J'exprimerai la position du groupe La République en Marche. Madame la garde des Sceaux, vous présenterez dans quelques jours à notre Assemblée l'un des projets de loi constitutionnelle le plus important depuis la naissance de la Ve République.
Comme l'ont dit les rapporteurs, ce projet de loi constitutionnelle présente de nouvelles garanties de rénovation de notre République. À l'égard du Gouvernement, plusieurs mesures traduisent une volonté de responsabiliser ses membres, telle la constitutionnalisation de la pratique nouvelle de non-cumul de fonctions exécutives locales et ministérielles, d'une part, et, d'autre part, la responsabilité pénale de droit commun des ministres, impliquant la disparition d'une juridiction d'exception, la Cour de justice de la République. Désormais, la cour d'Appel de Paris jugera les ministres, après évaluation des requêtes par une commission ad hoc.
Autre progrès : la fin de la participation des anciens Présidents de la République au Conseil constitutionnel. Cette clarification n'a rien d'anodin ; elle traduit la transformation du Conseil constitutionnel en véritable Cour. C'est un juge que l'on peut saisir par voie d'action et par voie d'exception. Les anciens Présidents de la République n'ont donc plus vocation à siéger dans cette entité.
À la responsabilité de l'exécutif s'ajoute un renforcement de l'indépendance des magistrats du Parquet. Ils seront désormais nommés après un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. Cette mesure a un double mérite : elle garantit l'unité de la politique pénale de l'État en conservant le placement des magistrats du parquet sous votre autorité ; elle assure et renforce l'indépendance des magistrats ainsi nommés.
Vous avez également évoqué la création de la chambre de la société civile, qui sera celle de la participation citoyenne. C'est l'une des innovations principales de la réforme, puisqu'elle place en amont la participation citoyenne. Vient ensuite l'intervention juridique du Conseil d'État, puis celle de la représentation nationale. Le dispositif en tire cohérence et logique. Nous y souscrivons donc, moi en tant que responsable au sein du groupe sur ce texte, mais aussi les rapporteurs, comme en témoignent leurs propos.
Je passe sur les collectivités locales et le droit à la différenciation, consacré de manière plus importante encore, en tenant compte notamment de l'insularité de la Corse et des spécificités liées aux outre-mer.
Quant au Parlement, c'est un nouvel acte de renforcement de ses droits. Il s'agit là de ne pas se tromper. Comme l'a dit le président Richard Ferrand, nous souhaitons créer un Parlement libéré : libéré des contraintes superflues dans son organisation, des navettes trop longues et des amendements parlementaires et gouvernementaux qui n'ont pas de caractère normatif, qui relèvent du domaine du règlement ou qui s'avèrent être des cavaliers. Vous avez précisé que le Gouvernement serait soumis aux mêmes règles que le Parlement sur ces sujets. Nous y sommes en effet très attachés, car nous y voyons une protection.
Les rapporteurs se sont fait l'écho des suggestions nouvelles que nous voulions vous présenter. Au sujet de l'organisation interne du Parlement, vous avez émis quelques réserves sur le déplafonnement du nombre de ses commissions : il permettrait toutefois d'approfondir certains sujets grâce à une spécialisation accrue. Nous souhaiterions également des précisions quant aux modalités d'application, fixées dans la loi organique, permettant d'accroître le rôle et les compétences de la Conférence des Présidents.
Le président Marc Fesneau a précisé qu'on pouvait travailler sur l'accélération du calendrier budgétaire, mais que le projet devait également être renforcé quant à la faculté d'aller plus loin dans sa prévisibilité ou dans la définition des compétences de l'organe de contrôle qui sera adossé au Parlement pour exercer sa mission d'évaluation et de contrôle, confiée à lui par l'article 24.
J'en viens enfin à l'idée d'un parlement modernisé par les parlementaires qui le composent, en ce qu'ils ne cumulent plus des mandats d'exécutifs locaux ni, demain, des mandats dans le temps. Voilà une rénovation importante. Mais ce parlement est aussi modernisé parce qu'il est conscient des enjeux nouveaux. Aujourd'hui, ceux-ci sont inscrits à l'article 2, qui renvoie lui-même à l'article 34 de la Constitution. Cette prise de conscience s'inscrit donc dans le cadre des compétences du Parlement.
Lors de la dernière passation de pouvoir du Président de la République, le président du Conseil constitutionnel a fait référence à l'article 1er, en évoquant des principes « anciens et nobles ». Il disait que le Président de la République était le « Président d'une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. ». Il décrivait aussi les enjeux auxquels est confronté le Président de la République, « ce monde nouveau, où s'entrechoquent à la fois des perspectives magnifiques et des risques certains, y compris pour notre planète ».
Ces observations plaident pour une inscription de l'enjeu de la protection de notre planète, de la lutte contre le réchauffement climatique et pour la biodiversité à l'article 1er de notre Constitution.
Aussi, madame la garde des Sceaux, pouvez-vous nous indiquer la position du Gouvernement quant à cette proposition de repositionnement de l'enjeu environnemental à l'article 1er ? Cela permettrait aux parlementaires de s'en saisir, mais aussi aux citoyens, et aux juges de l'ériger au rang de principe constitutionnel.