Intervention de Paul Toulouse

Réunion du jeudi 24 mai 2018 à 10h30
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Paul Toulouse, président d'Eurofins Laboratoires de microbiologie Ouest :

Le laboratoire tiers auquel nous adressons les échantillons pour des analyses complémentaires est le laboratoire ADRIA, situé à Quimper, et qui, à ma connaissance, n'a pas de liens capitalistiques avec Lactalis – en tout cas, c'est bien un laboratoire indépendant, et non un laboratoire interne de Lactalis.

Le PDG de Lactalis a effectivement donné une interview au journal Les Échos qui pouvait être interprétée comme une mise en cause des analyses de notre laboratoire. En réalité, une lecture attentive du texte de cette interview fait apparaître que M. Besnier s'interroge non par sur la fiabilité des analyses, mais sur leur sensibilité. La fiabilité d'une méthode d'analyse réside dans le respect de l'ensemble des normes prédéfinies et validées s'appliquant au procédé mis en oeuvre pour détecter la salmonelle dans les produits. La sensibilité d'une méthode d'analyse – que ce soit dans l'agro-alimentaire, en biologie médicale ou dans le domaine de la lutte antidopage – fait référence au seuil en dessous duquel la méthode utilisée ne permet pas de détecter ce qui est recherché. Ce que veut dire M. Besnier, c'est que la méthode choisie parmi notre catalogue que nous proposons n'est peut-être pas suffisamment sensible pour détecter la salmonelle dans ce cas précis – correspondant à une très faible contamination, comme l'ont rappelé Santé publique France et l'institut Pasteur.

J'ajoute qu'analyser un échantillon, ce n'est pas la même chose qu'analyser un lot. Les conditions de l'analyse vont varier en fonction de l'échantillonnage, c'est-à-dire de la quantité d'échantillons prélevés au sein d'un lot donné. Sur ce point, je crois que M. Salvat vous a bien expliqué, lors de son audition, qu'en multipliant les échantillons prélevés sur un même lot, on diminue la probabilité de mettre sur le marché un lot contaminé – un rapport rédigé par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), à laquelle a succédé l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) à la suite de la crise de 2005, disait la même chose. Pour notre part, nous ne savons jamais combien d'échantillons ont été prélevés par lot : ce point fait partie de l'analyse de risque globale de nos clients, quels qu'ils soient.

Par ailleurs, nous ignorons si l'échantillon que nous analysons a été prélevé juste après sa fabrication ou plus loin dans le temps. Juste après la fabrication, le produit peut contenir des bactéries stressées, difficiles à revivifier et à faire se multiplier en vue de leur détection. Une analyse du même produit, effectuée selon la même méthode mais quelques mois plus tard, pourra donner des résultats tout à fait différents, car un produit évolue dans le temps. Une poudre de lait, même infantile, n'est pas un produit stérile : elle contient une flore bactérienne – parfois des salmonelles – qui va se modifier au cours du temps, en fonction de sa composition et de ses conditions de stockage.

Je vous précise que lorsque plusieurs analyses sont effectuées sur le même lot à différents moments, elles ne peuvent l'être sur les mêmes échantillons, car nos analyses sont destructives : elles nécessitent de diluer chaque échantillon pour en faire un bouillon de culture.

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