Intervention de Jean-Baptiste Lemoyne

Réunion du jeudi 15 mars 2018 à 10h05
Commission des affaires européennes

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères :

Ludovic Mendes a évoqué ce que j'appellerai pour ma part l'instrumentalisation des accords de libre-échange. On le voit bien, les accords sont aussi créateurs d'opportunités pour un certain nombre de filières, comme celle des vins et spiritueux et celle du lait. Après un accord avec la Corée signé en 2011, la balance commerciale européenne est devenue excédentaire.

En novembre, la Commission a remis au Gouvernement un rapport qui, pour la première fois, évalue la mise en oeuvre des accords. C'est un fait, on passe beaucoup moins de temps à évaluer la mise en oeuvre des accords qu'à les négocier ! On doit en faire la publicité, car cela permet de se rendre compte que le résultat est plutôt positif. Le fait d'en parler régulièrement au Parlement est l'occasion d'informer la population.

Pourtant, force est de constater que des rumeurs, totalement infondées, circulent, relayées par les réseaux sociaux. Il faut dire que cela a été favorisé par l'opacité et le culte du secret qui caractérisaient, il y a peu d'années, la négociation de ces accords. Je vous rappelle qu'il n'y a pas si longtemps, les parlementaires ne pouvaient consulter les documents que dans une pièce prévue à cet effet, et sans portable. Des progrès ont été faits depuis deux ans, mais nous plaidons pour la transparence, qui permet de rétablir certaines vérités. Oui, il faut informer et mettre à la disposition de tous les données réelles.

Il est vrai, Monsieur Bru, que l'OCDE a permis d'obtenir des accords sur les crédits à l'exportation, contre la corruption. Il faudrait, pour avancer, étendre le champ des négociations conduites à l'OCDE. Dans le cadre de l'OMC, le Japon, les États-Unis, l'Union européenne parviennent à enclencher des débats. Nous essaierons d'y agréger petit à petit de nouveaux pays.

Mais l'OMC manque de dimension politique et il faut la refondre. Nous sommes en train de travailler à de nouvelles règles. Comme vous l'avez souligné dans votre rapport, la règle du consensus peut paralyser l'institution. La réponse aux problèmes commerciaux, ce n'est pas moins d'OMC, mais plus et mieux d'OMC. Lorsque l'on assiste à ces grands-messes, on se rend compte que l'Union européenne, critiquée par ceux-là mêmes qui agitent les peurs vis-à-vis des accords commerciaux, ne fonctionne pas si mal que ça.

Dans les négociations avec le MERCOSUR, nous estimons que le compte n'y est pas pour la filière lait. L'autre partie doit encore faire des efforts.

Effectivement, nous devrons rediscuter des droits de douane sur le textile, l'accord spécifique ayant pris fin. Il nous reste quelques instruments de défense commerciale, mais, très clairement, c'est un domaine auquel nous devons demeurer attentifs.

Liliana Tanguy a signalé le fait qu'un ministre britannique se rendrait aux États-Unis pour obtenir des exemptions. Comme cela a été souligné dans le rapport, la politique commerciale fait partie des politiques fondamentales qui ont été mises en oeuvre dès le début et qui concernent l'ensemble du bloc européen. Nous considérons que celui-ci ne peut être scindé. L'Union n'est pas sécable de ce point de vue !

Enfin, Monsieur Michels, nous plaidons pour que la dimension environnementale soit systématiquement prise en compte dans les accords et dans les mandats, ce qui n'est pas évident pour tout le monde. La Commission a publié un document il y a dix jours comportant une quinzaine de propositions, dont certaines sont issues du plan d'action CETA. Mais nous pensons qu'elles ne vont pas assez loin car nous voulons que cela soit contraignant.

Nous rencontrons des difficultés pour conclure les négociations EGA (« Environmental Goods Agreement ») sur les biens environnementaux en cours au sein de l'OMC. Les États-Unis ne sont plus très motivés, ce qui n'étonne personne, et la Chine veut indexer des biens qui ne sont pas vraiment environnementaux. Force est de constater que cette discussion est plutôt au point mort.

Je signale que les documents que j'évoquais, en répondant à M. Mendes, sur l'évaluation des accords de libre-échange, par exemple ceux passés avec la Corée, sont en ligne. Je vous invite, vous, et tous ceux qui suivent nos débats, à les lire, ainsi que la note portant sur le sujet de la commission du développement durable.

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