La mission Conseil et contrôle de l'État regroupe le budget du CESE, des juridictions administratives, des juridictions financières et du HCFP. Globalement, les taux d'exécution en AE comme en CP sont élevés : 95 % et 95,63 %. Cela est dû à la forte rigidité de la mission, composée à 85 % de dépenses de personnel. Chacun sait, dès lors, que les marges de manoeuvre en termes d'évolution ou d'économies sont nécessairement compliquées – surtout quand des besoins nouveaux apparaissent, et vous en avez évoqué quelques-uns. Compte tenu de la spécificité du statut de juridiction ou d'assemblée constitutionnelle des institutions dont les crédits sont inscrits sur cette mission, celles-ci présentent des particularités. Les différents programmes sont ainsi dispensés de mise en réserve de crédits. Pour autant, ils contribuent au respect de la norme de dépense de l'État en acceptant des annulations en cours d'année.
S'agissant des juridictions administratives, il convient tout d'abord de relever l'amélioration des délais de jugement en dépit d'une progression continue du nombre de recours. Pour répondre à votre question, les hypothèses de progression des crédits de personnel étaient bien calibrées pour permettre le financement du socle de masse salariale des créations d'emplois inscrites dans le budget quinquennal 2018-2022. Mais, compte tenu de la progression du contentieux, notamment celui de l'asile et de la création d'une nouvelle voie de recours pour les tribunaux administratifs par le projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif – pour obtenir le rétablissement de l'effet suspensif d'un recours devant la CNDA, ce qui concerne 20 000 personnes par an –, un ajustement des créations d'emplois et des crédits de personnel associés pourra et devra sûrement être opéré à compter du projet de loi de finances 2019. Je voudrais, par ailleurs, saluer l'effort par les juridictions administratives en matière de maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, avec une recherche systématique d'économies obtenues notamment par la renégociation des baux, le rattachement à des marchés ministériels ou la motivation de marchés propres aux juridictions administratives. Cela mérite d'être souligné. La mise en exploitation de Télérecours a permis de réaliser des économies de frais de justice que la Cour des comptes salue dans sa note d'exécution budgétaire et a évaluées à environ 2 millions d'euros. Les dépenses d'investissement ont représenté environ 6,4 millions d'euros en CP pour 2017. Je ne les aborde pas, je tiens à votre disposition le détail si vous le souhaitez. L'on constate un effort significatif entre les AE, entre l'exécution et la prévision, qui se justifie par la prise en charge par le programme 165 du financement de l'acquisition des nouveaux locaux du tribunal administratif de Marseille, pour un peu moins de 16 millions d'euros. J'apporte cette précision, car cela pourrait être lu comme une anomalie.
Vous m'avez, monsieur le rapporteur, interrogé de façon précise sur la CNDA. Tout d'abord, s'agissant des hypothèses retenues pour le calcul des effectifs octroyés à la Cour, la hausse des demandes d'asile n'a pas d'incidence directe, mais indirecte à travers l'activité de l'OFPRA. L'Office projetait une augmentation de ses décisions de 17 % hors mineurs accompagnants. Après application du taux de rejet de recours connu fin 2017, cela permet en fait d'envisager une hausse de 21 % pour 2018. Cette augmentation, qui fait suite à une progression de 34 % des entrées en 2017, nécessitera un renforcement de la capacité de jugement de la Cour dès le second semestre 2018, avec la création de deux chambres, soit 51 emplois qui seront mobilisés dans ce cadre.
S'agissant des échanges d'informations entre le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'intérieur et le responsable du programme 165, ils existent et portent essentiellement sur les données statistiques permettant d'effectuer des projections d'activité. La Cour a accepté d'être présente en tant qu'observateur à un groupe de travail portant sur le système d'information de l'asile, dont elle n'est pas partie prenante mais auquel elle contribue à travers des échanges de données informatiques avec l'OFPRA.
Vous m'interrogez également sur l'opportunité de mettre en place une procédure plus formalisée permettant de mieux ajuster les moyens dévolus à la CNDA au regard de l'évolution probable du nombre de demandeurs d'asile. Des réunions et des échanges ont régulièrement lieu au plan statistique, et permettent un ajustement en fonction de l'évolution du nombre de recours, qui se caractérise par une grande versatilité. Une procédure formalisée, donc rigide, ne nous paraît pas opportune alors que nous avons ces rendez-vous réguliers qui permettent de piloter ce sujet plus directement.
En ce qui concerne la numérisation, la CNDA ne bénéficie pas de l'application Télérecours, contrairement au reste des juridictions administratives. Une solution technique alternative a été mise en place en 2015. Elle est toutefois asymétrique, en ce qu'elle ne permet que les échanges de la Cour vers les avocats. L'extension de Télérecours à la CNDA est donc prévue en 2020. Quant aux échanges dématérialisés avec les autres acteurs de la chaîne de traitement des demandes d'asile, l'autoroute numérique mise en place entre la CNDA et l'OFPRA fonctionne plutôt bien. Le développement de Télérecours et de Télérecours-citoyen pour les demandeurs sans avocat améliorera encore l'accessibilité des demandeurs d'asile à la juridiction.
