Intervention de Jean-Marc Nollet

Réunion du jeudi 19 avril 2018 à 9h00
Commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Jean-Marc Nollet, président du groupe écologiste à la Chambre des représentants du Parlement fédéral belge :

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir convié à cet important échange sur la sûreté et la sécurité nucléaires.

Vous me permettrez dans un premier temps de préciser d'où je parle.

Je suis député belge, chef du groupe écologiste au Parlement fédéral belge. En Belgique, le nucléaire est de compétence fédérale. Il faut le préciser dans la mesure où la Belgique est un État fédéré, composé de régions et de communautés. Le nucléaire est de la compétence exclusive du Gouvernement et du Parlement fédéral. Au Parlement, le travail est réparti entre trois commissions : la commission de l'économie, la commission de l'intérieur et la commission de sécurité nucléaire. Je suis membre de ces trois commissions, ce qui me permet d'avoir une vue globale de l'ensemble des enjeux relatifs au nucléaire.

La commission de l'économie s'occupe des choix de politique énergétique, tels que la prolongation des centrales nucléaires ou la sortie du nucléaire en 2025.

La commission de l'intérieur se consacre à la question de la sécurité et de la sûreté en interrogeant régulièrement le ministre de l'Intérieur, en charge non pas de la politique énergétique, mais de la politique de sécurité et de sûreté.

Au sein du parlement belge, la commission de sécurité nucléaire est plus particulièrement chargée de travailler en profondeur différents problèmes liés à la sécurité. Elle ne contrôle pas au jour le jour l'action du Gouvernement mais prend en compte les faits qui se produisent en s'attachant à en déterminer les causes. Il s'agit d'un comité restreint, où siège un député de chaque groupe parlementaire, gage d'une plus grande efficacité. Cette commission travaille également à huis clos. Elle auditionne de nombreuses personnes, elle ne possède pas les pouvoirs d'une commission d'enquête, elle est permanente. Sous la présente législature qui a débuté en 2014, la commission a beaucoup travaillé en raison du nombre élevé d'incidents, de problèmes, voire de menaces en lien avec les volets sécurité et sûreté, qui se sont produits.

Avant de survoler les différents enjeux, je voudrais rappeler la réalité du nucléaire belge. Ce sont quatre sites : deux centres de recherche – l'un au nord, l'autre au sud du pays – et deux centres, l'un comprenant quatre réacteurs, à Doel, au nord du pays, près d'Anvers ; l'autre comptant trois réacteurs au sud, à Tihange, à proximité de Liège. Sur ces sept réacteurs, trois sont obsolètes – ils ont dépassé la date pour laquelle ils avaient initialement été construits –, deux sont fissurés et un réacteur a été saboté.

Je ne referai pas le débat sur la prolongation des centrales dans mon introduction. Je tirerai toutefois deux leçons des débats qui ont eu lieu dans le cadre de la commission de l'économie du parlement belge.

D'une part, l'année 2025 est désormais confirmée, bétonnée, consolidée comme étant la date de sortie du nucléaire en Belgique. C'est un enjeu, dans la mesure où le nucléaire représente 50 % de la production et de la consommation électriques. La loi votée en 2003 indiquait déjà l'échéance de 2025. Elle a été questionnée à plusieurs reprises, mais jamais une majorité ne s'est dégagée pour la remettre en cause.

Au sein du Parlement fédéral belge, neuf groupes politiques sur dix sont favorables à la sortie du nucléaire, un seul ne l'est pas. Dans le cadre de l'alliance gouvernementale, ce dernier a accepté de ne pas changer la loi. De toute façon, étant isolé, il n'aurait pas eu la majorité pour modifier la loi, puisque c'est bien la loi qui précise que la sortie nucléaire a lieu en 2025. Il y a quinze jours, juste avant Pâques, le Gouvernement actuel, qui a fait alliance avec ce parti initialement opposé à la sortie du nucléaire en 2025, a consolidé le principe figurant dans la loi par un pacte énergétique qui dessine les lignes précises de la transition énergétique : le volet de la sortie du nucléaire ainsi que le respect de l'Accord de Paris.

