S'agissant des biosimilaires, nous sommes en attente du décret d'application de la loi, qui relève évidemment de l'autorité ministérielle et non pas de l'ANSM. Ce décret devrait permettre l'extension de l'utilisation des biosimilaires dans des conditions encadrées telles que décrites dans un rapport publié sur le site de l'ANSM.
Nous avions engagé le ministère à évoluer au sujet de la forte restriction concernant l'utilisation et le déploiement des biosimilaires qui a existé pendant longtemps. Au regard de ce qui se fait en Europe, cette position restrictive n'est plus d'actualité. Au contraire, on doit permettre le déploiement des biosimilaires et la substitution d'un biosimilaire par un autre dans des conditions encadrées. Selon la fabrication, un même biosimilaire peut présenter des différences plus importantes qu'entre deux biosimilaires différents : il s'agit de médicaments biologiques. Le décret est attendu. La liste des biosimilaires autorisés devrait être publiée dans les prochains jours sur le site de l'ANSM, si ce n'est déjà fait, avant même la sortie du décret.
Madame Dubié, j'ai en effet évoqué une responsabilité collective des acteurs en ce qui concerne le drame humain provoqué par la Dépakine. Quel retour d'expérience en avons-nous fait ? Nous en avons conclu que nous devions être très attentifs, le plus en amont possible, aux signaux même faibles ou contradictoires. Sur quoi s'appuyer ? Sur l'évolution des données acquises de la science, sur les informations en provenance de différentes sources. Comme indiqué dans mon introduction, nous sommes en phase de renforcement de nos processus de surveillance. J'ai créé à mes côtés un centre d'appui sur cette question.
Il faut intervenir très tôt et avec précaution en termes d'information. Les notices qui résument les caractéristiques des produits à l'intention des médecins ne suffisent pas. Nous devons utiliser d'autres canaux. Pour avoir travaillé en cabinet ministériel à l'élaboration de la loi sur les droits des malades en 2002, je suis intimement convaincu que la prévention naît du dialogue entre le médecin et le malade. C'est là que cela se passe et non pas ailleurs. L'information doit se faire à destination des praticiens mais aussi des patients, de façon à ce que l'échange puisse avoir lieu.
Comme vous l'avez indiqué, nous avons décidé de contre-indiquer les médicaments à base de valproate dans les troubles psychiatriques, mais uniquement en cas de grossesse et pour des femmes en âge de procréer qui ne prennent pas une contraception efficace. Comment le faire savoir ? Nous avons fait tout ce que nous pouvions en ce sens. C'est inscrit dans la notice, dans le résumé des caractéristiques du produit. Il y a aussi un pictogramme sur la boîte qui souligne le danger du valproate. En psychiatrie, le pictogramme signale l'interdiction en cas de grossesse ou en l'absence d'une contraception efficace.
Dans le cas de la maladie de Lyme, notre responsabilité est de nous assurer, par le biais de campagnes de contrôle et d'un travail avec les industriels, de la qualité des tests qui fait débat. La maladie de Lyme suscite un débat très passionnel, avec des éléments réels et d'autres qui méritent discussion. Cela étant, il y a eu des évolutions très significatives. Nous sommes dans une période de contrôle très attentif de la qualité des tests de détection de cette maladie, notamment dans le cadre d'un programme initié par le ministère.
Quant au Docétaxel, c'est une longue histoire. Il y a environ un an, des cas de décès de femmes atteintes de cancers du sein traités par chirurgie et avec le Docétaxel – en traitement adjuvant pour éviter un risque d'extension – ont été signalés notamment dans des établissements parisiens. Nous avons immédiatement diligenté une analyse de pharmacovigilance ; nous avons fait une analyse des médicaments qui étaient des génériques ; des discussions et rencontres ont été organisées et toutes les spécialités ont fait l'objet d'analyses en laboratoire. Tout a été discuté et rediscuté avec les professionnels de santé, avec l'Institut national du cancer (INCa). Nous avons également fait remonter le signal au niveau européen.
À ce stade, nous en avons conclu qu'il n'y a pas de problématique propre au Docétaxel. S'il ne présente pas de défaut, ce médicament présente néanmoins des risques élevés car il est cytotoxique, c'est-à-dire tueur de cellules. Ce qui s'est passé est essentiellement un problème d'évolution des pratiques : alors qu'il était surtout utilisé pour traiter des cancers en phase terminale ou particulièrement graves, ce médicament a été récemment davantage employé en tant que traitement adjuvant administré à des femmes jeunes atteintes de cancers faisant l'objet d'un bon pronostic.
L'analyse du rapport bénéfice-risque du médicament n'est évidemment pas la même pour un patient en fin de vie ou pour une patiente faisant l'objet d'un bon pronostic. Cette évolution devait être prise en compte. Elle l'a été dans le cadre d'une collaboration avec les cancérologues, l'INCa et l'ANSM. Nous avons d'abord suspendu l'utilisation du Docétaxel pendant quelques mois. Nous l'avons ensuite ré-autorisée mais de manière encadrée. L'INCa va produire des références d'encadrement extrêmement strictes à la rentrée de septembre.
J'en viens à votre question, madame Dufeu-Schubert, sur la qualité de vie au travail et le turnover. Nous avons un turnover plutôt plus bas que celui de la moyenne des autres agences. Nous devons trouver le juste équilibre. Il s'agit de conserver des cadres et leur expérience tout en renouvelant nos équipes. Nos personnels peuvent avoir envie de valoriser leur expérience dans d'autres environnements et nous souhaitons aussi accueillir des gens qui sortent de l'université. Nous sommes plutôt dans une période de restriction des emplois et les mouvements se font essentiellement par sorties et entrées.
Si le turnover est plutôt faible, je ne dis pas pour autant que tout est parfait s'agissant de la qualité de vie au travail à l'ANSM. Nous avons beaucoup de travail. Il suffit de lire la presse pour savoir qu'il y a beaucoup de tensions : c'est une institution qui est sous très forte exposition, notamment médiatique. Nous faisons un gros travail d'accompagnement des agents qui sont eux-mêmes très exposés, mais il reste beaucoup de choses à faire dans ce domaine.