… bref, tous les profils qui ont déserté aujourd'hui nos quartiers.
Nous faisons face à une montée des discriminations, qui a atteint son paroxysme dans des quartiers que nous avons laissés se ghettoïser, se communautariser, et où l'on a laissé certains gagner des territoires, voire des consciences, au prix d'un vrai danger pour notre pays.
Il n'est pas trop tard pour desserrer l'étau de la loi SRU, non pas tant pour s'affronter dans un débat idéologique sur la définition d'un taux maximal de logements sociaux, mais pour permettre aux communes d'adapter avec les préfets leur tendance de construction de logements et de raisonner en flux triennaux. C'est bien plus ambitieux que l'objectif de 40 000 ventes par an de logements HLM, qui ne fera pas revenir les classes moyennes et n'augmentera pas le pouvoir d'achat en banlieue. Il s'agit de 1 % du parc social national. C'est certes un objectif louable, mais c'est insuffisant.
S'agissant des classes moyennes, que fait-on pour les Français qui ne sont pas propriétaires et qui n'ont pas accès au logement social, pour ces classes moyennes pour qui les offres manquent et qui n'ont pas de facilité d'accès à la propriété ? Le logement social a enfermé beaucoup de gens dans la location. Quand, par le passé, des personnes pouvaient un jour devenir propriétaires, aujourd'hui nombre d'entre elles sont contraintes d'être toujours locataires au moment de leur retraite.
Nous devons aussi travailler à l'amélioration du cadre de vie et à la revitalisation des centres-villes. Nous sommes favorables au cadre juridique des opérations de revitalisation du territoire, mais nous attendions des informations plus concrètes sur les moyens déployés pour ces projets. Il serait utile de prévoir un renforcement des moyens d'ingénierie des collectivités territoriales. Par ailleurs, le commerce naissant de la présence de clients et du pouvoir d'achat en coeur de ville, que faire si les villes se dépeuplent de leur classe moyenne et si les logements sont concentrés dans les seules zones tendues et zones d'emploi ? Favoriser la vie des centres-villes ne peut se faire sans aborder la question de la fiscalité, laquelle est aujourd'hui un frein important à l'implantation de nos artisans et de nos commerçants.
Dans le projet ELAN, il y a un tout petit « n ». Intituler ce projet « loi ELA » aurait assurément été moins tendance… Ce petit « n » semble vouloir dire « numérique ». Pourtant, nous n'avons pas évoqué dans nos travaux en commission l'avenir des logements connectés, la question de l'accessibilité par le numérique, de la domotique. Or ce sont des enjeux majeurs sur lesquels nous devrons, à un moment ou un autre, adapter notre cadre législatif. Le volet numérique de ce projet de loi ne prend pas en compte cette réalité digitale.
Il manque de projection dans l'avenir. En effet, le débat devrait se prolonger pour anticiper les aspects réglementaires de ces plateformes qui se développent partout dans le monde, y compris en France, et affichent l'objectif ambitieux de vendre un bien immobilier en moins de quarante-huit heures. L'utilisation des données sera-t-elle ouverte et transparente ? Quel impact cette « ubérisation » du logement et des rapports entre vendeurs et acheteurs, propriétaires et locataires, aura-t-elle sur les circuits fermés, normés et fiscalisés de la transaction immobilière ?
Permettez-moi également d'évoquer un sujet majeur : celui de la fameuse « smart city », cette ville connectée dont on fait aujourd'hui la promotion. Pour le moment, nos concitoyens ne l'ont appréhendée que sous l'angle de la captation de leurs données personnelles. Les polémiques récurrentes sur l'installation des compteurs électriques dits intelligents montrent les insuffisances de notre réflexion et le retard pris pour construire une ville connectée, mais respectueuse des comportements individuels.
Monsieur le président, messieurs les ministres, chers collègues, il nous faut être lucides : il s'agit là d'un texte technique qui manque d'audace, où certaines mesures de bon sens ont été omises, éludées ou renvoyées à plus tard. L'engagement pris par le Gouvernement de ne pas ajouter de normes dans ce texte est à saluer, mais la suppression des normes existantes reste trop faible. Ce texte ne propose pas de raisonnement sur le logement, car il n'en tient pas sur la ville et sur les évolutions démographiques. En commission – ou, plus précisément, dans la première phase de l'examen en commission, car bien évidemment, il y en aura une deuxième à la suite du vote de cette motion ! – , nous avons fait un travail constructif ; vous avez indiqué, messieurs les ministres, que certains points méritaient d'être retravaillés, mais nous ne pouvons pas croire qu'ils l'aient été avec sérieux, concertation et envie en une semaine et demie. En l'état, ce texte ne constitue pour nous ni une évolution ni une révolution. Pour ces raisons, avec mes collègues du groupe Les Républicains, nous demandons que le projet de loi soit réétudié, réexaminé, concerté à nouveau avec les parlementaires et les professionnels – dont les professionnels oubliés tels que les architectes ou les bailleurs sociaux – , et plus généralement avec les Français, les grands oubliés de cette loi. À l'issue d'un débat plus large sur le logement, la ville et la France de demain, nous pourrons revenir devant la représentation nationale et donner ce véritable élan qui manque à la construction de logements dans notre pays.