Je tire une seconde leçon de ce débat sur la loi de prolongation partielle. Auparavant, je rappelle que sur les trois réacteurs évoqués, tous n'ont pas été prolongés en 2015. Tihange 1 a été prolongée en 2013, les deux autres centrales ont fait l'objet de deux décisions, prises à la va-vite, en 2015. Je retiens que l'Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN), l'équivalent de l'Autorité de sécurité nucléaire (ASN) en France, s'est laissé influencer par la situation économique et par la situation politique. Si vous êtes intéressés, je pourrais vous le démontrer au cours de nos échanges. L'AFCN s'est laissé influencer en bradant et en réduisant les exigences qu'elle avait elle-même initialement fixées à un moment où les opérateurs, avant 2010, disposaient de plusieurs années pour mettre en oeuvre les modifications nécessaires et garantir la sécurité au-delà de la période de prolongation.

Sous la pression du politique, la décision prise pour deux centrales a été précipitée. Des travaux qui auraient dû être réalisés avant la période de prolongation l'ont été après et des exigences qui avaient été initialement posées ont été revues à la baisse sur instructions politiques et pour répondre à des enjeux économiques afin que les prolongations puissent avoir lieu.

Parallèlement à cette question de la prolongation, les parlementaires ont été largement occupés, notamment dans le cadre de la commission de sécurité nucléaire, par les questions relatives à la sûreté portant sur l'état des cuves des réacteurs de Doel 3 et de Tihange 2. Ces réacteurs ont été mis en service en 1982 et en 1983.

À la suite de la découverte de fissures, des défauts sous revêtement (DSR), dans la centrale française nucléaire du Tricastin, toutes les centrales belges ont fait l'objet d'un contrôle caméra pour déterminer si des défauts similaires n'existaient pas dans les centrales belges. À cette occasion, la centrale de Doel 3, le 2 juin 2012, a été mise à l'arrêt car le contrôle caméra a révélé 8 062 fissures. Je les appelle « fissures », il s'agit de bulles d'hydrogène dans l'acier. En 2012, ces fissures revêtaient une taille moyenne de 9,6 millimètres, la plus grande d'entre elles mesurant 6,7 centimètres. Un même contrôle a été effectué sur la centrale de Tihange 2. Le 13 septembre, on y découvre 2012 fissures, d'une taille moyenne d'un centimètre et d'une taille maximale de 3,6 centimètres. Les centrales ont alors été fermées immédiatement pour des contrôles approfondis.

L'Agence belge a cédé alors à certaines pressions économiques. Les journaux expliquaient que l'arrêt des centrales représentait mensuellement une perte de bénéfices de 40 millions d'euros et jouait de manière pesante sur la rentabilité. Engie est en grande partie propriétaire des centrales belges. En Belgique, on parle d'Electrabel parce que, historiquement, cette entreprise est antérieure à la maison mère Engie. Les deux centrales ont été fermées mais, après des tests, le 17 mai 2013, elles ont été rouvertes. L'Agence fédérale de contrôle nucléaire, par la voix de son président, a assuré qu'à 101 % les centrales ne constituaient ni risque ni menace. Cette phrase m'avait particulièrement frappé, car nous savions qu'une série de tests avaient produit des résultats si peu probants que l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), le bras armé de votre ASN, avait écrit pour envoyer un signal à notre agence de contrôle au mois de décembre 2012, indiquant que sur la base de tels résultats et des informations dont on disposait, la France n'aurait pas envisagé de rouvrir les centrales en question. Je dispose ici de la lettre. En dépit de cet avis, l'Agence belge a rouvert les centrales. Les tests qui ont suivi ont donné d'autres résultats. À Doel 3, on est passé de 8 000 à 13 000 fissures, la taille maximale n'étant plus de 6,7 centimètres, mais de 17,9 centimètres. Imaginez la réaction des citoyens informés de cette évolution des fissures ! Les centrales ont été refermées en urgence en mars 2014 alors que l'Agence expliquait en 2013 qu'elle se disait certaine à 101 % de leur fiabilité. Je veux ici mettre en exergue le fait que l'Agence a failli à sa mission et a cédé à la pression économique. C'est un exemple parmi d'autres car nous avons eu à connaître beaucoup d'incidents, certes de moindre importance.

