Intervention de étienne Wurtz

Réunion du mercredi 26 juillet 2017 à 17h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

étienne Wurtz, directeur de recherche, Laboratoire d'énergétique du bâtiment, Institut national de l'énergie solaire, INES, CEA :

Pour éclairer le débat, j'ai choisi de m'appuyer sur certaines innovations technologiques très concrètes développées au sein du service bâtiment du CEA-INES, sachant qu'une des réponses aux questions qu'on s'est posées peut être la propriété intellectuelle qui peut protéger les acteurs dont nous avons parlé.

En préambule, je voudrais d'abord dire que considérant la légitimité du CSTB à traiter les problématiques du bâtiment et celle du CEA en regard des enjeux énergétiques, il nous paraît intéressant de poursuivre un rapprochement entre ces deux instituts qui s'appuient tous deux sur des partenariats forts avec les organismes académiques dans un domaine qui, bien qu'ils représentent près de la moitié de la consommation énergétique, est délaissé par le milieu scientifique en France. Les derniers irréductibles chercheurs académiques sur le sujet sont donc très inquiets pour l'avenir de la thématique et se sentent très peu soutenus par leurs tutelles. Plutôt que de s'apitoyer sur ces perspectives un peu sombres, je vais essayer d'éclairer ces débats d'initiatives prometteuses.

Les premiers travaux que je voudrais mettre en avant, concerne la nécessité de la sobriété et qui passe avant tout pour moi par l'isolation et nous avons donc engagé d'importants travaux avec une filiale de l'entreprise PCAS pour proposer des solutions d'isolation par des super-isolants à base d'aérogel, qui peuvent être soit projetés comme des enduits sur les façades soit mis en place directement sous forme de plaques de quelques centimètres. Les résultats sur une maison expérimentale au terme d'une recherche réalisée il y a quelques années sur notre site montrent qu'un tel enduit projeté est bien plus isolant que tous les isolants classiques, comme le plâtre, et deux fois plus isolant que le meilleur isolant existant.

Le domaine de la fenêtre est celui qui a le plus progressé pour moi avec, par exemple, les verres à faible émissivité qui sont les meilleurs capteurs solaires imaginables et permettent d'envisager pour demain des « bâtiments zéro énergie » producteurs d'énergie, permettant des solutions de réhabilitation particulièrement pertinentes.

Sur ce sujet de la réhabilitation, nous menons actuellement un projet avec plusieurs industriels, à l'image d'une initiative hollandaise qui a montré beaucoup de très bons résultats avec déjà 10 000 opérations de réhabilitation réalisées et toutes rentables. Ce projet devrait nous permettre de proposer un nouveau concept de réhabilitation industrialisé en partenariat avec des bailleurs sociaux notamment. Plusieurs démonstrateurs ont déjà été identifiés. Ce type d'initiative est souvent freiné par des obstacles réglementaires qui nous interdisent par exemple de clipser ou de coller alors que nos voisins étrangers n'ont pas toujours ce genre de difficulté. Rien que de poser un cadre de fenêtre à l'extérieur d'un bâtiment est un véritable parcours du combattant pour certains industriels. Il faut un droit à l'erreur en matière d'innovation, plutôt que viser la sécurité à tout prix en matière d'expérimentation.

Nous offrons donc d'autres solutions, par exemple nous avons développé avec le CSTB une solution pour la réhabilitation dans le domaine du tertiaire mais là encore des obstacles sont rencontrés tels que la frilosité des aménageurs français, souvent liée à des risques d'échec. Le marché de la réhabilitation reste encore aujourd'hui très peu soutenu dans notre pays.

Pour parler un peu de notre institut, nous avons vocation à développer l'intégration du solaire et je constate un certain dynamisme : les demandes industrielles pour développer des produits spécifiques photovoltaïques sont aujourd'hui très encourageantes et vont conduire à l'explosion des technologies photovoltaïques dans les années à venir. Les demandes concernent des volets autonomes, des fenêtres autonomes ou, encore, des entrées d'air autonomes pour éviter les raccordements électriques et, bien sûr, se développent des produits comme des tuiles ou des panneaux photovoltaïques. C'est quelque chose qui est bien réussi, ou du moins qui va l'être bientôt.

La situation reste beaucoup plus délicate pour le solaire thermique. Il y a le cas de l'entreprise Viessmann à Faulquemont qui réalise, avec 1000 employés, des systèmes solaires vendus à l'Allemagne, à l'Autriche, à la Suisse ou à d'autres pays plus courageux que nous sur ce sujet. Pendant ce temps, nous nous contentons d'importer d'Allemagne des chaudières au gaz ou au fioul. Une évolution est donc indispensable dans ce secteur où la France fait véritablement preuve de naïveté en ignorant le potentiel de ces technologies, en raison uniquement de déboires dans les décennies précédentes sur des installations qui avaient alors été mal conçues.

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