Intervention de Florence Parly

Réunion du jeudi 8 mars 2018 à 14h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Florence Parly, ministre des Armées :

Après avoir gagné la guerre, comment peut-on gagner la paix ? Vaste sujet. En tout cas, il est certain qu'il est plus difficile de gagner la paix que de vaincre militairement, même si une telle victoire n'est pas nécessairement chose aisée. Vous avez tout à fait raison, Monsieur Lejeune, de rappeler que, pour pouvoir basculer d'un état à l'autre, encore faut-il coordonner les actions qui relèvent du ministère des Armées avec celles qui relèvent du ministère de l'Europe et des affaires étrangères.

C'est la raison pour laquelle je me suis déjà rendue avec Jean-Yves Le Drian en Irak qui vit précisément ce temps de bascule. À la fin de l'année 2017, le pays était entre les opérations à caractère militaire et la préparation d'échéances électorales marquant le retour à une certaine normalité du temps de paix. Il faut donc pouvoir organiser, programmer tout ce qui a trait à l'aide au développement et à la reconstruction, ce qui est vraiment le rôle du ministère de l'Europe et des affaires étrangères avec ses différents opérateurs et agences.

Comme nous le voyons au Sahel, par exemple, les armées peuvent mener à bien des actions au profit des populations, avant même que n'interviennent des structures telles que l'Agence française de développement (AFD). Ces actions sont des éléments essentiels pour assurer l'acceptabilité de la présence des forces par les populations locales. Nous travaillons donc activement à la préparation de la phase d'après, c'est-à-dire à la programmation des interventions d'opérateurs comme l'AFD, à un moment où les forces françaises seront présentes pour assurer la sécurité des personnels de ces agences.

Il y a quelques semaines, nous avons réuni les opérateurs du développement et les états-majors au Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO). L'idée est de coordonner et d'articuler ces actions afin de ne pas laisser les opérateurs du développement opérer isolément et de s'assurer que les projets débuteront le plus tôt possible. C'est un élément essentiel pour couper l'herbe sous le pied des terroristes et de tous ceux qui font vivre les populations locales dans la terreur, en profitant de l'absence de ressources, d'éducation, d'accès aux moyens de survie essentiels. C'est cela qu'il faut attaquer à la racine.

Est-ce que des interlocuteurs crédibles émergent ? La question est un peu prématurée, et tellement vaste ! Il faudrait que nous énumérions les pays, les uns après les autres. Ce qui est certain, c'est que ceux qui se sont installés par la force ne peuvent pas devenir des interlocuteurs légitimes. La légitimité se forge à travers la présence de l'État, garante de la capacité à organiser des élections démocratiques d'où pourront, je l'espère, émerger des interlocuteurs crédibles. Ces pays, en tout cas le Mali, en ont particulièrement besoin.

L'APNM Marine souhaite que l'ancien hôpital militaire du Val-de-Grâce puisse devenir le cadre de différentes actions, toutes très utiles, qui bénéficieraient aux marins mais aussi à tous les militaires. Tout cela serait merveilleux, bel et bon, si des ressources exceptionnelles n'étaient pas attendues de la vente de la partie moderne de cet hôpital, actée dans une loi de programmation précédente. Si nous allions dans le sens souhaité par cette APNM, nous nous priverions d'une somme qui, à mes yeux, doit rester très élevée. C'est la raison pour laquelle, à titre personnel, je ne suis pas favorable à ce que cet ex-hôpital militaire accueille des structures d'hébergement publiques. Si cela devait être le cas, je préférerais, de loin, qu'il reste dans le giron du ministère.

Le Gouvernement envisage plutôt une cession qui satisfasse ses attentes budgétaires, sans négliger d'étudier les demandes tout à fait légitimes de l'APNM Marine en matière d'augmentation de la capacité d'hébergement des militaires, en particulier en région parisienne. Les militaires qui participent à l'opération Sentinelle, notamment, doivent pouvoir être hébergés à proximité de leurs lieux d'intervention. Nous y travaillons mais, en toute franchise, Monsieur Marilossian, je ne pense pas que nous pourrons accéder à cette demande, telle qu'elle est formulée, de l'APNM Marine.

Monsieur Trompille, vous vous inquiétez du fait que les articles du projet de LPM ne mentionnent pas le spatial et qu'il faille ouvrir le rapport annexé pour trouver les éléments relatifs à ce domaine.

Tout d'abord, j'indique que ces éléments sont extrêmement substantiels, et qu'ils témoignent d'un effort particulier en faveur de la modernisation de nos capacités de surveillance et de connaissance de la situation spatiale. La LPM prévoit de rénover les moyens de surveillance des orbites basses existants– les radars Graves et Satam – et de consacrer 600 millions d'euros à des études sur la modernisation future de la capacité de surveillance dans le cadre du Système de commandement et de conduite des opérations aérospatiales (SCCOA 5). Elle envisage des coopérations dans le domaine de la surveillance et le développement des capacités pour mener des opérations. Pour ce faire, il est prévu une augmentation d'un tiers des effectifs du commandement interarmées de l'espace et un quasi-doublement des effectifs affectés à la surveillance spatiale. En d'autres termes, toutes nos capacités spatiales vont être rénovées dans le cadre de cette LPM.

Pourquoi ces dispositions se trouvent-elles dans le rapport annexé ? Comme pour n'importe quel autre texte de loi, les articles de la LPM renvoient à des dispositions à caractère normatif. Le rapport annexé n'est pas pour autant un document de seconde zone ; il a la même valeur que les articles de la loi. Lorsqu'il s'agit de prévoir un congé pour convenance personnelle, il faut décrire un dispositif législatif et normatif qui va se retrouver dans la deuxième partie du projet de loi. En revanche, la description des investissements ou des renouvellements de matériel figure dans le rapport annexé, pour le spatial comme pour le reste. Cela ne signifie pas que ces informations sont moins prioritaires que celles qui figurent dans les articles de loi.

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