Intervention de Caroline Fiat

Réunion du mardi 22 mai 2018 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Fiat :

Le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel soutient l'idée que les entreprises doivent pouvoir ouvrir leur propre CFA. Pour notre part, nous souhaitons vous alerter sur le net recul que cela pourrait entraîner non seulement pour les jeunes apprentis et leur avenir mais aussi pour l'économie française à long terme. Que l'apprentissage soit délivré par l'entreprise peut attirer des entreprises à la recherche des qualités en parfaite adéquation avec leurs besoins. Toutefois, modeler l'apprenti selon les désirs d'une seule et même firme n'offre un avantage qu'à court terme. Le lien de subordination d'un apprenti à son employeur est déjà très puissant ; avec de telles pratiques, il ne pourra être renforcé puisque le jeune de seize ans, parfois quinze, ne pourra plus se tourner vers un tuteur extérieur à l'entreprise pour recevoir des conseils.

Un apprenti qui manque de savoir théorique et ne connaît que les conditions de travail d'une seule entreprise peut difficilement rebondir en cas de licenciement et se trouve d'autant plus dépendant de son employeur. Pour notre part, nous considérons donc qu'un jeune, tant qu'il ne connaît pas ses droits, tant qu'il n'a pas reçu une formation de qualité qui l'ouvre sur le monde et lui permet de s'émanciper, ne doit pas être livré seul à un employeur dont l'objectif premier est la rentabilité. Les fonds pour l'apprentissage doivent être garants de cet accompagnement des jeunes dans l'emploi. Des employeurs attentifs et consciencieux, cela ne manque pas, mais en tant que législateurs nous devons également prendre en compte les cas d'employeurs qui n'ont aucun égard envers leurs employés.

Enfin, qu'adviendra-t-il à long terme si les apprentis ont des certifications circonscrites à une seule entreprise ? C'est toute l'économie française qui en pâtira, car la capacité des employés à rebondir assure sa bonne santé à notre économie. C'est cette capacité à rebondir, à s'adapter aux changements nécessaires qu'il faut encourager. Seule l'éducation nationale, garante de la qualité des diplômes à l'échelle nationale, est capable d'y répondre. Reconnaissez-vous, les uns et les autres, les écueils que comporte cette proposition de CFA d'entreprise ?

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