Intervention de Florence Parly

Réunion du lundi 4 juin 2018 à 16h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Florence Parly, ministre des armées :

Je vais exposer les conséquences de l'annulation de 850 millions d'euros en divisant les exercices 2017 et 2018 par grands postes – les détails vous seront fournis par la suite. Ces 850 millions d'euros ont porté pour 500 millions d'euros pour l'année 2017, avec un effet différé en 2018 pour 350 millions d'euros.

Ces sommes correspondent d'abord à des diminutions de besoin de crédits de paiement d'un montant total de 530 millions d'euros (470 millions d'euros en 2017) en raison d'abord de moindres versements aux agences internationales que sont l'OCCAR et NAHEMA – acronyme de l'anglais NATO Helicopter Management Agency. Nous avons également mobilisé 100 millions d'euros issus de fonds de concours de pays partenaires du programme spatial MUSIS. Enfin, l'avancement des programmes nous a permis de lisser 200 millions d'euros de crédits de paiement.

Ensuite, nous avons renégocié certains contrats en cours, ce qui portera principalement sur l'exécution 2018. Nous devrions, et vous me reposerez certainement la question dans un an, retrouver 83 millions d'euros à ce titre. Cela concerne l'aménagement de la commande des frégates de taille intermédiaire (FTI), le décalage du lancement du standard IV du Rafale, et enfin le décalage d'une partie du programme de rénovation des Mirage 2000–D, les 45 premiers appareils seront livrés d'ici à la fin de l'année. Nous vous fournirons les détails, si nécessaire.

S'agissant de la relation entre le ministère et votre commission, si les informations n'ont pas été communiquées, je m'en excuse. Monsieur le député, vous avez été peut-être insuffisamment contraignant dans la rédaction de votre questionnaire puisque vous ne nous avez pas donné de date limite (Sourires.). Nous avons donc en quelque sorte profité de votre propre souplesse, mais cela n'est pas de bonne politique, je vous l'accorde.

Je souhaiterais malgré tout que chacun ait en tête une circonstance atténuante, qui ne se reproduira ni l'année prochaine, ni dans deux ans, ni dans trois ans, qui tient au fait que nous étions en pleine discussion de la loi de programmation militaire au Sénat. Enfin, et nous avions abordé ce point lors de l'examen de la LPM, nous rencontrons une difficulté à faire masse de l'ensemble des informations qui convergent vers le Parlement, parfois en ordre dispersé ; certaines sont adressées plus directement à la commission des finances, d'autres plus directement à la commission de la défense. Vous disiez ne pas avoir eu communication des exigences en matière de niveaux de disponibilité par type d'équipements : elles se trouvent page 108 du rapport annuel de performances. Il faudra que nous menions une réflexion, qui sans doute dépasse le suivi de l'exécution du budget du ministère des armées, sur la manière de mieux faire converger tous ces éléments. Par ailleurs, la loi de programmation militaire prévoit des améliorations dans l'information du Parlement, précisément pour que le suivi de l'exécution de la LPM soit le plus efficace possible.

S'agissant du programme 146, il a effectivement servi de « réservoir » pour l'essentiel des annulations réalisées au mois de juillet dernier – la reprogrammation des mesures pour les compenser a fait partie des données d'entrée pour la construction de la loi de programmation militaire. Je pense que l'on peut dire que la quasi-totalité des montants a pu être reprogrammée, à l'exception de quelques-uns qui ont vocation à l'être plutôt en gestion, c'est-à-dire en 2018, notamment pour ce qui concerne les Exocet supplémentaires, les caméras thermiques pour les Falcon de la marine, ou bien les simulateurs supplémentaires pour les missiles de l'armée de terre. Le reste à payer du programme 146 a mécaniquement diminué en raison du report d'un certain nombre d'engagements. Par ailleurs, il ne constitue pas forcément un indicateur très pertinent à l'échelle du programme parce qu'il est sujet à de très grandes variations en raison des commandes passées qui peuvent s'étaler sur plusieurs années. Aussi compte tenu de la programmation retenue dans la LPM ces restes à payer ont-ils vocation à augmenter de façon mécanique en fin de loi de programmation militaire.

C'est pour cette raison que la loi de programmation militaire a prévu, a l'initiative de votre commission, un article qui indique « en dur » dans le texte ce qui figurait dans le rapport annexé, à savoir que l'article 17 de la loi de programmation des finances publiques ne contraindrait pas les investissements du ministère des armées. Cet article – 6 bis – a d'ailleurs été complété et renforcé depuis par le Sénat. Pour ce qui concerne le report de charges, ce même projet de LPM prévoit une trajectoire à laquelle le ministère se tiendra. Nous avons en effet construit la programmation des équipements en tenant compte de cet objectif qui nous a été fixé de ramener le report de charges à 10 % en fin de période de programmation.

Vous m'avez également interrogée sur l'effet des annulations sur le niveau de trésorerie des différents organismes auquel nous contribuons. Ce niveau est évidemment surveillé de très près. Nous avons le sentiment qu'aujourd'hui ces organismes disposent de manière certaine de l'ensemble des moyens dont ils ont besoin pour fonctionner. En outre, il n'est pas du rôle de l'État d'assurer leur trésorerie positive au-delà des stricts besoins.

