Intervention de Olivier Becht

Réunion du mercredi 30 mai 2018 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Becht, rapporteur :

Je vais répondre à notre collègue Jacques Marilossian sur la priorité en matière de coopération européenne… Malheureusement, vous avez compris que tout se tient dans les technologies numériques, il ne peut y en avoir qu'une. On ne peut ériger en un seul élément de cette chaîne technologique et négliger tout le reste. Il me semble essentiel, cela dit, de garantir notre souveraineté en matière de micro-processeurs au niveau français ou européen. En effet, un micro-processeur peut être « vérolé » sans qu'on puisse le savoir. Les bombes logiques existent déjà aujourd'hui mais demain, vous aurez les bombes logiques intelligentes, celles qui seront capables de ne pas se faire déceler et de changer d'apparence ou d'emplacement au moment où elles seront détectées. En matière de cloud, qui permet de stocker la donnée, il nous faut des fermes de serveurs françaises ou européennes, implantées sur notre territoire, pour conserver notre souveraineté. L'intelligence artificielle est naturellement essentielle. Enfin, le quantique est pour moi une priorité car c'est la vitesse du traitement des données qui est en jeu. C'est elle qui fera la différence et permettra de réagir avant que l'adversaire n'engage une frappe.

Quant à l'idée d'une DARPA européenne, autrement dit une agence d'innovation de rupture, en réponse à la question de Sabine Thillaye, je note tout d'abord que la structure promouvant la Joint European Disruptive Initiative (JEDI) est une entité privée, associant plusieurs industriels. Au niveau français, il n'est pas exclu de soutenir cette initiative mais une agence de l'innovation de défense est aussi en cours de constitution, pourvue en personnels à la fois par les armées et par la direction générale de l'armement. C'est la raison pour laquelle nous avons insisté dans l'examen de la loi de programmation militaire sur la hausse des crédits en faveur de la recherche amont.

Sur la question de notre collègue Joaquim Pueyo nos vulnérabilités numériques, la question du quantique me paraît fondamentale. J'étais la semaine dernière au Japon, où l'on m'a présenté un disque de la taille de ma main et de l'épaisseur d'un cheveu recelant cinq milliards de transistors qui sont capables de faire cent millions de milliards d'opérations par seconde ! Cela paraît déjà considérable mais demain, le quantique permettra des milliards de milliards de milliards d'opérations par seconde. Les codes actuels seront nécessairement cassés. Cela ne veut pas pour autant dire que nous n'aurons plus de capacité de cryptologie. Simplement, elle doit changer. Par exemple, une grille de code pourrait changer toutes les secondes, pour limiter la portée de la cryptanalyse quantique.

C'est un changement total dans les communications cryptées. S'agissant du drone souverain souhaité par Alexis Corbière, j'indique que c'est exactement ce que nous sommes en train de développer avec le programme de drone EUROMALE. Sur la guerre hybride évoquée par André Chassaigne – vous avez parlé de mafias, de réseaux terroristes voire d'États cachés derrière des réseaux privés – c'est un vrai problème, notamment pour l'attribution d'attaques cyber. Il va falloir sécuriser nos armes pour éviter qu'elles ne se retournent contre nous et sécuriser aussi nos réseaux d'infrastructures civiles, par exemple, celles des réseaux de transport ou d'électricité, qui sont une source de vulnérabilité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.