garanties, les engagements du fournisseur, qui pourrait reporter ces exigences sur son propre fournisseur de matières premières ; or celui-ci n'existe pas, à ma connaissance, chez nos collègues de la distribution, ni dans le service public ou la restauration. Je ne voudrais pas que l'Association nationale de l'industrie alimentaire, qui est assez prompte à la polémique, interprète mal mes propos, mais l'introduction de systèmes collectifs de sécurité réduirait les facteurs aléatoires, la « faute à pas de chance » comme vous le disiez, chacun renforçant ses autocontrôles et exigeant de la filière amont le même type de comportement.

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