S'agissant enfin de l'hélicoptère détruit en opération, à ce stade, le projet de LPM ne prévoit pas strictement de le remplacer. Par conséquent, en fonction des marges que nous pourrons éventuellement dégager en gestion en 2018, voire en 2019, nous allons voir s'il est possible de procéder au remplacement nombre pour nombre de ces hélicoptères. En revanche, vous avez certainement noté que nous allons faire un gros effort en faveur des hélicoptères destinés aux forces spéciales.

Monsieur de Ganay, vous m'avez interrogée sur les conséquences de la non-budgétisation des décisions du Conseil de défense prise au mois d'avril 2016. Effectivement ces décisions n'ont été que très partiellement budgétées en 2017. Nous en avons naturellement assuré le financement en gestion. Par ailleurs, lors de la présentation du projet de budget pour 2018, nous avons inscrit des mesures nouvelles, qui n'en étaient pas véritablement. Ainsi, dans l'augmentation de 1,8 milliard d'euros des crédits du budget pour 2018, plus d'un milliard correspondait à l'effet consolidé des mesures déjà décidées, et une part de cette somme correspondait à l'impact en année pleine des mesures décidées en avril 2016. Cela me permet de redire à quel point je suis convaincue que la somme de l'exécution 2017 et du budget que vous avez adopté pour 2018, , vont permettre d'aborder la LPM 2019-2025 de la meilleure façon possible.

Pour ce qui concerne le financement des OPEX, la Cour des comptes mentionne un reste à charge pour le ministère des armées. En réalité, celui-ci correspond à proportion du budget du ministère des armées au sein du budget de l'État. Lorsque l'on parle de financement interministériel, il est tout à fait naturel que mon ministère contribue aussi à ce financement, mais à hauteur de ce qu'il pèse dans le budget de l'État. C'est exactement ce qui s'est passé. Je ne pense donc pas qu'il y ait quoi que ce soit d'anormal à cela.

Vous avez parlé de manière bien sévère de cavalerie désastreuse. Permettez-moi de m'inscrire en faux contre cette expression. Je crois au contraire que l'exécution 2017, grâce au dégel intégral des crédits gelés depuis 2015, combiné au fait que la loi de finances initiale pour 2018, contribue à assurer en totalité le financement de mesures qui étaient décidées, mais pas encore financées, permettra d'éviter que des phénomènes de cavalerie, en effet, comme il y en a eu par le passé, ne se reproduisent.

Je rappelle que, sur la période 2009-2014, l'exécution des lois de finances par rapport à la loi de programmation, a fait apparaître un déficit d'environ un milliard d'euros par an. J'estime que nous sommes vraiment sortis de cette situation, ce qui est heureux car les besoins des armées sont considérables. Si cavalerie il y a eu, c'est du passé. Je veillerai à ce que ce phénomène ne se reproduise pas. En tout cas, cela n'a pas été le cas de l'année 2017 et, vous veillerez à ce qu'il n'en soit pas ainsi en 2018.

Monsieur le député Quentin, au sujet du détail des surcoûts des OPEX, je me permets de vous renvoyer un document qui vous a été communiqué aujourd'hui : le rapport sur l'exécution de la loi de programmation militaire pour l'année 2017, qui, page 15, fournit la totalité des réponses aux questions vous posiez. Si tel n'était pas le cas, nous ne manquerions pas de les compléter.

Vous m'avez interrogée sur les raisons pour lesquelles la marine se trouve en retrait par rapport à son contrat opérationnel sur la partie intervention. Ce contrat opérationnel est exigeant pour toutes les armées, donc pour la marine. Cette situation de moindre réalisation du contrat opérationnel – 60 % contre 85 % pour l'armée de terre et 80 % pour l'armée de l'air – avait été anticipée. Elle résulte pour une très grande part de l'arrêt technique du porte-avions Charles de Gaulle qui vient d'être remis à l'eau après avoir été immobilisé pendant de très longs mois. Il retrouvera sa capacité opérationnelle à la fin de l'année. Cela a eu, naturellement, des conséquences très importantes sur l'ensemble du fonctionnement du groupe aéronaval.

Par ailleurs, il est vrai qu'au-delà du porte-avions, un certain nombre de tensions ont marqué la gestion de la marine, comme le renouvellement de la composante frégates. En 2018, sera livrée la cinquième frégate FREMM, et en 2019 la sixième. Nous en attendons une nette amélioration de la situation de la marine. La loi de programmation militaire prévoit également le renouvellement de la flotte des pétroliers ravitailleurs, ce qui là aussi viendra améliorer la capacité d'intervention de cette armée.

En ce qui concerne la flotte des avions de patrouille maritime Atlantique 2 qui souffrent d'une disponibilité en termes de MCO beaucoup trop faible, elle fait précisément partie des flottes prioritaires que j'ai identifiées et pour laquelle nous allons renégocier les contrats d'entretien avec l'industriel, tout en augmentant, par ailleurs, le nombre d'appareils dont nous disposerons, puisque la cible LPM a été rehaussée de 15 à 18. Nous verrons l'année prochaine si cet indicateur a progressé dans des proportions suffisantes pour que vous puissiez considérer que la situation s'améliore.

Une question m'a été posée sur l'indicateur de performances de coopération européenne qui passe, ce qui était prévu, de 15 %, à 11,5 % pour les études amont. La raison tient au fait que les études pour le système de combat aérien futur (FCAS, en anglais) ont été décalées, ce qui fait que le montant a diminué. Nous gardons cependant l'ambition, pour 2018 et surtout pour la période 2019-2025, de développer cette coopération avec les Britanniques mais aussi avec les Allemands. Je vous donne donc rendez-vous à l'année prochaine.

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