Intervention de Florence Parly

Réunion du jeudi 8 mars 2018 à 14h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Florence Parly, ministre des Armées :

Je vous remercie d'avoir mis en exergue l'article 7 de la LPM, qui est un des axes majeurs d'amélioration de la conciliation de la vie familiale et des obligations liées aux missions. Une des raisons pour lesquelles nous avons tendance à plafonner autour de 15 % ou 16 % de femmes dans les effectifs militaires, c'est qu'il se produit d'une forme d'évaporation, pardonnez-moi ce terme, autour de la tranche d'âge située entre trente et quarante ans correspondant au moment où les femmes ont des enfants et peuvent avoir envie de consacrer du temps à leur éducation.

Or cette tranche d'âge est cruciale pour le développement des carrières : disposons-nous d'un vivier suffisant de femmes de trente à quarante ans qui soient à même d'accéder au grade de colonel pour ensuite parvenir à celui de général ? Il fallait donc s'adresser tout particulièrement à cette tranche d'âge et traiter la question non seulement du maintien du lien juridique entre le militaire – femme ou homme – et son employeur, mais du maintien de la compétence du militaire qui prend un congé pour pouvoir élever un enfant de moins de huit ans et qui ne doit pas perdre complètement le fil afin, au moment de sa réintégration, de ne pas être pénalisé dans le déroulement de sa carrière ; il fallait également, dans une perspective « gagnant-gagnant », si j'ose dire, permettre aux armées de compter sur des compétences dont certaines sont rares. Voilà pourquoi nous avons souhaité ouvrir la possibilité, pour les militaires en congé pour convenances personnelles, lorsque c'est pour élever un enfant de moins de huit ans, de servir dans la réserve opérationnelle parce que, grâce à cela, ils pourront, pour des périodes moins exigeantes, entretenir une compétence.

Il n'y a pas de perte de droits pendant cette période, qu'il s'agisse de la retraite ou de la protection sociale. L'avancement, dans l'armée active, est permis au prorata du nombre de jours effectués dans la réserve. Ce dispositif est ouvert sur demande et doit évidemment être accepté par le gestionnaire. Son impact financier est très limité. Nous espérons qu'il y aura au moins une centaine de bénéficiaires par an et davantage si possible. Enfin, le dispositif s'inscrit pleinement dans le plan Famille lancé il y a quelques mois.

Vous m'avez interrogée sur l'activité de la cellule Thémis que j'ai réunie hier pour dresser un bilan de son activité. Je rappelle qu'elle a été mise en place en 2014 pour permettre à toute personne qui s'estime victime d'actes de harcèlement ou de discrimination ou de violences sexuelles, d'abord d'en faire part pour obtenir conseil et réconfort, ensuite d'enclencher éventuellement une procédure si et seulement si la victime le demande. La cellule reçoit environ six à sept dossiers par mois et en traite en permanence 120. Il est important d'avoir présent à l'esprit que 60 % des cas traités donnent lieu à saisine des tribunaux. Ce pourcentage est en effet très élevé, beaucoup plus élevé que la moyenne : des études réalisées sur des échantillons beaucoup plus larges, au ministère des Armées, montrent que le taux de saisine des tribunaux est plutôt de l'ordre de 15 %. Cela signifie que l'action de la cellule, qui n'existait pas en 2014 et a été mise en place très rapidement, à partir de rien si je puis dire, est désormais complètement intégrée au fonctionnement des armées. Elle joue également un rôle de conseil auprès du commandement afin de l'éclairer sur la bonne façon de procéder.

J'ajoute un point, évoqué par les membres du Gouvernement qui se sont exprimés sur les mesures annoncées ce matin par le Premier ministre : il est très important que les employeurs aient une vision des plus claires de la bonne articulation entre les sanctions disciplinaires qui relèvent de leur responsabilité et le déroulement des enquêtes et des recours en justice. Ce n'est pas parce qu'il y a des recours que les employeurs seraient exonérés de prendre des sanctions, même si la marge peut parfois paraître étroite. C'est donc le rôle de la cellule Thémis de bien éclairer le commandement sur sa latitude d'action et ses obligations en matière de sanctions, sans pour autant empiéter sur ce qui relève de la compétence du juge.

J'en viens à l'accueil dans nos écoles militaires et nos écoles de formation d'élèves ressortissants des pays de l'Est de l'Europe. La formation de stagiaires est un outil d'influence très important. Il s'agit d'ailleurs d'un sujet sur lequel nous allons à nouveau porter notre attention : j'ai été frappée, au cours de mes nombreux déplacements, de constater combien de nombreux pays étrangers regrettaient qu'au cours des quinze dernières années, les réductions de moyens qui ont affecté le ministère se soient en particulier traduites par la diminution du nombre de places réservées aux officiers ou aux élèves dans plusieurs de nos écoles ; aussi y avons-nous perdu en rayonnement et en influence. Nous sommes très présents en Afrique de l'Ouest, près de nos partenaires avec lesquels nous sommes engagés en OPEX mais nous devons également, c'est vrai, nous ouvrir au-delà, de sorte que si tel ou tel pays, en particulier d'Europe de l'Est, et a fortiori s'il s'agit de pays francophones, formulent des demandes, nous les examinerons avec grand intérêt.

Pour ce qui est de la force conjointe du G5 Sahel, nous avons décidé de la déployer et de la faire monter en puissance en priorité sur le fuseau centre parce que c'est là que les menaces sont les plus vives. L'objectif est que sa capacité opérationnelle soit totale à la fin du mois de mars. Pour le reste du périmètre, le déploiement devra être achevé à la fin du premier semestre. En matière d'effectifs, il est prévu de déployer 5 000 hommes dans un premier temps, puis nous verrons comment les armées des cinq pays peuvent progressivement engager davantage de moyens à disposition de la force conjointe. Et s'il nous faut être conscients des capacités de ces armées, nous pouvons malgré tout nous montrer très confiants sur la volonté des pays du G5 Sahel d'aller de l'avant pour constituer cette force et nous pouvons également saluer l'ampleur des pas réalisés en seulement quelques mois.

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