Si je ne peux répondre à toutes les questions dans le délai imparti, certains d'entre vous auront peut-être des réponses écrites.
La reconstruction de Saint-Martin est une priorité pour le ministère. Je suis allée constater immédiatement l'ampleur des dégâts. Nous avons nommé un délégué interministériel. Nous avons fait plusieurs réunions interministérielles, afin de faire régulièrement le point avec les élus de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.
Les assureurs ont mis un peu de temps à réagir, mais ils sont désormais entrés dans le jeu : 90 % des dossiers ont été réglés ; 78 % des dossiers sont clos ; 221 millions d'euros ont été versés par les assurances.
Le travail avec la collectivité est fondamental pour aboutir à la reconstruction du territoire. Nous devons l'accompagner. Le Gouvernement est entièrement mobilisé : 65 millions d'euros ont été versés au titre de la gestion de crise ; 80 millions d'euros en dépenses indirectes ; 46 millions d'euros au titre du fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE) ; 15 millions d'euros pour les constructions scolaires ; 100 % de l'aide exceptionnelle de l'Union européenne a été versée.
Cela étant, vous avez raison, la nouvelle saison cyclonique arrive et tout le monde n'a malheureusement pas un toit sur la tête. Je tente de faire en sorte que nous avancions plus vite, avec différents dispositifs, mais il faut reconnaître qu'au cours des premiers mois après la crise, le territoire a refusé que des entreprises de l'extérieur viennent aider à la reconstruction. Il a fallu gérer la pagaille et recoordonner les services de l'État avec ceux des collectivités. Cela a pris un peu de temps. Nous ne sommes pas complètement certains qu'au 1er juillet, l'île sera entièrement nettoyée – pour éviter tout risque en cas de nouveau cyclone – et que chacun aura un toit sur la tête…
Vous m'avez interrogé sur le RSA : la reprise du RSA à Saint-Martin n'est pas à l'ordre du jour, même si la demande a bien été enregistrée. Seule la Guyane a pour le moment bénéficié de cette recentralisation. Il en est aussi question à Mayotte.
S'il faut prolonger le chômage partiel, nous le prolongerons : nous nous adapterons totalement aux besoins du territoire.
Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Nilor : la solidarité a bien joué après le passage d'Irma, et c'est normal. Les crédits ont bien été pris en partie sur ceux du ministère de l'outre-mer, mais en contrepartie, nous avons bénéficié de la totalité du dégel de nos crédits et nous n'avons subi aucune annulation de crédits. Contrairement aux autres ministères, du fait des événements exceptionnels outre-mer, nous n'avons pas participé à l'effort logique de redressement de notre dette nationale. Cela équivaut à 300 millions d'euros de solidarité nationale – que le ministère des outre-mer a conservés afin de répondre à ces événements, puisqu'il ne s'est vu prélever que de 15 millions d'euros. Il est important de le rappeler.
Pour ce qui est du chlordécone, nous savons depuis longtemps que les conséquences de l'utilisation de ce pesticide se feront sentir pendant plusieurs dizaines d'années : nous n'avons pas attendu les articles parus aujourd'hui dans la presse pour en prendre conscience, et plusieurs plans chlordécone ont déjà été mis en place. J'ai souhaité que le problème soit examiné au plus haut niveau, par les ministres eux-mêmes, et qu'on relance les études qui n'avaient pas été menées à terme. Il faut également faire preuve de la plus grande transparence quant à la cartographie des zones qui ont été polluées, et continuer à lutter contre les circuits informels, qui comportent toujours plus de risques.
Ce dossier montre bien à quel point le politique est susceptible de céder face aux lobbys – ce fut le cas hier, mais je crains que ce ne le soit encore aujourd'hui – et, si ce constat vient trop tard pour la Martinique et la Guadeloupe, j'espère que nous saurons retenir la leçon pour l'avenir. Pour ma part, j'ai résolument fait le choix de la transparence, et c'est dans cet esprit que j'envisage le renforcement à venir du plan chlordécone, impliquant que nous recherchions la mise en oeuvre de fonds européen pour le financement des programmes de recherche : l'État doit assumer ses engagements, et j'y veillerai.
