Intervention de Didier Quentin

Réunion du lundi 4 juin 2018 à 16h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Quentin, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur les crédits de la mission Défense :

Par cet exercice inédit lancé sous l'autorité du président de la commission des finances, Éric Woerth, il nous revient, madame la ministre, d'examiner la sincérité budgétaire de votre département ministériel. Les armées ont en effet longtemps pâti d'une exécution budgétaire très éloignée de la prévision, avec les conséquences que nous avons déplorées. Aussi cet exercice d'évaluation est-il loin d'être inutile et je vous remercie par avance pour toutes les réponses précises que vous voudrez bien apporter à mes trois questions.

La première porte sur les surcoûts des opérations extérieures. Elle vous a déjà été posée et vous avez indiqué précisément comment sont ventilés ces surcoûts ; je n'y reviens donc pas. Je voudrais toutefois savoir si vous pensez pouvoir revenir à un montant plus raisonnable en 2018 en rapport avec le socle visé par la nouvelle loi de programmation militaire de 1,1 milliard d'euros par an. Ce point a son importance, car même si les surcoûts au-delà du socle sont pris en charge en interministériel, la défense paie sa part, et le rapport de la Cour des comptes, auquel il a été fait allusion à plusieurs reprises le montre bien : « Le financement interministériel des opérations a laissé à la charge de la mission défense des montants qui se cumulent chaque année pour atteindre 2,8 milliards d'euros depuis 2011. » Le coût prévisible des opérations constitue donc une donnée essentielle sur laquelle nous vous serions reconnaissants de nous donner quelques informations.

La deuxième interrogation me vient à la lecture du rapport annuel de performances pour 2017, qui évoque la baisse de l'indicateur de coopération européenne en matière de recherche et de technologie de défense. Ce rapport indique que cette médiocre performance résulte, je cite là encore : « du faible nombre de nouveaux projets lancés en coopération », cela est préoccupant dans la mesure où l'équilibre de la nouvelle LPM repose sur un changement d'échelle de la coopération européenne en matière de défense. L'absence de nouveaux projets n'est pas un bon signal : pouvez-vous nous expliquer les ressorts de cette évolution ? Pouvez-vous aussi nous dire ce qu'il en est des projets de recherche lancé dans le cadre du Fonds européen de défense, qui serait doté de 10,5 milliards d'euros sur 7 ans selon M. Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman ? Correspondent-ils aux priorités de la défense française ?

Enfin, je terminerai par un cri d'alarme à propos de notre ambition maritime, qui me semble gravement en dessous des enjeux. Les indicateurs du rapport annuel de performances révèlent une capacité d'intervention très dégradée de notre marine nationale par rapport aux autres armées, de l'ordre de 60 %. Je serais heureux d'avoir votre explication de cette mauvaise performance, le rapport expliquant que la capacité d'intervention de la marine nationale est limitée par les arrêts techniques du Charles de Gaulle, notre unique porte-avions, mais aussi par la faiblesse des stocks et le manque de frégates de premier rang ainsi que d'hélicoptères de patrouille maritime. Cette situation paraît préoccupante alors que la France va devenir la première puissance maritime du monde en termes de superficie, et que des enjeux essentiels se jouent en mer ou sous la mer. Il est donc indispensable de renforcer nos moyens dans l'espace maritime Asie-Pacifique et au-delà sur les trois grands océans. Il convient de rehausser nos moyens maritimes et aéromobiles dans nos outre-mer, cela avant l'horizon fixé de 2022, qui paraît bien lointain, surtout si l'on pense à la situation très dégradée de Mayotte, soumise à une immigration illégale croissante, ainsi qu'au risque de certaines migrations climatiques.

Je termine en me permettant, comme François Cornut-Gentille, de vous encourager à poursuivre l'effort notable de sincérité effectuée dans le cadre du budget 2018 et de la nouvelle LPM que la Cour des comptes elle-même reconnaît : c'est tout dire.

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