Monsieur le président Lagarde, la France est confrontée à une menace durable, endogène, diffuse et élevée – nous le savons, et François Molins, qui exerce avec brio des responsabilités éminentes dans la lutte contre le terrorisme et la répression de celui-ci, le sait mieux que quiconque. À l'occasion d'un entretien télévisé, il a effectivement indiqué – ce qui est la réalité – qu'après exécution de leur peine, un certain nombre de détenus recouvreront la liberté, en application du droit et des termes de la condamnation dont ils ont fait l'objet. Vous en avez donné les ordres de grandeur : sur environ 70 000 détenus, 1 500 ou 1 600 font l'objet d'un suivi pour radicalisation ; 500 ont été condamnés ou sont poursuivis pour des faits liés au terrorisme ; une vingtaine d'individus environ seront libérés au cours de l'année 2018 et une vingtaine d'autres au cours de l'année 2019.
Premier élément de réponse à votre question : par deux lois, respectivement de juin et juillet 2016, les conditions d'exécution des peines et de libération conditionnelle ont été durcies et renforcées, adaptées à la spécificité terroriste.
Par ailleurs, des procédures, sur lesquelles je ne m'étendrai pas, ont été mises en place pour que les services du renseignement pénitentiaire et l'ensemble des services intéressés – préfectures, gendarmerie et police nationale – puissent assurer un suivi particulier des individus qui entrent dans ces catégories et sont, le moment venu, remis en liberté.
Pour ce qui est des mineurs – car il existe des mineurs détenus ou, du moins, suivis pour des faits comparables – , un dispositif spécifique d'accompagnement permanent a été mis en place.
Avec le renforcement très net des moyens opérationnels mis à la disposition des services de police, de gendarmerie et de la DGSI – la direction générale de la sécurité intérieure – , dans le cadre de l'augmentation des effectifs que l'Assemblée nationale et le Sénat ont votée, ce dispositif nous permet de mettre en place un suivi effectif des personnes se trouvant dans la situation que vous indiquez. C'est un suivi extrêmement attentif, respectueux de la loi, bien entendu, mais dénué de naïveté, qu'il faut mettre en oeuvre et pour lequel l'ensemble des services de l'État se sont organisés.
Vous appelez de vos voeux, monsieur le député, une meilleure coordination ou de meilleurs échanges d'informations entre les services de l'État et les maires. Vous savez comme moi, et pour les mêmes raisons que moi, que, lorsque l'État et une municipalité entretiennent de bonnes relations, lorsque leurs échanges sont fluides, cela peut apporter un plus très net en matière de sécurité. Le procureur Molins a lui-même indiqué qu'il jugeait nécessaire d'aller encore au-delà dans la qualité et l'intensité des relations entre les services de l'État et les maires.
Je crois qu'il a raison, mais vous savez comme moi, monsieur le député, que cet échange d'informations est très compliqué à mettre en oeuvre. Il exige une confiance, qui ne se décrète pas, et une volonté telle que certains élus ont dit – et je le respecte – qu'ils ne souhaitaient pas s'inscrire dans cette logique, car ils ne sauraient pas forcément quoi faire des informations susceptibles d'être échangées.
Il faut donc « protocoliser » – pardon pour ce terme – , organiser de la meilleure façon possible la relation entre les maires, qui jouent un rôle éminent en matière de sécurité et ont accès à certaines informations, et les services de l'État. Nous y sommes prêts mais je sais – et je ne veux pas en cacher la difficulté – que cet exercice est redoutablement délicat et exigera des discussions longues avec chacun de maires concernés.