En me désignant rapporteur pour avis des crédits de cette mission, la commission de la défense et en particulier le président Jean-Jacques Bridey – que je remercie pour la confiance qu'il me témoigne – m'ont assigné pour objectif de conduire, tout au long de la mission, une évaluation des dispositifs de reconnaissance et de répartition prévues par notre droit, afin d'apprécier notre capacité à les compléter lorsque cela paraît justifié.
À cet égard, nous nous félicitons tous de l'annonce récente du Gouvernement d'élargir le bénéfice de la carte du combattant aux militaires français déployés en Algérie après le 2 juillet 1962. Il s'agit d'une revendication ancienne, dont il convenait d'évaluer avec précision les impacts juridiques et financiers – ce dont nous avions fait la demande expresse dans l'avis n° 277 du 12 octobre 2017, en la réitérant en commission et en séance, ainsi que lors des travaux avec Mme Darrieussecq. Fin mai, le Gouvernement a tranché en faveur de l'octroi de cette carte, ce dont nous nous réjouissons tous, en remerciant Mme la secrétaire d'État pour l'accueil qu'elle nous a réservé au sein de la commission.
En ce qui concerne l'évaluation de l'exécution budgétaire 2017, la mission Anciens combattants n'appelle pas vraiment de commentaires, puisque le taux d'exécution des crédits ouverts – 2,537 milliards d'euros – atteint 99 %. Le programme 169 représentant 95 % des crédits de la mission, le budget 2017 a permis de maintenir l'ensemble des dispositifs de reconnaissance et de réparation au profit des anciens combattants. Nous observons également que la mission a contribué à l'effort interministériel de réduction des dépenses engagées par le Gouvernement à l'été 2017, même si les trois programmes de la mission ne font pas l'objet de mesures de régulation d'importance.
En revanche, je souhaite appeler votre attention, mes chers collègues, sur le rapport annuel de performances (RAP) pour 2017, dont certains commentaires sont assez étonnants. Selon Bercy, « les justifications historiques de la retraite du combattant sont devenues obsolètes » en raison de plusieurs évolutions. Ainsi, les armées sont composées de professionnels qui acquièrent des droits à la retraite ; la carte du combattant, dont l'obtention permet de bénéficier de la retraite du combattant, est attribuée dès 120 jours d'OPEX, sans qu'il soit nécessaire d'avoir participé à des combats ; enfin, les blessures psychiques sont prises en compte par les pensions militaires d'invalidité. De son côté, dans sa note d'exécution budgétaire, évoquée tout à l'heure par le rapporteur général, la Cour des comptes semble regretter l'augmentation du montant de la retraite du combattant, qu'elle estime non justifiée – je rappelle qu'il s'agit de 748,80 euros par an…
Qu'est-ce qu'un budget si ce n'est la traduction d'une vision politique ? La mission Anciens combattants, mémoire et lien avec la Nation est destinée à répondre à notre souhait de rendre hommage à celles et ceux qui ont sacrifié une part d'eux-mêmes au nom de la France. Le droit à reconnaissance et réparation occupe une place particulière dans notre ordre juridique, c'est d'ailleurs le sens de l'article L1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, qui proclame que « la République française, reconnaissante envers les combattants et victimes de guerre qui ont assuré le salut de la patrie, s'incline devant eux et devant leurs familles. ». Dès lors, comment comprendre ces commentaires de la Cour des comptes et de la direction du budget sur la retraite du combattant ? Ces commentaires doivent-ils nous inquiéter, madame la ministre, et devons-nous nous préparer à devoir défendre la retraite du combattant ? Devons-nous encore expliquer qu'une mission à Gao, à Kidal, à Bangui ou à Bagdad, comporte des risques justifiant la reconnaissance de la Nation ? En d'autres termes, madame la ministre, que pensez-vous de ces commentaires pour le moins surprenants ?