Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame et monsieur les rapporteurs de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, madame la rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration de la République, mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur de présenter devant vous ce projet de loi dont la vocation première est de mettre en mouvement une démarche globale de simplification dans le domaine du logement, de l'aménagement et du numérique. Oui, je considère, avec le secrétaire d'État Julien Denormandie, que c'est une innovation de construire une loi qui n'ajoute pas de contraintes supplémentaires mais qui, de manière pragmatique, libère et facilite. La première caractéristique de ce texte, par rapport à tous ses prédécesseurs, est qu'il n'ajoute pas de normes ou de contraintes supplémentaires. Simplifier était pour nous un objectif fondamental.
Il ne s'agit pourtant aucunement de remettre en cause les fondements de notre droit dans ces secteurs, fondements qui résultent de l'oeuvre de majorités successives, mais au contraire de faciliter et même d'accélérer l'action de ceux qui construisent, rénovent, aménagent – je pense aux collectivités locales, aux bailleurs, aux promoteurs, aux entreprises – pour apporter ce qui est, je n'en doute pas, notre objectif commun : le meilleur service possible à nos concitoyens.
Or, comme le sait tout élu, que son expérience soit déjà ancienne ou qu'il ait récemment entamé son mandat, rien n'est plus compliqué que de simplifier. Chaque article, chaque paragraphe, de nature législative ou réglementaire, est défendu par ses gardes du corps, argumentaires à l'appui. Pourtant, les évolutions sociétales et technologiques imposent que la loi bouge, qu'elle anticipe, si possible, et qu'elle réserve sur le terrain une souplesse d'utilisation. Pour avoir suivi pendant neuf ans en tant que sénateur – y compris en tant que président de groupe – , l'évolution des précédentes lois sur le logement, soit pour y contribuer, soit pour m'y opposer, je me suis rendu compte qu'à chaque fois, d'une manière ou d'une autre, on complexifiait encore un peu le système, que lorsque l'on ajoutait une disposition, on oubliait toujours d'en enlever une autre. De ce fait, le magnifique code de l'urbanisme, dont vous voyez un exemplaire sur le banc des ministres, contient désormais plus de 2 000 pages… En définitive, ces textes qui, souvent, s'accumulent, s'empilent, au point d'apparaître parfois contradictoires entre eux, causent les pires difficultés à leurs utilisateurs, qu'il s'agisse de collectivités, de praticiens du droit ou de simples citoyens. Cela fait trop longtemps, mesdames, messieurs les députés, que l'accumulation de textes et leur foisonnement incontrôlé freinent les énergies, quand elles ne les découragent pas.
Les élus locaux qui ont des fonctions exécutives connaissent la lourdeur de la réalisation des documents d'urbanisme. Ayant souvent eu l'occasion d'intervenir dans le cadre des dernières réformes touchant à l'aménagement du territoire, entre autres sur la loi, dite NOTRe, portant nouvelle organisation territoriale de la République, j'ai rapidement été convaincu, devant la multiplication des schémas, prescriptifs ou non, et au vu de tout ce que l'on demandait à nos collectivités, que cette tendance n'était pas la bonne, que l'on contrariait les énergies et freinait la construction. Celles et ceux qui parmi vous ont mené à bien la création d'un SCOT, d'un schéma de cohérence territoriale, me comprendront encore mieux que les autres, de même que celles et ceux dont les projets sont bloqués par d'innombrables recours – une question à laquelle ce projet de loi a pour particularité de s'attaquer fermement, tout en respectant, bien sûr, le droit au recours.
Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas de règles, et en particulier pour protéger nos concitoyens les plus fragiles – d'où, par exemple, les dispositions fortes que nous proposons pour lutter contre les marchands de sommeil, celles destinées à améliorer le respect de l'environnement, celles qui tendent à sécuriser l'acte de construire ou celles qui visent à favoriser la construction de logements pour tous, ce qui reste un des objectifs primordiaux du Gouvernement.
Ce texte s'inscrit aussi dans une stratégie globale, puisqu'il est destiné à s'articuler avec des dispositifs inscrits dans deux autres projets de loi que vous avez déjà votés ou que vous êtes en train d'examiner. Je pense à la libération du foncier avec la suppression de plus-value en zone tendue pour les propriétaires cédant leur foncier avant fin 2020, disposition incluse dans le projet de loi de finances, mais aussi au projet de loi pour un État au service d'une société de confiance – ESSOC – , qui introduit un changement considérable, le passage de la norme de moyen à la norme de résultat. Lorsque j'ai demandé au Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique – CSCEE – de mener dans les meilleurs délais une réflexion sur les moyens de simplifier le droit en éliminant un nombre important de normes, je savais que nous allions dans le bon sens. C'est en effet un changement de cap, un « changement de paradigme » comme l'on dit aujourd'hui.
Ce texte tient compte également des travaux de la « conférence de consensus ». Le président du Sénat a en effet souhaité que mon ministère travaille en coordination avec les deux assemblées, et je crois, monsieur le président de la commission, que le travail réalisé avec la commission des affaires économiques du de la Haute Assemblée s'est déroulé dans de bonnes conditions.
Nous avons innové en matière de concertation : un travail a été mené en amont entre les assemblées, sur le fondement de l'avant-projet de loi proposé par le Gouvernement, au cours duquel nous avons écouté tous ceux qui participent à l'acte de construire : les usagers, les habitants, les bailleurs sociaux et les constructeurs. Ce processus, qui me paraît une bonne façon d'envisager le travail parlementaire, a permis de mettre au jour les problèmes les plus importants et de faire avancer un certain nombre de dossier. Ce long travail de concertation avec les élus locaux, les parlementaires et les administrations, que nous avons effectué avec le secrétaire d'État Julien Denormandie, s'est en définitive révélé positif pour tout le monde. Nous avons entendu des propositions intéressantes, d'autres contradictoires, mais nous avons été à l'écoute de tous les acteurs, ce qui me semblait indispensable.
Désormais, le projet de loi est devant le Parlement, à l'Assemblée nationale. Monsieur le président Lescure, les échanges au sein de votre commission des affaires économiques ont été à la fois intéressants et fructueux. Plusieurs centaines d'amendements déposés par différents groupes y ont été adoptés. Je veux ici vous remercier toutes et tous pour la qualité de ces débats – quant à leur dureté, elle fait partie de la vie démocratique,
Votre assemblée est aujourd'hui saisie de plus de 3 000 amendements. Je ne considère pas ce nombre comme le signe d'un blocage mais comme la preuve de l'intérêt que manifestent tous les groupes pour le sujet dont nous débattons. Il serait d'ailleurs fort mal venu que le sénateur et ancien président de groupe que je suis, qui a, sous tous les gouvernements, eu très largement recours au droit d'amendement, vienne aujourd'hui contester ce droit ainsi que les règles de la procédure parlementaire. Je me réjouis donc de débattre avec vous.