Permettez-moi de parler d'un héritage.
Le 18 janvier 2016, le Président de la République, François Hollande, annonce un plan d'urgence pour l'emploi, en deux volets : la prime à l'embauche pour les TPE-PME et un plan de 500 000 formations financées par l'État. La prime à l'embauche dans les TPE-PME doit concerner les embauches réalisées jusqu'au 31 janvier 2017 avec une aide versée par trimestre à terme échu. Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire 2017, la Cour des comptes souligne que le Gouvernement de l'époque prend alors la décision d'interrompre prématurément l'admission de nouveaux dossiers au titre de la prime pour l'embauche, au 30 juin au lieu du 31 décembre. Le coût total de cette prime à l'embauche est estimé entre 3,5 et 4 milliards d'euros au cours de la période d'existence du dispositif : de janvier 2016 à juin 2017. L'impact de cette prime sur l'emploi serait « positif mais limité » – doux euphémisme ! L'INSEE, dans sa note de conjoncture de décembre 2017, estime à 10 000 le nombre d'emplois générés par cette prime. Dans sa note de conjoncture de juin 2016, l'INSEE prévoyait un impact à hauteur de 50 000 emplois créés, c'est-à-dire cinq fois plus que celui réalisé, tandis que la note du Trésor d'août 2016 l'estimait à 60 000, autrement dit six fois plus !
Ces résultats soulèvent plusieurs questions dans notre travail d'évaluation. La première concerne le rapport coût-efficacité de cette action publique : un coût de 3,5 à 4 milliards d'euros pour 10 000 emplois créés signifie qu'un emploi créé coûte entre 350 000 et 400 000 euros. Quel regard portez-vous sur ce résultat ?
La seconde question concerne l'écart entre les prévisions relatives aux résultats attendus de cette action et les résultats obtenus. Les modèles prévisionnels tablaient sur la création de 50 000 à 60 000 emplois ; or seulement 10 000 emplois ont été créés. L'écart entre la prévision et la réalisation est donc de 1 à 5, voire de 1 à 6.
Madame la ministre, ne serait-il pas utile de se pencher, sur un plan théorique, méthodologique ou statistique, sur l'origine de ces écarts, dès lors que la fiabilité et la permanence de ces modèles sont une condition essentielle pour éclairer utilement les choix de politique publique ? Ne serait-il pas utile d'établir des indicateurs de performance des outils économétriques d'aide à la décision publique ?