C'est un fait, je ne pilote pas la totalité des crédits consacrés à l'outre-mer. Je pense que ce ne sera jamais le cas, et je plaide d'ailleurs pour que les décisions prises au sujet des outre-mer le soient de plus en plus dans le cadre du droit commun. Si le ministère des outre-mer récupérait la totalité des crédits alloués aux outre-mer ne manquerait pas d'inciter les autres ministres à se désengager des outre-mer ; or chacun d'entre eux doit s'impliquer outre-mer, chacun doit faire en sorte que le droit commun soit applicable outre-mer comme sur le reste du territoire national. Le ministère des outre-mer ne doit intervenir qu'au titre de la différenciation, de l'exception, des difficultés spécifiques à prendre en compte pour l'accompagnement des territoires concernés.
L'« équivalent fonds vert » était une excellente initiative. Fin 2017, suite à l'annonce de sa non-reconduction, je me suis interrogée sur la possibilité de créer un nouveau fonds que le ministère de l'outre-mer ne serait pas le seul à financer, mais auquel les autres ministères participeraient également. Après un débat au Parlement, ce nouveau fonds vert, désormais étendu à la totalité des territoires d'outre-mer, a été mis en place. En 2017, alors qu'il ne concernait encore que les territoires ultramarins du Pacifique, il avait permis de financer 17 projets pour un montant total d'environ 60 millions d'euros. En 2018, l'enveloppe du ministère des outre-mer consacrée au nouveau fonds vert s'élève à 21 millions d'euros, mais j'ai bon espoir que les assises des outre-mer, qui touchent à leur fin, soient l'occasion de mettre au point un outil plus performant au service de tous les territoires d'outre-mer, qui permette à la fois l'adaptation au dérèglement climatique et la lutte contre la pollution, tout en répondant à nos besoins.
J'ai cependant la conviction que nous allons devoir mettre au point un autre outil, doté de moyens allant au-delà des crédits du ministère des outre-mer, pour gérer les crises climatiques dans les territoires d'outre-mer. L'année 2017, qui a été caractérisée par un épisode cyclonique exceptionnel, nous a démontré la nécessité d'avancer sur ce point, et j'espère que nous allons y parvenir : c'est un projet que je porte et que j'espère voir aboutir rapidement.
Dans le prolongement de la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer, les contrats de convergence qui vont être négociés avec chaque territoire seront assortis d'indicateurs de développement. Dans ce cadre, je souhaite que les outre-mer ne se contentent pas de se comparer à la moyenne nationale, mais qu'ils définissent leurs ambitions par rapport aux dix-sept objectifs de développement durable – nous avons commencé à travailler sur ce sujet, et aurons encore l'occasion de le faire dans le cadre des assises des outre-mer – qui permettent de voir le monde de demain par le prisme de l'excellence. Bien sûr, les contrats de convergence vont reprendre un certain nombre d'instruments déjà existants, tels que les contrats État-région – qui seront revus à mi-parcours. Cependant, pour transformer en profondeur les territoires, nous devrons être en mesure d'apporter des financements complémentaires : la convergence ne peut constituer un objectif réaliste si nous ne disposons pas d'un budget plus important.
Comme vous tous, j'ai une ambition pour l'outre-mer : je m'efforce de m'en donner les moyens en m'employant, tout comme vous, constamment à convaincre les autres membres du Gouvernement que l'outre-mer doit constituer une priorité parce que ses territoires ont beaucoup de retard. J'y parviens régulièrement, même quand il s'agit du ministère des finances – je vous donne rendez-vous aux assises des outre-mer, ainsi que dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2019, afin de vous le montrer. En tout état de cause, je ne pense pas que l'on puisse considérer que l'année 2017 a été catastrophique par rapport aux années précédentes : les moyens du ministère des outre-mer ont toujours été maintenus.
