Intervention de Pierre Dharréville

Réunion du mardi 29 mai 2018 à 16h25
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

L'article 1er modifie en profondeur le CPF tout en supprimant le congé individuel de formation (CIF). Selon vos propres termes, la formation doit devenir l'arme antichômage. Rappelons-le, la formation ne saurait suffire à créer de l'emploi pour les 5 ou 6 millions de chômeurs que compte notre pays.

Cet article est emblématique de la logique de votre réforme de la formation professionnelle. Nous y sommes donc opposés pour plusieurs raisons.

D'abord, le CPF en euros consistera à mettre à disposition des travailleurs un chèque formation inspiré du dispositif existant en Allemagne depuis les « réformes Hartz » de 2001, dont on connaît les résultats. Ce système va se traduire par une réduction du nombre d'heures de formation pour les personnes, en comparaison avec le CPF en heures, tout en laissant craindre une logique de formation low cost pour s'adapter au montant du chèque comptabilisé par les personnes. À défaut d'avoir des crédits suffisants, les personnes qui en ont les moyens – souvent les plus qualifiées – devront compléter l'enveloppe avec leurs propres deniers.

Nous regrettons également la suppression du CIF au nom d'une prétendue simplification. C'est le seul outil à la main du salarié pour se former sans l'accord de son employeur et il bénéficie d'un financement propre. Le CPF transition, qui doit le remplacer, n'accordera pas le même niveau de droit à la formation. Rappelons que le CIF correspond à 1 200 heures ou à un an de formation à temps plein. Ces nouvelles mesures contribueront à maintenir les inégalités d'accès à la formation que la réforme prétend combattre, sans rechercher l'élévation globale du niveau de formation dans notre pays pour faire face aux défis de notre économie.

Plus généralement, nous sommes opposés à la logique sous-jacente : une hyperindividualisation des droits qui renvoie à l'individu la responsabilité de son employabilité sur le marché du travail. À l'inverse, nous pensons que le CPF et l'accès à la formation des actifs doivent s'inscrire dans le cadre d'un grand service public de la formation et de l'accompagnement et d'une sécurité sociale professionnelle, d'une sécurité de l'emploi et de la formation où les droits individuels sont garantis collectivement.

Comme nous ne retrouvons pas ces éléments dans la réforme, nous demandons la suppression de cet article.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.