Au cours des années 2014, 2015, 2016, nous avons constaté au sein de l'état-major de l'opérateur une baisse de la culture de sûreté, c'est-à-dire du titre des différentes interventions en commission de sûreté et sécurité nucléaires de l'Agence. Cela a conduit l'Agence fédérale à déposer des pro justitia auprès du Parquet et à écrire une lettre comminatoire à Mme Isabelle Kocher, directrice générale d'Engie, à Paris. De son côté, la commission de sécurité nucléaire a convoqué Mme Kocher pour évoquer les éléments relevés dans la lettre envoyée par l'Agence de contrôle nucléaire.

La Belgique sortira du nucléaire en 2025. Les centrales fermant, le risque est grand que la question de la sûreté et de la sécurité s'étiole, que les investissements nécessaires ne soient plus réalisés et que, donc, les incidents ne soient plus gérés de façon adéquate. Un des points identifiés dans la lettre de l'Agence fédérale de contrôle nucléaire réside notamment dans le manque de personnels sur certaines fonctions d'importance. J'éprouve cette crainte, d'autant que la sortie du nucléaire a été confirmée et qu'un travail de suivi devrait être assuré. Cette crainte porte au-delà de 2025 pour la question des déchets. La situation de la Belgique est un peu unique en Europe. Les provisions réalisées pour le démantèlement sont insuffisantes ; il manque 20 milliards d'euros. Celles-ci sont entre les mains d'une entreprise dont le siège est à l'étranger et dont l'actionnaire est un autre État. L'argent que les consommateurs belges versent en prévision de la gestion de leurs déchets, même si les provisions sont insuffisantes, est placé et utilisé ailleurs. Si une faillite ou des problèmes économiques devaient advenir – nous savons qu'il y a beaucoup de problèmes dans ce secteur – la Belgique risquerait d'être confrontée à de graves difficultés. Un travail législatif est en cours pour renforcer le cadre de la sécurité des placements de la Commission des provisions nucléaires. L'enjeu porte sur plusieurs milliards d'euros.

Sur le volet financier comme sur celui de la sécurité, le nucléaire n'a pas de frontières. Si un problème devait survenir à Doel 3 ou à Tihange 2, la France en subirait les conséquences. Les nuages radioactifs ne s'arrêtent pas aux frontières. Vous vous souvenez tous de cette allusion, qui nous a été rappelée à l'occasion de la commémoration du 25e anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl. Comme on peut le voir dans les archives de France 2 de l'INA, Noël Mamère mettait en cause ceux qui déclaraient que le nuage radioactif n'avait pas franchi nos frontières et qu'il n'y avait pas de danger.

Il y a interaction. Vous avez le droit et le devoir – et vous le faites – d'interroger un pays voisin sur la situation de ses centrales nucléaires. À l'inverse, je me dois de vous faire part de certaines préoccupations sur les centrales françaises situées à notre frontière. La centrale française de Chooz est enclavée dans le territoire belge. Le réacteur, encore en fonction, est l'un des plus récents. Citons également la centrale de Cattenom, dont s'occupent nos amis luxembourgeois. Je pointerai encore la centrale de Gravelines, située à proximité du territoire belge. Il s'agit de l'une des plus grandes centrales européennes, non pas la plus grande cependant, avec accès possible aux piscines par des avions, dans un secteur où beaucoup de nos concitoyens passent leurs vacances. En Belgique, grâce au travail de la commission de sécurité nucléaire, tous les Belges, quel que soit le lieu où ils habitent sur le territoire, peuvent avoir accès gratuitement à des comprimés d'iode payés par Engie. Toujours est-il qu'un accident peut se produire d'autant que ces centrales avoisinent les quarante ans. Nous étudions avec attention les 14 sites Seveso autour de la centrale, de même que nous suivons le débat sur la prolongation des centrales françaises, la France restant un des seuls pays européens à utiliser le nucléaire.

Je ne vous cache pas que nous portons un regard attentif au réacteur EPR de Flamanville, qui a connu de multiples déboires. Je pense aux défauts de la cuve. Je ne peux m'empêcher de procéder à des comparaisons avec Doel 3 et Tihange 2. Les malfaçons avérées de l'usine du Creusot ne sont pas faites pour nous rassurer. Tout cela pour dire que sur les centrales nucléaires, des décisions peuvent être prises de manière conjointe, en tout cas, la transparence doit être renforcée.