Madame la présidente, vous avez évoqué l'exercice du PLF 2017. C'est vrai, nous avons dû jouer sur le périmètre pour ne pas annoncer une baisse des crédits : dès mon entrée en fonction, j'ai dit que le budget de mon ministère n'était que très légèrement en hausse à périmètre constant, et je me souviens du scepticisme qui prévalait alors au sein de cette commission. Je remercie M. Serva de m'avoir permis de faire la lumière sur cette question, qui se trouve désormais derrière nous – je ne dis pas cela pour imputer à d'autres gouvernements la responsabilité de ce qui s'est passé, puisque j'en faisais partie, mais bien pour souligner l'importance d'opter pour la transparence la plus totale. J'accepte toutes les critiques mais, pour engager un dialogue constructif, nous devons commencer par nous référer aux mêmes chiffres.
Pour ce qui est des exonérations de charges sociales au profit des entreprises et du coût du travail en outre-mer, au sujet desquels je conduis actuellement une réforme, je rappelle qu'il existe huit dispositifs qui cohabitent, et qu'il serait souhaitable de simplifier et de réduire. En comptant à la fois le CICE et les exonérations, ce sont 1,7 milliard d'euros qui vont tous les ans aux territoires d'outre-mer. Sans qu'il soit question d'abandonner qui que ce soit, il apparaît aujourd'hui nécessaire d'établir des priorités afin de renforcer la lutte contre les handicaps qui touchent certains territoires. Pour cela, nous avons besoin de plus d'indicateurs, afin d'être en mesure d'évaluer, mieux que nous ne le faisons actuellement, l'ensemble des dispositifs en place. Sur ce point, ne disposant pas du temps nécessaire pour vous répondre immédiatement, monsieur le rapporteur général, je vous ferai parvenir un document écrit.
La question bancaire revêt une grande importance dans les territoires d'outre-mer : l'absence de prise de risques par les banques y constitue un réel problème à laquelle j'aurai à coeur de répondre dans le cadre des assises des outre-mer, en faisant appel à ces autres partenaires que sont Bpifrance, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et l'Agence française de développement (AFD).
Faute de temps, je vous répondrai par écrit au sujet de Mayotte, et me contenterai aujourd'hui de vous dire que je fais le même constat pour ce territoire et pour la Guyane : si nous ne mettons pas tout en oeuvre pour rattraper, au cours de ce quinquennat, les retards structurels qui s'y sont accumulés, nous en paierons le prix tôt ou tard en étant contraints d'intervenir sous pression, dans l'urgence provoquée par les crises qui ne manqueront pas de survenir. L'un des messages véhiculés par les assises consiste à dire que nous devons désormais agir autrement. Évidemment, je n'ai pas de baguette magique, et je ne vais pas régler tous les problèmes en une année, ni même en un quinquennat – personne ne pourrait le faire –, mais nous devons mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour atteindre nos objectifs d'ici à 2025, dans le cadre des contrats de convergence qui porteront cette ambition.
Nous devons nous attaquer à tous les dossiers un par un, sans jouer les autruches – ça tombe bien, je ne sais pas le faire ! – mais au contraire en affrontant toutes les difficultés. Pour ce qui est de la méthode, j'ai souhaité qu'au sujet de Mayotte on prenne le temps de la concertation, que les ministres dialoguent, se mettent d'accord et se coordonnent plutôt que de faire d'emblée des promesses qui ne seraient peut-être pas tenues : en procédant de la sorte, tout ce qui sera annoncé sera effectivement mis en oeuvre.
Je reconnais que certaines mesures étaient effectivement prévues de longues date, qu'elles auraient été prises indépendamment de la crise des outre-mer et qu'elles ne constituent donc pas des « plus » destinés à y répondre. Cependant, la situation à laquelle nous devons faire face nous a également conduits à réagir en mettant en place des financements supplémentaires, ou en intervenant plus tôt que prévu.