Commençons par le constat, le diagnostic, du niveau de numérisation de nos armées. Ce constat n'est pas binaire. Vous pourrez en lire le détail dans notre rapport, mais pour décrire schématiquement les choses suivant la summa divisio « organique opérationnel », on peut dire que la France n'a pas à rougir du niveau d'intégration du numérique à ses armes, mais que la numérisation est moins avancée dans le fonctionnement courant des armées.
En effet, s'agissant de nos systèmes d'armes, les armées font du numérique depuis plusieurs décennies comme M. Jourdain de la prose. Nos frégates multi-missions et nos futures frégates de taille intermédiaire sont déjà des systèmes numérisés. Dans le milieu aérien, nous ne voyons pas de retard majeur, grâce à la démarche incrémentale retenue par exemple pour le Rafale, dont on programme aujourd'hui le standard F4. Schématiquement, de telles plateformes sont conçues d'ores et déjà comme un ordinateur autour duquel on construit un bateau ou un avion. L'armée la plus rustique en apparence est peut-être l'armée de terre ; mais il ne faut pas oublier qu'elle s'est engagée au tournant des années 2000 dans la numérisation de l'espace de bataille (NEB). Reconnaissons-le : pour de jeunes recrues qui ont peu ou prou l'âge de la NEB, certains de ces matériels ont presque un côté rétrofuturiste... Mais c'est bien sur la NEB que le programme SCORPION fait fond, et je crois qu'en matière de combat collaboratif info-valorisé, avec SCORPION, la France a même une longueur d'avance, reconnue même à Washington.
Les équipements supposent des transmissions et, là encore, il faut reconnaître que nos armées ne sont pas surclassées, que ce soit en matière de radio logicielle ou de télécommunications spatiales protégées. Et quand nos armées ont dû faire face à des besoins opérationnels urgents, elles ont su y répondre. Je pense au système Auxylium de télécommunication sur le territoire national, que nous avons étudié en procédant à l'audition de son inventeur.
De même, les capteurs du renseignement sont à jour. Enfin, ajoutons que notre base industrielle et technologique de défense a su s'approprier très tôt les technologies numériques, tant pour son propre fonctionnement que pour les intégrer à nos armes.