J'aborde maintenant les juridictions financières. Le budget exécuté en 2017 s'inscrit dans les limites fixées par la LFI. Bien que contraint, il participe aux objectifs de maîtrise des finances publiques du Gouvernement par un effort de rationalisation de la dépense. En masse salariale et en emploi, l'exécution du budget 2017 traduit une rupture par rapport aux exercices antérieurs. Le taux d'exécution des crédits atteint, en effet, 99,3 % des crédits. C'est un taux extrêmement élevé, qui traduit un calibrage au plus juste de la masse salariale. Il convient tout particulièrement de relever l'évolution de la structure du personnel en cohérence avec l'élargissement des missions et la technicité accrue des métiers de juridiction financière, donc une évolution dans les catégories A+ et A, qui étaient déjà prépondérantes et qui ont continué de progresser en 2017. J'apporte quelques précisions supplémentaires pour vous répondre sur le plafond d'emploi, qui est en fait à 1 840 ETP. Il a été fixé à ce niveau en 2009 et n'a pas évolué depuis. L'écart entre la consommation d'emplois et le plafond s'explique notamment par la nécessité de conserver un volant de sécurité pour assurer l'éventuelle réintégration des magistrats à l'extérieur des juridictions financières. Un tiers d'entre eux exerce actuellement hors la Cour.
Compte tenu des créations d'emplois arbitrées par le triennal, la marche sous le plafond, d'actuellement 4 %, sera réduite au fur et à mesure des recrutements effectués sur la période pour trouver les marges de manoeuvre que vous avez évoquées. Les crédits budgétaires de fonctionnement et d'investissement alloués aux juridictions financières sont en baisse régulière significative depuis 2014. Il faut saluer les efforts des juridictions financières en la matière, qui explorent systématiquement tous les gisements d'économies possibles. De plus, aux crédits budgétaires s'ajoutent des ressources propres tirées des activités internationales des juridictions financières, que je souhaitais évoquer.
Vous m'avez interrogé sur l'existence d'un programme spécifique consacré au HCFP, qui résulte d'un amendement parlementaire de la loi organique de 2012 et qui fait l'objet d'interrogations récurrentes. Le Gouvernement ne serait pas défavorable à une fusion avec le programme 164, eu égard à la relation très étroite que le HCFP entretien avec la Cour des comptes et compte tenu du fait que les dispositions nationales sur l'autonomie financière des institutions de contrôle et de conseil budgétaire ne rendent nullement l'existence d'un programme distinct obligatoire.
L'exécution du programme 340 n'appelle pas, à mon sens, d'observation particulière.
Enfin, en ce qui concerne le CESE, je voudrais préciser que l'exécution 2017 est notamment marquée par l'entrée en vigueur du décret du 10 mai 2017 réformant son régime administratif et financier. Il s'agit de la mise en oeuvre d'une recommandation de la Cour des comptes, qui demandait la normalisation du régime budgétaire et comptable du CESE. Il convient aussi de noter le recrutement de deux personnes chargées de l'analyse interne et de la certification des comptes dans le cadre de la mise en place de ce nouveau décret. S'agissant des dépenses du titre 2, le taux de consommation des crédits est de 95,5 % pour les dépenses de personnel. Les montants non consommés ont pour une part été reversés en cours d'année au contrôleur budgétaire et comptable ministériel, pour 563 000 euros, et pour une autre part utilisés en titres 3 et 5 grâce à la fongibilité asymétrique.
Monsieur le rapporteur spécial, vous m'avez interrogé sur la manière dont le CESE anticipe les évolutions de son rôle institutionnel. Déjà, je crois que dans les initiatives prises par son président mais aussi par le CESE dans son ensemble, cette anticipation pour ne pas subir les évolutions possibles et contribuer aux réflexions a été très proactive. Sachez aussi que cela a été anticipé en interne, pour renforcer le coeur de métier de cette administration. Quatre administrateurs ont été recrutés au sein de l'équipe pluridisciplinaire créée pour permettre d'instruire les avis demandant un traitement transversal et renforcer les sections permanentes. Un nouvel administrateur est également chargé du suivi des recommandations. Vingt-sept avis, résolutions ou études ont ainsi pu être publiés en 2017. Le CESE a également multiplié les auditions ou rencontres informelles avec les parlementaires afin de renforcer les liens entre les assemblées parlementaires qu'il aura vocation à éclairer dans le cadre d'une saisine plus systématique sur les projets de lois. Sachez également que, dans la perspective de la révision constitutionnelle, la vocation du CESE à animer et prendre en compte la parole citoyenne, ce dernier a mis en place un comité de veille sur les pétitions en ligne qui a abouti l'année dernière à un premier avis sur les déserts médicaux, suivi au début 2018 par deux autres avis sur la fin de vie et sur la situation dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui s'intitulait Vieillir dans la dignité. Le CESE renforce également ses capacités en informatique, mais aussi ses capacités métier, avec deux ingénieurs en informatique plus particulièrement chargés de travailler sur le suivi des préconisations, les plateformes participatives et les pétitions dématérialisées. Les dépenses de fonctionnement se sont élevées à 6,3 millions d'euros, soit une augmentation de 1 million d'euros par rapport à 2016. S'agissant de l'investissement, le CESE a poursuivi son programme de mise en accessibilité de ses locaux pour tous les publics, lequel devrait aboutir en 2019. Là encore, cela implique des investissements qui ont été portés à hauteur de 1,1 million d'euros.
Je conclurai sur le CESE en précisant que, comme chaque année, ce dernier a assuré sa politique de développement sur des ressources propres, grâce à la location de ses locaux. Il a perçu près de 2 millions d'euros dans ce cadre. C'est un montant stable par rapport aux années précédentes. Il a également commencé, fin 2017, à mettre en place une politique volontariste de développement du mécénat, notamment à l'occasion des quatre-vingts ans ans du Palais d'Iéna en présence de la ministre de la culture. Dernier point de satisfaction concernant le budget du CESE, la Cour des comptes se félicite, dans sa note d'exécution budgétaire, des progrès réalisés par ce dernier sur la question de la caisse des retraites, contribuant ainsi à la soutenabilité des programmes.