Nos travaux portant sur le volet sécurité ont également été très chargés. Sans doute êtes-vous informés que des personnes liées aux attentats de Paris en novembre 2015 et de Bruxelles en mars 2016 étaient également impliquées dans un acte d'espionnage grave d'un haut responsable du centre nucléaire de Mol.

Deux terroristes se sont fait exploser, l'un à l'aéroport belge de Zaventem, l'autre à la station de métro Maelbeek. Ils avaient préalablement récupéré une caméra placée devant le domicile du haut responsable du centre nucléaire. Contrairement à ce que j'ai pu lire dans la presse, ils n'avaient pas l'intention de faire sauter une centrale nucléaire, mais de voler du combustible nucléaire et de l'incorporer dans une bombe conventionnelle pour provoquer des dégâts d'une tout autre ampleur que ceux que nous avons connus. Ils n'ont pu accomplir leur dessein car ils ont été pressés dans leur action terroriste en Belgique, certains de leurs complices ayant été découverts. Ils sont donc passés à l'action sans avoir pu utiliser de matériel nucléaire. Toujours est-il que le risque est bien celui-là et que la menace d'une bombe est réelle. Depuis qu'Abdeslam a été repéré à Forest, des militaires armés assurent une présence dans les installations nucléaires belges, ce qui n'était pas le cas avant.

Le sabotage de Doel 4 a grandement occupé la commission de sécurité nucléaire. Le 5 août 2014, une personne interne à la centrale, dans un acte délibéré de sabotage, a ouvert une vanne. C'est ainsi que les 65 000 litres d'huile de lubrification que contenait le générateur de vapeur ont été évacués d'un coup. La turbine a continué de tourner à sec pendant trente ou quarante minutes. À 3 000 tours minute, elle est sortie de son axe. Elle aurait pu se transformer en projectile contre la partie nucléaire, avec tous les risques que l'on peut imaginer. Heureusement, cela n'a pas été le cas. Toujours est-il que cet acte de sabotage n'est toujours pas élucidé. Nous ne savons toujours pas qui en est l'auteur. Les responsables de l'Agence fédérale qui, dans un premier temps, déclaraient – j'en ai des traces dans les comptes rendus du conseil d'administration de l'Agence – ne pouvoir envisager rouvrir ce réacteur sans connaître l'auteur de cet acte et ses mobiles ont pourtant fini par décider sa réouverture.

La centrale a également été confrontée à des djihadistes que l'on a retrouvés ensuite en Syrie, dont l'un est décédé. Des plans de la centrale nucléaire ont circulé sur le dark net. La cybermenace est incontestable. Je me suis procuré un audit qui avait été réalisé en interne, dont l'Agence fédérale ne disposait pas. Considérant que les faits étaient trop importants, une personne de la centrale a estimé qu'elle devait m'en informer. Cet audit fait état de nombreuses défaillances dans le système de cyberprotection de nos centrales nucléaires. Lorsque je relis cela à la lumière des déclarations du coordinateur européen de la lutte antiterroriste qui prédit, dans les cinq années à venir, une cyberattaque des centrales nucléaires, quand je vois que des opérateurs russes ont déjà tenté d'intervenir dans les systèmes informatiques des centrales nucléaires américaines et européennes, je me dis que la menace est réelle et que la cyberprotection doit être renforcée. La Belgique est notée à 0 sur 100 en matière de cyberprotection des centrales nucléaires par la Nuclear Threat Initiative (NTI). Ce dont je vous parle n'est pas une simple menace, ce sont des faits avérés que nous avons dû gérer en commission sécurité et sûreté nucléaires.

