Intervention de Jacques Mézard

Séance en hémicycle du mercredi 30 mai 2018 à 15h00
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Présentation

Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires :

Le présent projet de loi prévoit que la situation de chaque ménage sera systématiquement réexaminée tous les six ans, afin de leur proposer un logement mieux adapté à leur situation ou à leur demande. Peut-être n'allons-nous suffisamment loin, mais je pense qu'il était indispensable de s'engager dans cette voie. On voit bien, sur le terrain, que le sujet est très important.

Nous proposons aussi d'agir sur le parc privé.

Le projet de loi prévoit la création du bail mobilité. Je le précise tout de suite : ce n'est pas une remise en cause de la loi Besson, c'est un contrat de location d'un à dix mois non renouvelable et sans dépôt de garantie pour les logements meublés, qui permettra de répondre, concrètement, aux besoins de personnes en mobilité, étudiants ou travailleurs en mission professionnelle pour une courte durée. Il s'agit tout simplement d'adapter notre législation à la réalité des évolutions sociétales et de tirer les conclusions de la mobilité toujours croissante des jeunes et des travailleurs dans notre pays.

Il prévoit aussi le développement de l'offre de logements intermédiaires. En zone tendue, les programmes locaux de l'habitat devront fixer un objectif de production de logements intermédiaires, car on constate un manque de logements à des loyers abordables, qui permettraient à des locataires du parc social d'en sortir. Il s'agit tout simplement de redonner de la fluidité et de faciliter les parcours résidentiels, car nous en avons besoin.

Nous souhaitons d'autre part favoriser la mixité intergénérationnelle, qui est de plus en plus plébiscitée, en particulier la colocation dans le parc social. Nous proposerons, via un amendement que vous aurez à examiner, d'élargir la colocation pour personnes handicapées en prévoyant une mesure de portée plus générale. Nous proposons aussi d'améliorer les procédures existantes, par exemple en coordonnant mieux celles relatives à l'expulsion et au surendettement pour la colocation.

Enfin, s'il est un sujet qui nous est imposé par les récentes évolutions technologiques et sociétales, c'est bien celui-ci : aider les territoires à mieux réguler l'activité parfois problématique de la location meublée touristique. On voit quelles sont les difficultés engendrées par les évolutions technologiques ; elles nécessitent des réponses fortes. Si la location meublée touristique est souvent très utile pour accroître le pouvoir d'achat des Français et l'attractivité de nos régions, elle a, dans certaines villes, un impact trop fort sur le marché locatif privé, au détriment de ceux qui cherchent à se loger. Ce n'est pas à Paris qu'on dira le contraire ! Nous proposons donc un régime dissuasif de sanctions, associé à des mesures de régulation volontaire, afin de mieux faire appliquer la réglementation en vigueur. Ces mesures répondent à un vrai besoin.

Quatrième et dernier pilier de ce texte : l'amélioration du cadre de vie de nos concitoyens. Cette ambition est au coeur des projets en faveur de la cohésion des territoires que nous visons et va bien au-delà de la seule question du logement. Les mesures contenues dans le projet de loi souhaitent accélérer la rénovation des centres des villes moyennes, à travers un contrat intégrateur unique, l'opération de revitalisation des territoires. C'est un des objectifs du plan « Action coeur de ville », que j'ai eu l'honneur de présenter il y a peu de temps, et qui comprend une liste de 222 villes moyennes, réparties sur l'ensemble du territoire national. Pourquoi avoir lancé ce plan ? Parce qu'entre les métropoles – dont il ne s'agit pas de contester la réalité, ni les difficultés – , nous avons besoin de conforter le tissu des villes moyennes, dont la porosité avec les territoires ruraux environnants est fort utile et qui ont besoin d'accélérer leurs projets de développement et de redynamiser leurs centres, qui comptent souvent beaucoup de logements et de commerces vacants. Il s'agit, sans créer de nouvelle structure, mais grâce à une procédure simple, de faciliter et d'accélérer les projets des collectivités territoriales. L'objectif est non pas que l'État leur dise de faire ceci ou cela, mais qu'elles disposent d'outils faciles à utiliser, ainsi que des moyens financiers, ceux qui auront été fléchés vers la dynamisation des villes moyennes.

