Les défis sont nombreux en matière agricole : maintenir une agriculture plurielle, contribuer à la sécurité alimentaire européenne et mondiale, préserver le modèle européen, assurer la durabilité des exportations, tant sur le plan économique qu'environnemental, et enfin répondre aux attentes sociétales. Pour relever ces défis, une PAC forte est nécessaire.
Or, à chaque fois que l'on parle de réformer la PAC, j'ai le sentiment qu'elle se fait pour des raisons extérieures, budgétaires ou commerciales, et non pour mettre en oeuvre un vrai projet pour l'agriculture.
Même si j'aimerais parler budget qu'après avoir évoqué les objectifs de la PAC, je dois vous faire part de notre déception quant aux propositions présentées par la Commission européenne dans le cadre du prochain CFP. Indépendamment de toute querelle sur les chiffres, dont on sait qu'ils sont aisément manipulables, force est de constater qu'avec 1,1 % du RNB, ces propositions manquent singulièrement d'ambition tout en mettant à contribution les politiques anciennes, parmi lesquelles la PAC, pour financer les priorités nouvelles.
La FNSEA s'interroge sur cette proposition de réforme de la PAC et en particulier sur le « new delivery model ». Pour nous, c'est une fausse bonne idée. Le Commissaire Hogan a mis en avant les difficultés qui résultaient de l'application de la PAC mais par cette proposition, il ne fait que déplacer le problème au niveau des États-membres. J'observe par ailleurs que tous les exercices passés de simplification de la PAC se sont traduits par une simplification de sa gestion par la Commission mais pas par les agriculteurs.
Nous sommes très attachés à l'architecture de la PAC en deux piliers, l'un économique et financé exclusivement par l'Union européenne, l'autre plus environnemental et cofinancé par les États-membres selon leurs propres priorités et contraintes. Dans ces conditions, il ne faudrait pas que le « new delivrry model » aboutisse à un délitement du sens commun de la PAC, voire de la PAC elle-même.
Sur la réforme globale de la PAC, quatre axes nous semblent prioritaires.
Le premier porte sur les soutiens directs qui sont absolument indispensables aux agriculteurs. Parmi ceux-ci, le « socle de base », c'est-à-dire les droits à paiement de base (DPB), représente une part importante mais il ne saurait suffire. En effet, certaines régions ou productions peuvent avoir des difficultés structurelles ou conjoncturelles qui justifient un soutien supplémentaire. Le principe des aides couplées nous paraît par conséquent important, même s'il pourrait être réformé afin de soutenir, notamment, la structuration des filières. Les indemnités compensatoires de handicap sont également essentielles pour leur permettre de rester concurrentiels.
Le deuxième axe, qui est peut-être le plus important, est la gestion des risques et des crises. Les agriculteurs sont soumis à de nombreux aléas, économiques, climatiques ou environnementaux et les instruments actuels ne permettent pas d'y faire face efficacement. Évidemment, face à ces aléas, les agriculteurs n'attendent pas tout de la PAC et il leur appartient d'en maîtriser une partie, pour autant qu'on le leur permette, par exemple, en les autorisant à faire des réserves d'eau et à les utiliser en période de sécheresse. La protection contre les aléas doit se faire, certes, au niveau des exploitations mais également au niveau national et européen, par une amélioration de la réserve de précaution, une meilleure organisation des territoires et des filières (assurance climatique, mutuelles…) et des instruments d'intervention sur le marché modernisés.
Le troisième axe est l'architecture environnementale. Il est nécessaire de combattre l'idée d'une opposition entre les agriculteurs et l'environnement et, pour ce faire, de mettre en place des mécanismes de protection de l'environnement qui sont adaptés à la réalité des exploitations.
Enfin, le dernier axe, est le fonctionnement de la chaîne alimentaire. Certes, des progrès ont été faits via le règlement Omnibus mais ils doivent être poursuivis.