Entre le volet sûreté et le volet sécurité, la ligne de défense de ceux qui gèrent ces dossiers est toujours la même. La première ligne de défense consiste à vivre dans la culture du secret absolu. C'est l'omerta. Moins on en parle, mieux c'est, ce qui, évidemment, est faux. La seconde ligne de défense passe par le déni. Lorsque nous parvenons à produire des éléments, tels que l'audit sur la cybersécurité défaillante, les responsables sont dans le déni, arguant que les éléments défaillants ont été réparés, que tout va bien. La troisième ligne de défense reste la minimisation, l'aseptisation : les termes utilisés sont toujours les mêmes, ils visent à rassurer, les problèmes se limitent toujours, selon eux, à la partie non nucléaire. « Que l'on se rassure ! » Et pour preuve, « il n'y a pas eu de conséquences », si ce n'est qu'il aurait pu s'en produire ! Ils ajoutent que l'amélioration est continue. Nous avons même entendu un ancien directeur général de l'AFCN déclarer que si un avion devait s'écraser sur le réacteur d'une centrale nucléaire, cela n'engendrerait pas plus de dégâts qu'une banane tombant sur un bureau. Je vous parle bien du directeur général de l'Agence fédérale de contrôle nucléaire belge ! Il faut dire qu'il a fait sa carrière à la centrale nucléaire de Doel.

Son successeur venait également de Doel – le milieu est fermé. En France, je crois qu'il est moins hermétique, mais en Belgique la consanguinité est malsaine. Le directeur qui termine son mandat au mois de mai a déclaré que les éoliennes étaient plus dangereuses que les centrales nucléaires. Tout est dit !

Cette culture du secret, cette omerta, ne protège que les apparences, non les installations. L'enjeu n'est pas de savoir si l'on est pour ou contre le nucléaire. Ma position est connue. Je l'ai rappelée dans le cadre du débat sur la prolongation. La question qui doit tous nous réunir est de savoir comment nous protéger au mieux tant que nous utilisons le nucléaire. Ce sont là deux débats totalement différents. C'est pourquoi la constitution de deux commissions en Belgique pour étudier ces deux aspects de la question est très saine, à la fois la politique énergétique qui comprend le nucléaire et le volet sûreté et sécurité.

Cette situation ne protège pas les installations, elle ne protège que les apparences. Vous l'avez peut-être vu dans le documentaire d'Éric Guéret et Laure Noualhat auquel vous avez fait référence, monsieur le président. Quand j'ai interrogé le ministre de l'intérieur sur les types d'avions qui ont été testés pour mesurer la vulnérabilité des centrales, il a refusé de me dire avec quel modèle d'avion les tests de résistance avaient été réalisés et de me donner la vitesse à laquelle ces avions ont été testés. Cette omerta ne sert à rien puisque, en travaillant avec les services de documentation du parlement belge qui sont très efficaces et en remontant dans les archives, j'ai retrouvé les renseignements que le ministre de l'intérieur refusait de me livrer sur le type d'avion et la vitesse utilisés.

Je puis vous affirmer aujourd'hui que nos trois plus anciennes centrales – mais je pourrais vous livrer également des éléments sur les centrales les plus récentes – ne sont pas en mesure de résister à une chute d'avion intentionnelle, des avions du type de ceux qui sont actuellement basés à Liège, à quelques kilomètres de la centrale de Tihange. C'est une vérité inadmissible pour le secteur. Elle relève de la culture du secret.

Je vous recommande d'aller au fond des choses. La question n'est pas de savoir si l'on est pour ou contre le nucléaire. Je ne chercherai pas à convaincre sur ce sujet ; en revanche, j'essayerai de convaincre sur la nécessité de renforcer la protection, en tout cas en Belgique. Je ne me le permettrais pas pour la France, sauf pour les centrales situées aux frontières que j'ai évoquées.

S'il y a bien une matière où la tolérance doit être identifiée à zéro, c'est bien celle de la sécurité et de la sûreté nucléaires. Demandez des tests, des analyses universitaires indépendantes, des contre-expertises et accédez à l'ensemble des résultats. Lorsque nous avons abordé la question des fissures dans les centrales, l'Agence et les parlementaires n'ont eu accès qu'à une partie des résultats, ceux que l'opérateur a bien voulu livrer. Il a réalisé des tests auxquels nous n'avons pas eu accès et qui sont probablement négatifs. La commission d'enquête qui vous réunit est une opportunité historique, me semble-t-il, pour aller au fond des choses. Nous sommes, vous comme moi, des parlementaires. Vos concitoyens n'accepteraient pas que vous restiez au milieu du gué.

Je reste à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

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