Concrètement, nous renforcerons dans ces communes la lutte contre l'habitat indigne et les marchands de sommeil en instaurant une présomption de revenus, qui permettra des poursuites fiscales, et en élargissant et en systématisant les astreintes administratives. Je sais l'intérêt que portent à ce sujet M. Peu et ses collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Nous avons essayé d'avancer utilement sur ce sujet. Peut-être ne sommes-nous pas allés aussi loin que vous le souhaitiez, monsieur Peu, mais je crois que nous proposons des mesures utiles et efficaces pour lutter contre les marchands de sommeil. J'ai relevé que plusieurs amendements très intéressants avaient été déposés, qui permettront, je le pense, d'améliorer encore le texte sur ce point.

Nous allons aussi moderniser et simplifier le droit des copropriétés, afin de rendre celles-ci plus réactives et de lutter contre les copropriétés dégradées, en faisant en sorte de pouvoir reloger rapidement leurs occupants dans des logements sûrs. Cette question des copropriétés dégradées, mesdames et messieurs les députés, est de plus en plus prégnante dans nombre de villes, en particulier dans les métropoles et leur périphérie, où la situation est devenue explosive – j'emploie ce mot à dessein, car c'est bien ce que l'on a vécu au cours des derniers mois. Le problème est difficile à résoudre, car c'est une question qui relève du droit privé. Il faut néanmoins, et nous y travaillons avec la Chancellerie, que nous avancions sur ce dossier, en favorisant l'action des collectivités et en facilitant l'intervention publique dans ces copropriétés. Dans nombre de quartiers, c'est devenu un sujet particulièrement lourd. Nous en sommes conscients et nous agissons pour y remédier.

Nous proposons enfin d'appliquer de nouvelles mesures de rénovation énergétique dans le secteur tertiaire, afin de conjuguer l'ambition environnementale et la faisabilité technique et économique.

Mesdames et messieurs les députés, le projet de loi ÉLAN que vous vous apprêtez à discuter répond très clairement à l'objectif de cohésion des territoires qui est le nôtre et qui est au coeur de la mission que le Président de la République nous a confiée. Avec le secrétaire d'État Julien Denormandie, nous sommes partis du constat, largement partagé sur ces bancs, que de nouvelles disparités se dessinaient, avec un fossé grandissant entre des territoires qui concentrent nombre d'atouts liés au dynamisme économique et démographique et d'autres marqués par le retrait économique, la vacance de logements et de commerces et le développement d'un sentiment d'abandon, ou d'assignation à résidence, auquel nous ne pouvons, en tant que Républicains, nous résoudre, et cela quelle que soit notre sensibilité. C'est en tout cas la réalité du ressenti dans ces territoires, et si, comme pour le froid, le ressenti est parfois plus fort que la réalité, il n'en reste pas moins que ceux-ci sont confrontés à de graves difficultés.

Il nous appartient donc d'apporter des réponses concrètes, utiles, souples et modernes aux besoins de nos concitoyens en matière de logement, de libérer les énergies, tout en responsabilisant les acteurs et en aidant les plus fragiles. C'est en tout cas le souci que nous avons eu durant ces mois de concertation et de dialogue. Nous avons eu constamment à l'esprit que l'objectif était de faciliter l'action de ceux qui entreprennent, de ceux qui construisent et aussi de ceux qui veulent améliorer les conditions de vie de nos concitoyens, ce qui est le cas dans les collectivités territoriales, à travers le souci de développer leur territoire. Je crois que ces objectifs sont largement partagés. Il existe de fortes divergences, en fonction des sensibilités, s'agissant des moyens à utiliser – c'est la vie démocratique. Sachez néanmoins que nous avons accompli ce travail dans l'objectif de faciliter l'acte de construire, de le simplifier, et de permettre ainsi le développement d'une action collective en faveur du logement.

Je nous souhaite donc collectivement des débats parfois rudes – parce que c'est là encore la vie démocratique et qu'il y a beaucoup à faire – mais riches. La caractéristique de cette assemblée, c'est que, comme au Sénat, chaque groupe parlementaire a…

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