Mes chers collègues, nous avons le plaisir de recevoir M. Périco Légasse.
Critique gastronomique à l'hebdomadaire Marianne, vous avez, monsieur Légasse, élargi le champ de vos interventions au-delà de ce domaine, en fustigeant ce qu'il est convenu d'appeler la « malbouffe » et en prenant la défense des terroirs. Vous animez sur la chaîne Public Sénat, une émission dont le titre, Manger c'est voter, est un symbole et même une profession de foi.
Vous avez dénoncé à maintes reprises les transformations des habitudes alimentaires qui, selon vous, sont imposées aux consommateurs, notamment par la grande distribution. Vous n'hésitez pas à parler d'un phénomène de financiarisation de l'alimentation à l'échelle mondiale, qui contraint les consommateurs mais aussi les producteurs à s'orienter vers des productions de masse à bas coûts.
La crise du monde agricole trouve là une grande partie son origine. Dans ce système, le surplus de marge ne revient pas aux producteurs. Quant aux consommateurs, ils sont sans doute attirés par des prix bas mais le marketing les pousse souvent à surconsommer. Les consommateurs les plus modestes n'ont évidemment pas le choix, dès lors que les produits de qualité, ceux qui ont les meilleures valeurs nutritionnelles, sont souvent plus chers voire à des prix inaccessibles.
Vos interventions publiques tendent toutefois à démontrer, dans un souci de pédagogie, qu'il est possible de concilier qualité de l'alimentation et juste prix. Pour atteindre ce but, donc en rectifiant une tendance lourde, vous considérez, non sans raison, que l'effort relève du volontarisme politique. Dont acte !
Votre regard s'est plus spécifiquement porté sur les filières de l'élevage qui privilégient le plus possible la croissance naturelle de l'animal en rejetant notamment l'usage de tourteaux de soja génétiquement modifié encore largement importés du Brésil ou d'Argentine.
Les productions bio progressent en France comme dans la plupart des pays européens. Quel regard portez-vous sur ce développement ? Ne pensez-vous pas que des industriels de l'alimentaire se servent de cet engouement pour labelliser en bio certains de leurs produits qui intègrent parfois des matières premières importées et détournent l'esprit du label bio ?
La question de l'alimentation industrielle est cruciale. Elle n'a cessé de gagner du terrain au fil des ans, si l'on considère, par exemple, les millions de personnes qui, chaque jour, mangent dans les structures de restauration collective des entreprises, des établissements scolaires, des hôpitaux et des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
Nous souhaiterions que vous puissiez nous livrer certaines pistes de réflexion et, le cas échéant, des propositions concrètes qui vous tiennent particulièrement à coeur.
Avant de vous donner la parole pour un exposé liminaire d'une dizaine de minutes, je dois vous demander de prêter le serment conformément aux dispositions de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958.