Intervention de Philippe Nicollet

Réunion du lundi 28 mai 2018 à 15h00
Commission d'enquête chargée de tirer les enseignements de l'affaire lactalis et d'étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information, de la production à la distribution, et l'effectivité des décisions publiques

Philippe Nicollet, président de l'Association française des directeurs et cadres de laboratoires vétérinaires publics d'analyses (ADILVA) :

Au sens épidémiologique, certainement pas.

Le troisième critère sur lequel reposent ces agréments, c'est l'indépendance. Cette exigence se comprend d'autant mieux dans le cas des laboratoires agréés que les donneurs d'ordres sont les autorités sanitaires, qui paient également les analyses. On comprend aisément que les laboratoires départementaux n'ont pas de difficultés éthiques à renvoyer le résultat de l'analyse aux demandeurs, et également à celui qui paie l'analyse.

Concrètement, cela se traduit pour les laboratoires départementaux d'analyses dans le domaine de la sécurité sanitaire alimentaire par deux grands volets, qui ont déjà été évoqués lors des auditions précédentes.

Les plans de surveillance et plans de contrôle (PSPC) ont été évoqués par mes collègues du SNISPV. Il s'agit de prélèvements officiels réalisés par les agents de l'État, et non par l'exploitant. C'est une surveillance nationale dont les résultats sont publics. Sur le site de la DGAL, on peut trouver le rapport 2016 qui indique que le ministère a consacré 12 millions d'euros cette année à ces PSPC, ce qui représente 600 000 prélèvements.

Mais en réalité, si on lit dans le détail le texte qui accompagne ce rapport, seulement 9 % de ces 600 000 prélèvements concernent les analyses microbiologiques. Et parmi ces 9 %, 6 % concernent l'antibiorésistance. Aujourd'hui, en médecine humaine et animale, le problème des souches résistantes aux antibiotiques menace leur efficacité, et à fort juste titre, le ministère s'intéresse à cette question. Cette surveillance s'intègre dans les PSPC, donc il reste pour les salmonelles et autres Escherichia coli 3 % des échantillons par an. Cela représente à peu près dix-huit analyses par an et par département dans chacun des cent départements français pour lesquels nous exerçons une surveillance microbiologique, autant dire pas grand-chose.

Évidemment, les PSPC ne peuvent pas garantir une quelconque sécurité sanitaire alimentaire dans le domaine des autocontrôles. Ce n'est d'ailleurs pas complètement leur objectif, puisqu'ils ont une visée épidémiologique, et qu'ils sont une manière de garantir à nos voisins européens que l'État exerce une surveillance, qu'il a un regard national sur l'ensemble des risques microbiologiques mais aussi, c'est ce qui pèse très lourd dans les plans de contrôle, les risques chimiques ou de contaminants type anabolisants ou métaux lourds dans les aliments.

Le second volet, au-delà de ces PSPC, concerne les toxi-infections alimentaires collectives (TIAC), pour lesquelles nous intervenons en tant que laboratoire agréé quand il y a une intoxication, à la demande de l'agence régionale de santé (ARS) ou des services vétérinaires. Dans cette situation, évidemment, nous intervenons après la bataille, et ça ne vous est pas très utile pour les actions préventives d'autocontrôle. Je précise que cela représente un volume tout à fait minoritaire de nos échantillons, j'ai interrogé plusieurs laboratoires, les analyses de recherche de TIAC représentent moins de 0,5 % des échantillons. Dans mon laboratoire, sur 20 000 échantillons alimentaires, seuls quinze portaient sur des cas de TIAC. On peut s'en féliciter, bien entendu, mais cela ne permet pas de se prévaloir d'une quelconque surveillance de produits alimentaires.

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