L'École de guerre ne compte pas non plus de corps professoral dédié. En revanche, une équipe pédagogique est chargée de concevoir l'enseignement, c'est-à-dire de fixer les objectifs, de poser les bonnes questions et d'identifier les meilleurs intervenants possibles pour y répondre. Ainsi, les aspects opérationnels sont traités par des officiers de l'état-major des armées, ou de généraux revenant des théâtres d'opération ou, plus largement, de ce que j'appellerai les têtes de chaînes du ministère des Armées pour réfléchir aux questions touchant à la conception des capacités. De ce point de vue, les modalités d'enseignement sont relativement proches de celles mises en oeuvre au CHEM. En revanche, nous nous distinguons davantage s'agissant des modules plus spécifiques. À titre d'exemple, lorsque nous abordons le module relatif à l'art de convaincre, nous recourrons à des professionnels de la scène ou des avocats. Récemment, un module consacré à l'improvisation à l'oral a été l'occasion de solliciter des professionnels de la danse, du théâtre, de la musique, afin de placer nos stagiaires hors de leur zone de confort et de tester leur manière de réagir. Vous avez donc parfaitement raison d'évoquer le concept de « out of the box » car c'est vraiment ce qui nous guide pour tester la capacité des officiers à sortir des rails sur lesquels ils ont passé les quinze premières années de leur vie militaire. S'agissant de l'enseignement des matières plus académiques comme l'histoire, la géopolitique ou la stratégie, nous faisons appel à des professeurs des universités avec lesquelles nous avons noué des partenariats, mais également à l'IRSEM, dont le cahier des charges prévoit la dispense d'un enseignement au profit de l'École de guerre. Dans ce contexte, l'Institut de stratégie comparée, présidé par le professeur Georges-Henri Soutou, nous accompagne dans la définition de nos besoins concernant l'enseignement académique.
J'aimerais également dire un mot de l'enseignement de l'anglais, qui constitue un axe fort de notre scolarité. En effet, nos opérations sont essentiellement conduites en anglais, à l'exception notable de celles qui se déroulent dans la bande sahélo-saharienne. L'efficacité opérationnelle suppose donc la maîtrise de l'anglais et la totalité des officiers français suivent un enseignement en anglais, dont le niveau est équivalent à celui requis pour réussir le Test of English for International Communication (TOEIC). Il s'agit de rendre nos officiers capables d'interagir et d'évoluer dans un environnement anglo-saxon. Au-delà, nous avons mis en place trois équipes, composées de ceux qui sont le plus à l'aise dans la langue, dédiées au débat, à la rédaction de mémoire et au networking à l'anglo-saxonne. Je tiens à vous indiquer que notre équipe de débat a affronté et vaincu, il y a quelques semaines, les équipes d'Harvard, de Yale ou encore de Columbia University. Notre équipe a également battu son homologue de l'École de guerre britannique de Shrivenham. La qualité de cet enseignement est remarquable. De même, notre équipe chargée de la rédaction de mémoires a récemment exposé ses travaux au Département d'État américain, qui les a sélectionnés en vue d'une présentation au Congrès. Une telle reconnaissance témoigne, une fois encore, de la qualité des travaux de nos stagiaires. Un certain nombre d'entre eux seront publiés en anglais afin de pallier la faible visibilité de la France sur la scène internationale s'agissant des travaux de recherche dans ce domaine.
Pour conclure, l'informatique. Aujourd'hui, nous l'abordons essentiellement sous l'angle de la cyber-sécurité. À compter de l'an prochain, nous essaierons de davantage évoquer la liberté que représente le monde cyber. Dans ce cadre, nous avons noué un partenariat avec HEC et l'École 42 afin d'intégrer une quinzaine de nos stagiaires à un module de préparation à la création d'une start-up. Ce monde nous est, il est vrai, assez étranger ; il nous faut absolument le comprendre et le maîtriser.