Il vise lui aussi à étendre le champ de la formation professionnelle en mentionnant de nouveaux enjeux – en l'espèce les enjeux écologiques. Je ne partage pas l'idée selon laquelle il s'agirait d'une simple liste administrative. Lorsque nous votons des lois et que nous y introduisons des éléments précis, c'est aussi pour exprimer la façon dont nous voulons faire évoluer la société, ce qui est particulièrement pertinent et novateur sur le terrain de l'écologie.
C'est pourquoi je pense que c'est un bon exemple des failles que présente le regroupement des actions autour de quatre thèmes.
Je ne vous apprendrai rien en disant que nous sommes face à un changement climatique. L'accord de Paris sur le climat, signé en 2015, visait à poser un cadre international pour contenir le réchauffement à 2 degrés d'ici à la fin du siècle. Or l'affaire ne va pas être très simple, compte tenu notamment du retrait unilatéral et autoritaire des États-Unis, qui expose la planète à un danger particulièrement grave.
La limite des 2 degrés n'avait pas été choisie par hasard. Un réchauffement plus important condamnerait des milliers d'îles à être englouties par la montée des eaux. Surtout, même si personne ne peut sérieusement en évaluer les conséquences, nous savons qu'il aurait un impact direct et dramatique sur notre quotidien, notamment sur nos conditions de travail, du fait d'une exposition accrue à la chaleur et d'une plus grande diffusion des maladies infectieuses.
Tel est le sujet d'un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail – l'ANSES – publié le 19 avril. Deux de ses trois principales préconisations concernent directement la formation et intéressent donc le projet de loi. L'ANSES incite effectivement à promouvoir la sensibilisation aux effets du changement climatique sur la santé, par l'information et de la formation, et demande qu'on intègre dès maintenant les impacts du changement climatique dans les démarches d'évaluation des risques.
Dans la logique de ce rapport, nous proposons que le développement des compétences liées à l'anticipation et à l'adaptation aux impacts du changement climatique sur les conditions de travail soit intégré au champ de l'apprentissage. Nous souhaitons même aller plus loin en y incluant le développement des pratiques vertueuses, telles que la lutte contre le gaspillage, le recyclage ou les économies d'énergie.
Il nous paraît impératif de rappeler que, contrairement à ce que prévoit le projet de loi, la formation professionnelle et l'apprentissage ne doivent pas être à la remorque des logiques de compétitivité, de marché et de recherche du profit à court terme. Ce sont des moyens d'acquérir de nouveaux savoirs et d'influer collectivement sur notre mode d'organisation de la société.
Or c'est là que le bât blesse : vous vous employez à en rétrécir, à en rabougrir la définition pour réduire in fine le champ des possibilités. Vous vous abstenez de franchir le palier supplémentaire qui vous permettrait de répondre aux besoins, de relever les défis émergents, de sortir la formation professionnelle d'un carcan qui ne répond qu'à des impératifs étroits définis par votre logique purement économique et néolibérale.