Intervention de Hervé Morin

Réunion du mardi 15 mai 2018 à 18h15
Commission des affaires sociales

Hervé Morin, président de Régions de France :

Nous réduisons nos fonds propres de 30 millions d'euros chaque année. Notre situation est donc de plus en plus compliquée et nous sommes contraints de ne pas augmenter de plus de 1,2 % les dépenses des régions. Encore une fois, nous ne faisons pas de chantage. Nous allons simplement adapter notre niveau d'investissement aux crédits qui nous seront accordés.

Pour répondre à madame la rapporteure, nous sommes très favorables aux campus des métiers que, d'ailleurs, nous développons. Mais nous ne pouvons les organiser que grâce à l'intervention de la région pour piloter l'opération aux côtés de l'État. Désormais, nous ne travaillerons plus ensemble.

Vous avez évoqué la mutualisation des plateaux techniques, mais dès lors que les régions ne piloteront plus l'apprentissage, pourquoi voudriez-vous qu'un lycée professionnel ouvre son plateau technique à une branche professionnelle, compte tenu des confrontations idéologiques qui peuvent exister entre eux ? Nous avons expliqué à Muriel Pénicaud qu'il fallait un pilotage administratif de la formation professionnelle pour pouvoir imposer aux recteurs cette mutualisation.

J'en viens à la question des demandeurs d'emploi. Le Parlement a certes voté un budget considérable pour financer le plan d'investissement dans les compétences. Cependant, bien que, dans tous les domaines de l'activité économique, nous ayons le plus grand mal – malgré un chômage de masse – à trouver les qualifications et les compétences dont les entreprises ont besoin – voire tout simplement de la main-d'oeuvre –, les formations que nous ouvrons pour les demandeurs d'emploi ne sont remplies qu'à moins de 50 %. Avant même de mettre en application le plan d'investissement dans les compétences, nous avons donc la plus grande difficulté à trouver des demandeurs d'emploi pour suivre les formations que nous ouvrons. Nous avons donc dit à la ministre du travail qu'il était temps que les régions pilotent en totalité la politique de l'emploi.

Entendons-nous bien : il ne s'agit pas de régionaliser Pôle Emploi, mais de faire en sorte que les politiques de retour à l'emploi soient menées par les régions et que Pôle Emploi soit maître d'oeuvre de ces politiques. Nous sommes très démunis puisque les deux principaux opérateurs de ces politiques sont les missions locales qui, dans le meilleur des cas, dépendent d'un élu et dont la gestion est très diverse – certaines faisant leur boulot, d'autres ayant des progrès considérables à faire – et Pôle Emploi. Il nous arrive d'ouvrir des formations dans des bassins d'emploi où le niveau de chômage est entre 9 % et 10 %, après avoir dialogué avec les branches et le monde de l'économie, et de nous retrouver avec personne pour suivre ces formations. Dans un bassin d'emploi industrialisé comme celui de Cherbourg, nous ouvrons dix-sept postes de tuyauteurs et nous nous retrouvons avec deux personnes pour commencer la formation. Quand nous organisons un job dating à Cherbourg avec 500 contrats de travail ou d'apprentissage, 70 personnes viennent nous rendre visite dans la journée. Si l'on reste dans un système où on se contente d'envoyer des SMS et des e-mails pour faire venir des demandeurs d'emploi, cela ne marchera pas. On a besoin d'un nouveau pilotage des politiques de l'emploi – question qui n'est pas traitée dans le texte qui vous est soumis. Aujourd'hui, le pilotage est double, voire triple : les formations sont financées soit par la région, soit par Pôle Emploi, soit parfois par des organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage (OCTA). Au lieu d'instaurer un pilotage unique, que nous souhaitions prendre en main compte tenu de nos compétences dans le champ de la formation, de la gestion des lycées et de l'économie pour permettre aux demandeurs d'emploi de revenir sur le marché du travail, on a décidé de maintenir le système. Si on avait été courageux, on aurait aussi réformé l'assurance chômage en resserrant les boulons.

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