Intervention de Martial Saddier

Séance en hémicycle du mercredi 30 mai 2018 à 21h45
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, chers collègues, si l'année dernière a été une année record en termes de construction et de vente de logements, tant anciens que neufs, cette embellie risque malheureusement d'être de courte durée. En effet, s'il convient de rappeler que, depuis trois ans, cela va mieux, le secteur de la construction a probablement été celui qui a le plus souffert et qui est sorti le moins rapidement de la fameuse crise économique de 2008. Rappelons tout de même cette embellie de trois ans, même si les prix n'étaient pas entièrement revenus à leur niveau initial, s'agissant du coût de la construction. Mais, pour la première fois depuis trois ans, sur les trois premiers mois de l'année, les mises en chantier stagnent et le nombre de logements autorisés est en baisse.

Malgré ces premiers résultats, l'année 2018 devrait être encore une bonne année, puisque nous devrions bénéficier de l'élan des années précédentes, notamment de 2017, pour les secteurs du bâtiment et du logement. Pour ce qui concerne les prévisions pour 2019 et 2020, elles ne sont toutefois guère optimistes.

Si je rappelle ce contexte, comme nous l'avons déjà fait en commission, mes chers collègues, c'est que les premiers signaux du nouveau Gouvernement et de la nouvelle majorité ont été très négatifs et ont accentué cette tendance, notamment avec la ponction sur les logements sociaux et les freins de l'accompagnement fiscal à la rénovation de l'ancien.

Face à ce constat, le projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique arrive donc à point nommé. Avec mes collègues, je ne peux que me réjouir de cette aubaine législative, qui nous donne l'occasion d'envoyer un signal fort à ce secteur, pour tenter d'enrayer cette baisse.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, comme nombre de vos collègues du Gouvernement, après la ponction sans précédent sur les logements sociaux, vous êtes en quelque sorte en mission. Vous avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre, que vous souhaitiez que l'argent des logements sociaux reste aux logements sociaux. C'est un voeu pour l'avenir. Permettez-moi de faire un rapprochement avec la politique de l'eau : sur le sujet des Assises de l'eau, vos collègues Nicolas Hulot et Sébastien Lecornu sont aussi en mission, puisque Bercy a vidé leurs caisses en 2017 et 2018, comme il l'a fait pour le logement social. Après cela, le Gouvernement dépêche des ministres compétents, pleins de bonne volonté, mais qui ont les poches vides.

C'est dans ce contexte que nous abordons ce texte en séance. Comme je l'ai dit en commission du développement durable, où j'étais présent, et en commission des affaires économiques, où j'ai passé trois jours et trois nuits à vos côtés, je doute fort, à ce stade, et malgré les efforts déjà réalisés, que de véritables solutions à long terme soient trouvées.

Sur de nombreux points, tels la revitalisation des centres-bourgs, le développement numérique ou la lutte contre l'habitat indigne, le projet ne va pas assez loin. De même, la problématique du foncier n'est que très faiblement abordée dans le texte. En effet, mes chers collègues, il a été beaucoup question des logements, notamment des grandes concentrations urbaines de logements sociaux, et moins des autres territoires, où il manque beaucoup de logements, notamment parce qu'il y a beaucoup d'emplois, dans des secteurs où la topographie naturelle n'est pas toujours adaptée pour libérer du foncier, notamment dans les zones de montagne ou dans les zones frontalières. Dans ces secteurs où le foncier est rare, il est extrêmement cher, ce qui conduit à une situation particulièrement tendue. Je n'ai pas encore trouvé, dans le texte, des solutions pour pallier ces difficultés.

Qu'en est-il des moyens financiers dont pourront disposer les bailleurs sociaux, qui, je l'ai dit, ont déjà dû faire face à une ponction sans précédent ? C'est effectivement l'un des grands points faibles de ce texte plein de bonne volonté, de compétences, de bonnes idées, mais qui ne prévoit pas d'accompagnement financier.

Toutefois, les longues heures de débat en commission ont déjà permis d'améliorer sensiblement le projet de loi, avec pas moins de 472 amendements adoptés. Je reconnais la qualité du dialogue que nous avons eu avec le Gouvernement, notamment en commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous avez même accepté certains amendements de l'opposition puisque quatre ou cinq amendements parmi ceux que j'avais déposés ont été adoptés, et je tenais à vous en remercier.

Néanmoins, comment ne pas regretter le recours à la procédure du temps législatif programmé ? Pour un texte d'une telle ampleur, qui concerne l'une des préoccupations majeures des Françaises et des Français, nous aurions dû, mes chers collègues, prendre le temps de débattre et d'examiner tranquillement les articles. Il n'y aura qu'une seule loi logement au cours de cette législature. Elle aurait mérité mieux que les cinquante petites heures dont nous verrons, je le crains, dès ce week-end, qu'elles cadenassent les débats.

Permettez-moi de revenir sur quelques avancées que j'ai défendues ou soutenues en commission, qui figurent désormais dans le texte et qui, je l'espère, y seront maintenues à l'issue de nos débats.

Je commencerai par un amendement qui était, vous l'aurez compris, un amendement d'appel.

Chose promise, chose due : je vous ai transmis, messieurs, la belle lettre d'un architecte des bâtiments de France de Haute-Savoie qui, devant un arrêté de péril et le besoin urgent de démolir un bâtiment situé à proximité d'un lycée – cela se passe de commentaire – , a émis un avis négatif à la démolition, estimant que celle-ci, même partielle, serait une perte irrémédiable pour le patrimoine de la commune et de la Haute-Savoie. J'aurais presque pu vous apporter des photos ; en cas de deuxième lecture, je n'y manquerai pas.

Sans même se pencher sur le coût induit de la réfection du bâtiment, l'ABF a estimé que « la réalisation d'un diagnostic patrimonial couplé à une étude de programmation devrait permettre de faire émerger des solutions de réutilisation qui auraient tout leur sens » – c'est là que le propos vaut son pesant de cacahuètes – « dans ce secteur de la basse vallée de l'Arve ô combien dynamique et prospère ». Sous-entendu : « Messieurs les Haut-Savoyards, nous savons que votre département est riche, que le patrimoine vaut de l'argent, vous allez donc bien trouver une solution : débrouillez-vous pour réhabiliter ce bâtiment. » Où est l'intérêt patrimonial dans cet avis de l'ABF ?

J'avais donc déposé un amendement qui tendait tout simplement à ce que le Gouvernement, qui en a, je crois, les moyens, rappelle aux ABF qu'ils sont là pour donner leur avis sur les enjeux patrimoniaux et non leur sentiment personnel. Ça, comme on dit, c'est fait !

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