Rappelons, pour commencer, que les perturbations dans les établissements scolaires ne sont pas toutes dues à l'utilisation du portable et que l'addiction aux objets connectés n'est pas l'apanage des adolescents – nous, députés, avons peu de leçons à donner aux enfants ! (Sourires.) Sans rien cacher des enjeux, des effets dangereux du portable sur la santé et des pratiques de harcèlement, nous devons aussi pouvoir parler de la créativité qu'il suscite chez les élèves et de son utilisation à bon escient – j'ai vu des collégiens organiser des maraudes citoyennes grâce à leur téléphone. Je pense aussi que ne pas faire la moindre distinction entre un enfant de cinq ans et un collégien de quinze ans, comme dans cette proposition de loi, c'est risquer d'infantiliser les adolescents.
D'autres l'ont dit, le téléphone portable est, de fait, interdit à l'école maternelle et primaire et dans les collèges, sur les heures d'enseignement et dans les lieux définis par le règlement intérieur. La proposition de loi inverse l'interdit. Alors que le règlement intérieur prévoyait les lieux où le portable est interdit, il prévoira désormais les lieux où il est autorisé. Voilà tout le grotesque d'une démarche dont l'unique objet est de répondre à tout prix à une promesse de campagne, formulée alors qu'une loi existait déjà.
Permettez-moi de pointer un paradoxe : vous prônez, en bons libéraux, un interventionnisme moindre de l'État dans tous les champs de la société, mais vous acceptez de vous immiscer dans un domaine où la loi n'a pas à trancher et qui est défini par les règlements intérieurs.
Cette proposition de loi, dont il convient de souligner le ridicule, porte toutefois sur des enjeux véritables. Pour autant, elle ne pose pas la question de l'usage du numérique par les jeunes et les difficultés que cela engendre. Nos propositions porteront essentiellement sur l'accompagnement pédagogique et la formation des jeunes, adaptée selon les âges. Il est nécessaire aujourd'hui de discuter des bonnes pratiques et de la créativité : dans le cadre d'ateliers, par exemple, les jeunes pourront aussi apprendre à leurs enseignants ce qu'ils peuvent faire avec leur portable. L'interdit doit être respecté, mais il faut aussi un climat de confiance à l'égard des collégiens : c'est à cette condition que nous pourrons lutter contre les effets dangereux et prévenir le cyberharcèlement.