Intervention de David Meyer

Réunion du mercredi 23 mai 2018 à 9h30
Commission des affaires sociales

David Meyer, représentant de la Confédération générale du travail (CGT) :

D'une manière générale, s'attaquer aux enjeux de la formation professionnelle impose de modifier son regard sur l'emploi. À partir du moment en effet où l'on considère que l'emploi est une variable d'ajustement qui doit garantir un certain niveau de rentabilité pour les actionnaires, on passe à côté des vrais enjeux. Or, dans un certain nombre d'entreprises, l'emploi sert souvent de variable d'ajustement. Pour construire un projet ambitieux et développer une vraie politique de la formation professionnelle, il faut rompre avec cette logique.

Si je fais cette digression c'est que certains d'entre vous nous ont interpellés sur la qualité du dialogue social. Les différentes organisations syndicales ne vous donneront pas la même réponse, mais la CGT considère que la loi El Khomri, puis les ordonnances sur le code du travail ont considérablement amoindri la capacité des acteurs sociaux à s'exprimer sur un certain nombre de sujets au sein des entreprises. Ils ont de moins en moins la possibilité d'avoir une expertise sur les comptes ou la stratégie de l'entreprise, donc sur les besoins en formation.

Nous avons déjà exprimé nos craintes vis-à-vis de la création des comités économiques et sociaux, de leur rôle et du temps dont ils disposeront, mais aussi de la menace qu'ils font indirectement peser sur les CHSCT.

Traiter de la formation professionnelle ou de l'égalité professionnelle dans un contexte où on raréfie les moyens du dialogue social dans les entreprises, voire dans les branches, devient compliqué.

En ce qui concerne les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, il est difficile de trouver une solution satisfaisante lorsqu'on a un écart moyen de 20 à 25 % au niveau national et que certaines branchent affichent des écarts n'excédant pas 5 % en s'appuyant sur des critères très discutables. La CGT souhaite donc que ces évaluations soient réalisées selon une méthode claire, qui permette de comparer les véritables distorsions de situations entre les femmes et les hommes, ce qui implique notamment de prendre en compte le plafond de verre, qui n'est souvent pas considéré dans les calculs.

Tout cela renvoie à la responsabilité des entreprises : malgré l'accumulation des dispositifs depuis plusieurs années, en termes d'actions concrètes, on est encore très loin de l'égalité entre les femmes et les hommes, en matière de rémunération comme d'accès à l'emploi.

Pour me recentrer sur le projet de loi, nous sommes contre la libéralisation de la formation professionnelle et contre la logique sous-jacente, qui consiste à développer des compétences uniquement au service de l'entreprise.

Nous souhaitons que les agences pour la formation professionnelle des adultes continuent d'exister et que leur rôle soit renforcé. Nous sommes attachés à un service public de l'accompagnement des demandeurs d'emploi, mais aussi des jeunes, que ce soit dans les lycées généraux ou professionnels.

Nous estimons que la monétisation du CPF présente le risque que de nombreux salariés aient un reste-à-charge énorme s'ils veulent accéder à une formation qui correspond à leurs attentes, à leurs besoins et à leur envie d'évoluer. Nous plaidons pour un CEP qui reste universel, potentiellement accessible à tous les actifs, quel que soit l'opérateur, et qui soit surtout une aide pour les salariés en difficulté ou qui sont victimes de « mal travail ».

Cela rejoint la question du handicap et de l'insertion des travailleurs handicapés, indissociables de celle des conditions de travail dans les entreprises. La CGT a estimé que le « mal travail » représentait chaque année environ 4 % du PIB. De tels chiffres nous obligent à nous poser la question des politiques à mener pour diminuer non seulement les troubles musculo-squelettiques mais toutes les formes de pression que subissent les salariés.

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