Intervention de François Asselin

Réunion du mardi 22 mai 2018 à 17h00
Commission des affaires sociales

François Asselin, président de la CPME :

On reproche souvent aux partenaires sociaux d'être lents. À ce sujet, nous nous étions montrés rapides ! Las, l'accord ne convient pas au Gouvernement, qui avait pourtant fourni la feuille de route… Certes, j'ai dû me faire expliquer son contenu, passablement compliqué. Mais le fond et l'esprit de cet accord allaient dans la bonne direction. Espérons que l'examen par le Parlement permettra de corriger ce qui doit l'être, notamment sur la question de la coconstruction.

Par ailleurs, pourquoi ceux qui en ont le plus besoin sont-ils ceux qui bénéficient le moins du compte personnel de formation (CPF) ? D'abord Beaucoup ne savent pas quoi en faire. Dans les petites entreprises, c'est généralement le responsable direct des salariés, ou le chef d'entreprise, qui est le mieux habilité à leur en parler. On peut prôner l'individualisation du compte de formation : en réalité, ce droit n'est actif que s'il y a un chef d'entreprise moteur pour le mettre en oeuvre.

Peut-être suis-je inquiet pour rien. En tout cas, nous avons bien sûr envie que la réforme fonctionne. Aujourd'hui, je ne reçois, en menuiserie ou en charpente, qu'un CV de salarié qualifié par an ! Si je ne recrutais pas en apprentissage et en alternance depuis l'origine de l'entreprise, mon entreprise ne tournerait pas aujourd'hui. Car je vends la compétence de mes salariés. L'alternance est donc incontournable pour les petites entreprises, nous en avons absolument besoin. Ce dont nous souffrons le plus, c'est de ne pas trouver les candidats que nous serions susceptibles d'employer.

N'oublions pas toutefois que le regard sur l'apprentissage varie en fonction de l'activité de l'entreprise et qu'il est difficile d'effectuer un apprentissage dans un secteur où l'activité est basse.

Oui, il faudra être très attentif à la période de transition. Nous – CFA, régions, entrepreneurs – sommes tous inquiets à ce sujet.

Il est intéressant de savoir que les frais de gestion des OPCA représentent 17 % des sommes collectées ! Sur cette base, il est possible d'amorcer une correction en fixant des objectifs. Avec le collecteur, je crains que cette information ne se perde… Quoi qu'il en soit, il faudra bien que quelqu'un fasse ce que font les OPCA : ingénierie de formation, accompagnement des branches, voire des entreprises qui établissent un plan de formation.

Il faudra aussi que les opérateurs de compétences retrouvent leur périmètre d'intervention. Nous devrons leur en donner les moyens, en fixant un cadre, par exemple par le biais d'un contrat d'objectifs. De cette manière, nous éviterons de multiplier les couches intermédiaires, qui pompent de la taxe d'apprentissage et de la taxe sur la formation continue, pourtant considérées comme des investissements, tant par les salariés que par les entreprises.

Il est ainsi essentiel de se demander comment rendre les opérateurs de compétences performants. J'ai toutefois peur qu'en perdant les données radars en ce domaine, nous ne visions au mauvais endroit.

Moi qui suis affilié au régime social des indépendants, je peux vous dire que nous n'étions pas demandeurs du bénéfice de l'assurance-chômage. En effet, comment objectiver l'assurance-chômage lorsqu'on est indépendant ? Certes, vous pouvez cesser votre activité parce que vous avez fait faillite, mais il est plus difficile d'octroyer des indemnités de chômage à des indépendants qui interrompraient leur activité pour se tourner vers une autre. Prévoir un matelas pour que l'indépendant déclaré en faillite puisse, à la sortie du tribunal de commerce, retirer de l'argent au distributeur et nourrir sa famille, ce n'est peut-être pas idiot. Au-delà, fonder l'assurance chômage sur la solidarité relève d'un choix politique.

Les ressources de la CSG seront sollicitées pour financer cette démarche, il semble donc normal que nos représentants soient autour de la table de négociation. Mais vous ne pourrez pas nous demander, à nous partenaires sociaux, d'assumer des décisions qui ne sont pas les nôtres. Il faudra plutôt redéfinir le rôle de chacun, en nous indiquant quel est notre périmètre d'intervention ou de responsabilité. Et si l'État décide de dépenses dont nous n'avons pas vraiment discuté, alors nous ne serons plus vraiment des partenaires et c'est un autre rôle qui nous sera imparti.

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