Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 31 mai 2018 à 9h30
Évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, tout d'abord, je tiens à dénoncer une fois de plus et avec la plus grande fermeté la décision de recourir à la procédure du temps législatif programmé. Conséquence directe et pratique : le temps de parole des députés Pè A Corsica, qui aurait pu s'élever, en procédure ordinaire, à 120 minutes, se trouve réduit à une quinzaine de minutes. Quinze minutes à trois députés pour aborder des sujets cruciaux – en particulier pour notre île, mais pas seulement – comme le logement social, la loi littoral, le développement numérique de nos villages, les règles d'urbanisme et de construction ou encore la lutte contre la prolifération des centres commerciaux. Une fois de plus, le Gouvernement entretient une distance pour le moins dommageable à l'égard de certains représentants du peuple. Nous le regrettons fortement.

J'en viens au programme du jour. Avec ce projet de loi ELAN, vous vous inscrivez dans une longue série de textes qui mettent frontalement en cause une certaine vision des rapports sociaux et des territoires.

Nous avons eu l'occasion de nous exprimer sur l'évolution programmée du droit du travail, du modèle social en général, sur le nécessaire respect dû aux minorités et aux territoires. Nous avons rappelé que le développement, souhaitable, va au-delà de la simple croissance économique et qu'il intègre fortement de nombreuses valeurs humaines, culturelles et sociales. Ce sont précisément ces dimensions qu'il convient à tout prix de préserver, partout et toujours.

Politiquement, vous proposez un monde nouveau. Soit, mais qu'il établisse clairement la frontière entre les mondes du travail, de l'économie et de la finance, entre l'esprit d'initiative, positif, et la volonté spéculative, destructrice d'emplois et de justice sociale. Qu'il cherche à lutter contre l'uniformisation des modes de vie et prenne en compte les racines culturelles, qui font la richesse des territoires et participent à la personnalité de chaque citoyen. Qu'il s'efforce de maîtriser une mondialisation aujourd'hui galopante, fondamentalement injuste, ayant pour totems la consommation et la recherche du profit à tout prix. En matière d'aménagement – c'est le sujet du jour – , qu'il s'inscrive toujours plus dans la logique du développement durable, de la promotion des énergies renouvelables et de la protection de la vie animale. Qu'il soutienne clairement les lois protectrices du milieu naturel, en particulier la loi littoral que tant de personnes cherchent aujourd'hui à contourner. Qu'il protège nos territoires des abus de la spéculation, toujours à l'affût. Qu'il bloque toutes les tentatives de dérogations, toujours plus insidieuses, aux règles de la construction.

Il y a dans ces choix d'aménagement des contradictions à gérer. Elles sont d'autant plus redoutables qu'elles engagent véritablement le cadre de vie d'aujourd'hui, mais également les bases mêmes de la vie des générations futures. C'est pourquoi il convient de s'accrocher aux principes fondamentaux.

La famille politique à laquelle j'appartiens n'a pas combattu tant d'années, dans des conditions si difficiles, ni consenti tant de sacrifices pour laisser aujourd'hui avancer de façon rampante des tentatives destructrices, notamment celles qui entendent miner la loi littoral. C'est clair : nous ne voulons pas laisser – nous ne laisserons pas ! – prévaloir une logique dominante de marché débridé et d'appât du gain sur une vision maîtrisée, politique et écologique, du territoire.

Nous nous prononçons donc clairement, en Corse comme ailleurs, pour une protection du patrimoine naturel et foncier, pour la revitalisation des zones rurales et de montagne, pour une accession plus facile à la propriété dans le secteur du logement social, pour la rénovation du parc existant, pour le développement du numérique dans nos villages et pour l'aménagement raisonné de nos villes : autant de sujets que nous aurions pu développer si la possibilité nous en avait été donnée.

Plus que jamais, le Gouvernement et le législateur que nous sommes, mais aussi l'ensemble des citoyens, nous sommes tous confrontés à des choix fondamentaux. Je le dis sans vouloir donner de leçons, car j'ai conscience de la difficulté : il convient d'équilibrer, d'arbitrer entre un aménagement réaliste, qui est la réponse concrète aux besoins immédiats, et la préservation des richesses foncières et naturelles. Assurer le présent et garantir l'avenir : ce n'est pas simple, c'est même fondamentalement antinomique, mais c'est, volens nolens, impératif.

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