Concernant la présence chinoise à Djibouti, elle est un signe de l'arrivée ou du retour de puissances émergentes ou anciennes sur la scène internationale. Ces puissances cherchent à étendre leur influence, et font preuve d'un intérêt croissant pour l'Afrique, qui ne se limite plus aux seuls produits énergétiques et aux matières premières. C'est un constat très structurant concernant le dimensionnement de notre outil militaire. Cela nous impose le maintien, voire le renforcement de certains de nos prépositionnements pour rester au contact des puissances émergentes – je pense aux forces de souveraineté ou aux forces prépositionnées en Afrique.
Pour ce qui est du service national, j'avais proposé l'instauration du service militaire volontaire au président Hollande, au moment où nous étions en déflation d'effectifs. Je trouvais en effet dommage d'offrir des pécules de départ à des sous-officiers et à des officiers alors qu'ils pouvaient encore apporter quelque chose au pays et à sa jeunesse. Aussi avais-je imaginé un service militaire volontaire qui aurait été une « boîte » interministérielle où, au lieu de nous séparer purement et simplement de nos hommes, nous les aurions affectés afin qu'ils aident nos jeunes. J'ai exposé ce projet au président de la République lorsqu'il m'a reçu le 17 novembre 2014. Puis il y a eu les attentats de Paris, en janvier 2015 et, lors de ses voeux, le chef de l'État s'est tourné vers Jean-Yves Le Drian et a annoncé sa décision de créer trois centres du service militaire volontaire. Le problème est que nous sommes victimes de notre succès : ce système donne tellement satisfaction que, d'une certaine manière, il est devenu la référence alors que c'est en quelque sorte de l'artisanat et qu'il est censé déboucher sur l'emploi. Aujourd'hui, plus de 75 % des jeunes accèdent à l'emploi à l'issue de leur service militaire volontaire, c'est vraiment une réussite pour nous, et d'autant plus que ce SMV est une sorte de dernier recours : si ces jeunes échouaient au service militaire volontaire, il n'y aurait plus rien pour eux, et j'ignore vraiment de quelle manière ils se comporteraient dans la société de demain.
Il s'agit donc de savoir si l'on peut élargir le périmètre du service militaire volontaire et concevoir un service national différent, dont la finalité ne serait pas le retour à l'emploi. Parmi les jeunes, tous ne sont pas en situation de déséquilibre, heureusement. J'ai beaucoup réfléchi au sujet, encore une fois, et la question qui nous est posée est complexe. Sans vouloir donner dans le déni, sans mettre la tête dans le sable, je vous répondrai que c'est d'abord une question politique, celle de savoir quelle finalité nous voulons donner à ce service national.